Quelle pertinence y a-t-il, pour marquer un désaccord avec Rokhaya Diallo, à la figurer en Joséphine Baker dansant avec à la taille sa trop fameuse ceinture de bananes ? Cette figuration de l'Afrique, on aimerait déjà l'oublier. Et quel rapport avec Rokhaya Diallo ? Riss, directeur de Charlie Hebdo et auteur de cette caricature, aurait bien du mal à nous l'expliquer. Mais voilà, il y a des gens qui ne peuvent penser à une femme noire sans la ramener à une imagerie directement issue de cette époque obscure où le racisme soutenait la colonisation.
Si au moins les membres de la rédaction de Charlie Hebdo - qui n'en sont pas à leur première infamie de ce genre et probablement pas, malheureusement, à leur dernière non plus - assumaient au moins leur vision du monde. Mais non, le scandale serait selon Charlie Hebdo la réaction de Rokhaya Diallo à ce dessin qu'elle juge raciste. Eh bien, elle a raison. Mais pour Charlie cette réaction est "une manipulation", l'hebdomadaire prétendant incarner l'"universalisme" et refuser, contrairement à Rokhaya Diallo prétend-t-il, d'assigner "chacun à son origine ethnique".
Eh bien non et merde. Quand on commet un dessin raciste, on ne se revendique pas de l'anti-racisme et on ne pose pas en victime d'une manipulation.
Ce serait faire preuve d'un minimum de dignité et assumer un tant soit peu ce qu'on fait.
Tout mon soutien à Rokhaya Diallo.
Frédéric Debomy
P. S. Quant à la manière dont on instrumentalise ces temps-ci Joséphine Baker, pour faire de cette femme à plusieurs égards remarquable une supposée preuve que la France ne connaissait et ne connaît pas le racisme et soutenir ainsi un récit "républicain" consistant en un déni de réalité (tant historique que du présent), l'opération n'a rien non plus de très honorable.