Sur le 7 octobre
Difficile de ne pas savoir que des actes horribles voire inhumains ont ou auraient été perpétrés par les militants du Hamas infiltrés en Israël. Aucun commentateur n'est autorisé à débattre sans le rappeler en introduction, sauf à se faire immédiatement rabrouer et délégitimiser. Aucune émission, aucun article sans que ce rappel soit martelé comme un mantra. Hormis quelques médias marginaux et marginalisés, impossible d'ouvrir un journal, une radio ou la télé sans être submergé par la description univoque d'une action forcément bestiale dont aucun contexte ne pouvait suggérer le début, sinon d'explication, tout au moins d'analyse sauf à s'en faire taxer de complice actif.
Comprenons-nous bien : il est avéré que des civils ont été tués, ce qui constitue bien un crime de guerre et ne saurait être ici défendu. Et je m'associerai bien volontiers à tous ceux qui demanderont que leurs auteurs soient traduits devant les juridictions ad hoc. Mais je suis un peu étonné, même si je m'en réjouis, par l'attention aussi soudaine que sourcilleuse des commentateurs à stigmatiser les crimes de guerre dans la région alors qu'ils ont consciencieusement ignoré ceux qu'y perpétrait l'état israélien depuis au moins 56 ans.
Il est un autre aspect que personne ne relève, à savoir qu'il s'agissait d'une intervention armée de palestiniens saoulés de décennies de persécutions et d'humiliations. ..Et que cet action armée s'est soldée par des combats (oui, des combats, pas simplement des massacres de civils) ayant fait environ 400 tués - militaires et policiers - côté israélien. Combats et victimes militaires et non civiles dont personne ne parle. Ce qui, ajouté aux enlèvements (dont des prisonniers militaires) en fait une victoire éclatante des palestiniens du Hamas, qu'on le veuille ou non. Et c'est peut-être ce qui a le plus enragé les dirigeants et l'armée israéliens au point de commettre la boucherie en cours à Gaza.
Enfin des informations rapportées pas des habitants de kibboutz (à prendre comme toutes les autres avec prudence mais paraissant vraisemblables) tendraient à indiquer qu'une partie des civils auraient pu être tués par des tirs israéliens :
Que s'est-il réellement passé le 7 octobre ? - International Solidarity Movement – ISM-France
Au total en un ensemble touchant, le chœur des médias, des commentateurs – et chez nous du pouvoir, honte à lui – s'est insurgé contre cette guerre « ayant débuté le 7 octobre, imposée à Israël », comme si toute la région était en paix le 6 ! Et tous d'invoquer avec un cynisme consommé « le droit inaliénable à se défendre de l'occupant israélien ». Les mêmes auraient-ils osé invoquer l'inaliénable droit à se défendre de l'occupant hitlérien contre les menées des résistants « terroristes » des maquis français en 43 ?
À ce propos, rappelons l'exemple édifiant de ce courageux militaire israélien ayant achevé un résistant palestinien blessé après avoir attaqué - chez lui, en territoire occupé - un soldat occupant israélien : sous la menace d'une condamnation à 20 ans de prison, il a été condamné à 18 mois, libéré au bout de 9 . Et bénéficie depuis lors en Israël d'un statut de "quasi roi" encensé, choyé partout et bénéficiant de tous les avantages matériels imaginables : Un soldat achevant un blessé sans défense, voilà ce qu'est le "droit à se défendre" vu du côté de l'occupant. Et, cerise sur le gâteau, ce héros national israélien a la double nationalité française : comment ne pas en être fiers ? (12)(13)
Pour finir, aucun média n'a osé dire à ma connaissance que le 7 octobre aura réveillé les consciences, en révélant le délire destructeur criminel et pathologique de l'état israélien malheureusement confirmé par ces deux mois de folie meurtrière à Gaza martyrisée sous le regard indifférent de l'Occident bien-pensant. Et pourtant, sans le 7 octobre, personne n'aurait osé reparler d'une solution à deux états..
Quelle information nous est-elle délivrée ?
Toutes les informations sur les faits ont été apportées par les autorités israéliennes, et au premier chef par leurs responsables militaires. Dont chacun connaît la franchise et le sens de la mesure. Aucune de leurs assertions n'est mise en cause. Alors que les chiffres de morts à Gaza – pourtant authentifiés par tous les organismes humanitaires sur place - pourront ici où là être mis en doute (« franchement, peut-on faire confiance au Hamas ? » ) tandis que seront vantées la technicité des opérations israéliennes, en invoquant par exemple l'appui de l'intelligence artificielle pour justifier des frappes soit-disant centrées sur le seul Hamas , frappes chirurgicales ayant abouti quand même à ce jour à ce que près des 2/3 des bâtiments de GAZA soient aujourd'hui rasés, il y a des chirurgiens à qui l'on hésiterait à se confier.
Alors où, quand, comment et auprès de qui les médias rabâcheurs ont-ils vérifié et croisé leurs sources ? Les autorités israéliennes après avoir donné leur version à la presse se sont formellement opposées comme d'habitude à toute enquête indépendante et impartiale à ce sujet, fut-ce sous l'égide de l'ONU. En réponse au Haut commissaire aux droits de l'Homme, Netanyahou a fait répondre que :« le droit international humanitaire restait la « référence » de l'armée israélienne. « Israël est en guerre contre le Hamas, une organisation terroriste génocidaire. Il ne s'agit pas d'une guerre contre les Palestiniens. Il ne s'agit pas d'une punition collective »,
le droit international évoqué par Netanyahou, il fallait oser, chacun sait ce qu'il a fait de la cinquantaine de résolutions de l'ONU (7) le concernant ou du droit maritime (abordage dans les eaux internationales du « Marmara » turc et du « Dignité El Karama » français en 2010 et 2011..). Mais les doigts d'honneur de cet état en la matière sont si habituels, et si bien supportés par la « communauté internationale », pourquoi s'en priver ?
(1)(2)(3)(4)(5)(6), et l'on pourrait continuer ad libitum...
Et pendant que le réel n'est jamais – ou si peu – évoqué (8), les sources d'information sont visées, les journalistes assassinés (9)(10)(11)... y compris le siège de l'AFP : on attend le flot des condamnations : rien, sauf, encore et toujours, le droit inaliénable du bourreau à se défendre contre sa victime ...
le message inaudible de « la voix de la France »
Un soutien inconditionnel à 56 années de crimes de guerre, une amitié indéfectible réaffirmée à leurs auteurs, une condamnation sans appel d'une journée de résistance possiblement marquée elle aussi de crimes de guerre sur cette seule journée, des visites diplomatiques où la France s'est ridiculisée sans avoir été écoutée puisqu'elle n'avait rien à dire, une empathie à sens unique envers les seules victimes israéliennes puis un timide revirement visant à contenir la folie meurtrière israélienne sans se donner le début du commencement effectif de la maitriser, la condamnation sans nuance d'un « terrorisme » du Hamas assimilant de fait tous les palestiniens à cette condamnation les rejetant sans défense possible dans le camp du « Mal ». Et l'évocation pour le moins étonnante par un E.MACRON qui n'en avait JAMAIS parlé d'une solution à deux états, lui qui en décembre 2017 rejetait – enterrement de première classe - la simple reconnaissance de l'Etat palestinien comme inutile et contre-productive.
Ajoutons-y une condamnation officielle d'une France soit-disant globalement antisémite, ce qu'elle n'est pas, en montant en épingle une série d'actes comptabilisés à l'unité près mais jamais détaillée (au fait, quelle suite ont donné les médias à la soit-disant attaque au coups de couteau dans le ventre d'une femme sur le pas de sa porte, pourtant serinée en boucle?) Manoeuvre pitoyable de diversion et de division par celui qui ne cesse de se proclamer – vaste farce - infatigable rassembleur.
Car si nous pouvons nous vanter de compter en nos rangs quelques crétins effectivement antisémites, il ne faudra pas s'étonner si les positions officielles unilatérales poussent quelques esprits fragiles à fomenter contre nous d'autres attentats.
En conclusion
L'information sur le conflit en cours a été incontestablement biaisée, incomplète, orientée, outrageusement partiale. Peut-être la colère me fait-elle quelque peut grossir le trait, mais comment ne pas manifester sa colère quand se déroule sous nos yeux un génocide que ceux qui en ont le pouvoir auraient pu et pourraient encore stopper en quelques jours, en quelques heures, voire d'un seul mot ?
Frédéric PIC
Pau
(1)https://www.liberation.fr/planete/2009/11/06/israel-refuse-d-enqueter-sur-la-guerre-de-gaza_592257/
(2) https://news.un.org/fr/story/2023/11/1141002
(3)https://www.lepoint.fr/monde/israel-refuse-une-enquete-internationale-07-06-2010-463657_24.php
(9)https://cpj.org/2023/12/journalist-casualties-in-the-israel-gaza-conflict/
(11)https://cqfd-journal.org/Palestine-entre-terreur-et?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=une_usine_d_assassinats_de_masse_au_coeur_des_bombardements_calcules_d_israel_sur_gaza&utm_term=2023-12-09
(12)Un soldat israélien condamné à 18 mois de prison pour avoir achevé un assaillant palestinien blessé.pdf
(13)Elor Azaria, le meurtrier devenu « roi », mène une vie de château en Israël | Middle East Eye éditio.pdf