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Billet de blog 8 octobre 2025

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Gaza, flottille : les morts qui comptent, les morts et activistes qui ne comptent pas

L'attitude de l'État français face aux dangers encourus par certains de ses ressortissants, passagers de la Global Sumud Flotilla, rappelle l'urgence à ce que cet État se trouve de nouveaux responsables.

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Un hommage a été rendu, ce mardi 7 octobre 2025, au ministère français des Affaires étrangères, aux 51 Français victimes, deux ans plus tôt, de la barbarie du Hamas.

Le ministre des Affaires étrangères démissionnaire Jean-Noël Barrot avait déclaré : "nous leur devons".

À cela, il n'est rien à dire : les familles des victimes du Hamas ont droit à la sollicitude de l'État français. À notre sympathie à tous.

Rappelons cependant que deux enfants français de 6 et 9 ans ont été tués à Gaza par l’armée israélienne, leur petit frère de 2 ans et demi ayant été de son côté grièvement blessé par les tirs de cette même armée et que cela compte aussi.

L'une des questions à poser ici est : qu'est-ce que le ministère des Affaires étrangères - ou Jean-Noël Barrot et bien sûr toute cette "Macronie" à laquelle il appartient - pense devoir aux activistes français qui souhaitent que les morts cessent de s'ajouter aux morts et sont convaincus qu'une vie palestinienne vaut une vie israélienne ?

Visiblement pas grand-chose. Ce ministère, au lieu d'annoncer publiquement qu'il ne tolèrerait pas que l'État d'Israël empêche ses ressortissants de parvenir à Gaza (sachant que le blocus de la bande de Gaza est illégal) et d'assurer leur protection avait en somme précisé les avoir prévenus que s'il leur arrivait quelque chose ce serait de leur faute (voir au bas de ce billet une partie de la déclaration du ministère le 24 septembre 2025). Mais ce n'est pas tout, à en croire le journaliste de L'Humanité Émilien Urbach, embarqué sur l'un des bateaux de la flottille : "moi le Quai d'Orsay je l'ai appelé la nuit où on s'est fait bombarder, où une dizaine de bateaux ont subi des attaques à l'explosif lancés par des drones. Je les ai appelés, il était 2h27 le matin, la personne que j'ai eue au standard au Quai d'Orsay a entendu la dernière détonation. Et ce soir-là, j'ai été écouté : j'ai eu des gens au téléphone dans une cellule de crise qui étaient assez désemparés par rapport à ce qui se passait mais qui prenaient [ça] au sérieux. J'ai rappelé le lendemain et puis ensuite le sur-surlendemain face aux menaces qui arrivaient etc. et là par contre ça a été un traitement hyper humiliant. On a remis en cause le fait que je puisse être un journaliste à bord de la flottille [...], 'et puis ces bombardements c'est tout de même pas vraiment avéré', enfin vraiment une remise en cause complète et puis on me raccroche au nez. À deux reprises. Je rappelle, on m'explique : 'Eh ben écoutez monsieur, si on vous a raccroché au nez c'est qu'on veut pas vous parler.' Et puis lorsque la rédaction du journal appelle le Quai d'Orsay on dit : 'Oui oui, ben oui c'est vrai qu'il y a eu une coupure.' Des manières de faire qui ne sont pas dignes d'un État comme la France". Il évoque ensuite, au moment de la détention, un consul "qui ne maîtrise absolument rien". Enfin, une fois arrivés à Athènes, les ressortissants français relâchés par Israël se seraient retrouvés face à un autre consul leur annonçant qu'il leur faut contacter leurs familles pour rentrer en France. Ils se sont donc retrouvés, poursuit-il, "en carafe", victimes d'un "abandon total de l'État français." "Quand on sait la place qu'avait la France au Moyen-Orient, son aura, son influence, sa manière de collaborer avec les autres États et les populations, on se dit 'mais en fait y a plus rien', on est dans un état de déliquescence complet", conclut-il.

Les déclarations d'Émilien Urbach recoupent celles d'autres membres français de la flottille et n'ont pas été mises en question par le Quai d'Orsay.

Il faut ajouter que l'attitude de l'État français n'a pas été celle d'autres États face à la situation de leurs courageux ressortissants : cette indignité n'est pas universelle. Le président colombien a notamment décidé d'expulser toute la délégation consulaire israélienne encore en poste à Bogota après que deux activistes de son pays comptant parmi les passagers de la Global Sumud Flotilla aient été enlevées en mer. 

Et poser cette question : des élus français maltraités par un État étranger qui ne seraient pas de la France insoumise, cela n'occasionnerait pas un incident diplomatique (malgré la forme particulière d'impunité dont bénéficie cet État)? 

Au-delà de la flottille et de la situation à Gaza (sans oublier la situation en Cisjordanie), cet épisode nous rappelle combien il est urgent que ceux qui sont aujourd'hui à la tête de l'État français cèdent la place.

Frédéric Debomy

P. S. Le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères le 24 septembre 2025 : "Les participants à cette expédition en faveur de Gaza ont été informés des risques encourus. Comme rappelé par le Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, se rendre à Gaza est dangereux et strictement déconseillé que ce soit par voie terrestre ou maritime. Les conseils aux voyageurs s’appliquent à tous y compris aux parlementaires et aux journalistes."

Source : 

https://www.youtube.com/watch?v=mOi_Hztx6u8

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