Les résultats sont tombés, 251 327 votants pour le référendum du PS. 89,7 % ont dit « oui » à l’unité de la gauche et des écologistes. Mais l’unité sur quoi ? Sur quel programme commun ? Pour proposer quoi aux Français ? Bref, pour mettre en œuvre quelle politique ? Personne ne le sait et Cambadélis ne s’en soucie guère car il sait que la politique économique du gouvernement issu de ses rangs est irréconciliable avec les valeurs de la gauche. C’est dire le mépris dans lequel sont tenus les électeurs. D’ailleurs, une trentaine de fédérations du PS ont refusé de se mobiliser, ce que Cambadélis se garde bien de crier sur tous les toits.
Contrairement à ce que prétend Cambadélis, ce référendum est un fiasco monumental. Digne d’une République bananière, en recherche de plébiscite pour mettre la pression sur ses « concurrents de gauche » (appelons les ainsi car pour être « partenaires » il faut avoir en partage la même idéologie) à l’occasion des élections régionales, ce référendum n’a pas fini de laisser des traces. Quelles en seront exactement les répercussions politiques ?
D’abord, le scrutin s’est déroulé dans des conditions plus que contestables, pas de contrôle d’identité des votants sur les marchés, possibilité de voter plusieurs fois via internet et disparition des doublons. Comme le rapporte un expert : « C’est un principe intrinsèque au vote en ligne, et même au droit électoral : on ne doit pas pouvoir lier l’électeur à son vote. Une fois que votre bulletin a été glissé dans l’urne, on ne peut pas savoir pour qui vous avez voté. Le vote en ligne respecte cette dissociation. Or, là, ils ne peuvent dédoublonner qu’en ayant gardé un lien entre le vote et le votant ! ». Le référendum ne respectait absolument pas les recommandations de la Cnil. Les règles élémentaires de la déontologie électorale ont été bafouées. La démocratie pour le PS est un théâtre où le suffrage électoral joue le rôle de Tartuffe, avec l’espoir que ne soit pas trop dévoilée la supercherie. Et puis, selon l’adage « plus c’est gros, plus ça passe », le bourrage des urnes n’a jamais refroidi les apparatchiks du PS. Cette nouvelle mascarade démocratique, après la conférence sur le dialogue social, ne manquera pas de discréditer un peu plus l’action du Parti socialiste. En tout cas, la gauche sait à quoi s’en tenir le jour où elle devra négocier avec l’actuelle direction du PS.
De telles pratiques ne restent pas sans conséquences. Déjà les frondeurs montent au créneau avec leur témérité légendaire tempérée par la perspective de l’exclusion. « Nous n’avons rien fait pour gêner ce référendum, nous y avons même participé, par solidarité avec les camarades envoyés ainsi sous la mitraille, sur les marchés et à la porte des gares, et avec nos candidats que cette initiative a plus gênés qu’encouragés ! » ont-il déclaré dans une lettre au premier secrétaire. C’est vrai, pourquoi s’opposer à une escroquerie politique ? Mais l’objet de ce courrier porte d’abord sur la nécessité de rappeler Cambadélis à son devoir de Premier secrétaire. « Nous avons une autre ambition pour le parti de Jaurès et de Blum, de Mitterrand et de Jospin. Les coups de pub ne remplacent jamais les processus politiques de fond […] A s’étonner des conséquences sans traiter sérieusement les causes de ses divisions, la gauche française s’enferre et s’enterre. » Et maintenant ? Les frondeurs vont-ils s’enterrer avec le PS ? Réponse après la débâcle des régionales.
Du côté de « l’autre » gauche et de son électorat, l’écœurement est à son comble. Les méthodes sont juste détestables et se faire forcer la main de la sorte pour souscrire à une unité factice que tout le monde répugne à envisager, risque de laisser des cicatrices profondes dans les mémoires des militants. Cambadélis entérine un peu plus un divorce déjà prolongé avec le peuple de gauche et se ridiculise aux yeux de toute la classe politique. Même la droite se gausse : « Ce référendum est à la fois une pantalonnade et un chantage », a ironisé Jean-Christophe Lagarde (UDI). Aussi, ce référendum sera-t-il le chant du cygne de Cambadélis et son déshonneur. A moins que vider le PS de ce qui lui reste de militants sincères ne soit une volonté de sa part pour faire de l’appareil une machine électorale de centre gauche, aux mains de technocrates asservis aux intérêts du patronat ? Guy Mollet n’y est pas arrivé. Ce fut la fin de la SFIO et sa recomposition.