Je veux m'inscrire en faux contre la propension de certains à toujours considérer que les autres feraient mieux que nous et qu'avant c'était bien meilleur. Ainsi ceux qui se plaisent à décrier ce qui se fait en France, n'hésitent pas à se référer à ce qui se passe chez le voisin avec une préférence lancinante pour l'Allemagne et la Suède.
Bien sûr, il leur arrive parfois de faire mieux que nous mais cela ne tourne pas toujours à notre désavantage.
Un alsacien récemment décédé est arrivé au purgatoire. Après un séjour de quelques jours, un jury composé à parité de quelques anges ainsi que de quelques diablotins détachés là par Belzébuth en personne. L'assemblée présidée par Saint Pierre a statué sur son cas. Le saint, porte-parole du président de l'honorable assemblée, communique au candidat une décision dûment motivée.
Le jury n'a pas retenu votre candidature pour le paradis et vous êtes orienté vers l'enfer pour avoir pendant trop longtemps voté à gauche. Cependant, parce que vous êtes alsacien, vous pouvez choisir entre l'enfer français et l'enfer allemand.
Mais quelle est la différence ?, s'enquiert notre alsacien tout surpris.
Il n'y en a pas ! Dans les deux enfers, le réveil est à quatre heures du matin, puis immersion dans une fosse septique jusqu'au menton avec déversement d'huile bouillante sur la tête toutes les deux heures. Trois fois par jour, à des heures précises, on vous extirpe de la fosse et on vous administre trente cinq coups de fouet avec un instrument dont les lanières sont incrustées de clous rouillés ( cela fait beaucoup plus mal, paraît-il).
Après mûre réflexion, l'âme errante alsacienne prend sa décision et opte pour l'enfer français. Il en fait part à son interlocuteur, qui à son s'en étonne dans la mesure où les deux enfers se ressemblent en tout point.
L'enfer français me paraît bien préférable à celui d'Outre-Rhin. Un jour, la fosse septique ne sera pas remplie, le lendemain l'huile sera à peine tiède et le surlendemain on ne retrouvera pas le fouet, à moins que le diablotin-fouetteur ne soit en grève illimitée ou retenu dans les embouteillages. Pour moi, c'est par conséquent, tout vu .
L'histoire que je vous raconte m'a été rapportée par un ami allemand. Le héros de l'histoire n'était pas alsacien mais un fier ressortissant du Pays de Bade de l'autre côté du Rhin.