Amis birmans, je suis désolé. Je vis dans un pays où un certain nombre d'égarés croient que refuser de se faire vacciner, c'est défier une dictature.
Évidemment, ils ne sont pas privés comme vous de la possibilité de se faire vacciner ni plus largement de toute possibilité d'assistance médicale : s'ils tombent malades, après avoir éventuellement contribué à ce que la pandémie perdure et peut-être involontairement tué des gens, ils seront pris en charge (et pourront continuer à râler contre l'Etat).
Vous seriez étonnés aussi de les voir se rebeller contre l'idée d'une contribution au bien-être général, vous qui faites preuve depuis des mois d'une solidarité souvent émouvante face aux énormes difficultés rencontrées, le manque de nourriture notamment.
Enfin, vous écarquilleriez les yeux en les entendant parler de '' dictature '', vous qui risquez pour beaucoup une arrestation systématiquement accompagnée d'un tabassage dont vous pourriez sortir défigurés, sans compter les viols subis par les personnes de sexe féminin. Et je n'oublie pas toutes les personnes qui ont perdu la vie, les balles dans la tête et les bombardements.
Ce n'est pas que tout soit parfait chez nous. Les coups portés à notre imparfaite démocratie par des dirigeants indignes de leurs fonctions doivent nous rappeler à la vigilance sinon nous alarmer. Mais cela justifie-t-il de dire n'importe quoi ?
À la plupart d'entre vous je ne parlerai pas de ces rebelles de bac à sable, de leur égoïsme, de leur infantilisme. Je ne vous parlerai pas de cette indécence parce que je sais que cela vous déprimerait de savoir que dans un pays où, quelles que soient ses difficultés, tout va tellement mieux que dans le vôtre, des gens se comportent avec une telle médiocrité en s'imaginant de surcroît être héroïques. On est loin, si loin, de votre courage et de votre dignité.
Frédéric Debomy.