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Billet de blog 21 décembre 2023

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Comment se perdre en gagnant

Dès le moyen âge en France et même chez les plus démunis était maintenue chez tous « la part du pauvre » : une écuelle en attente de qui, à tout hasard, pouvait frapper à l'huis et demander à se restaurer. Il semble qu'aujourd'hui les pays riches rechignent à maintenir cette marque de solidarité, par une loi votée qui plus est à l'approche de Noël : tu parles d'un cadeau !

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Si l'on part du présupposé que l'immigration est un problème, il est clair qu'il ne sera en rien réglé par des coercitions ICI, mais en aidant les pays d'émigration - plutôt du Sud - à régler leurs problèmes. En rappelant que tant sur le plan climatique qu'économique, nous en sommes au Nord pour beaucoup responsables. Multiplier les boucliers ICI ne servira à rien si l'on ne s'attaque pas aux causes chez eux. Comme le dit le proverbe chinois (1) : « quand l'eau bout, ne mets pas le couvercle, baisse le feu » (en l'occurence la misère et la persécution)

Il est d'ailleurs intéressant de noter que lorsque nous colonisions le Sud les armes à la main pour imposer notre pouvoir, notre culture, nos religions et piller leurs ressources naturelles en maintenant les populations locales en sujétion, nous étions des types formidables dispensateurs de progrès ; tandis que lorsque dans un mouvement inverse les miséreux ou persécutés du Sud viennent quémander un travail et de quoi consommer chez nous, c'est l'abomination de la désolation...

Une large majorité de français nous dit-on serait favorable à cette loi, quasiment en chacun de ces 26 articles. Pourquoi pas, sauf que c'était la même proportion qui rejetait la réforme des retraites, mais le faisait savoir en défilant par millions, car ceux qui allaient devoir reprendre le boulot alors qu'ils se croyaient déjà en retraite savaient pertinemment de quoi il s'agissait. Tandis qu'ici j'attends les millions de manifestants réclamant la tête des immigrants, leur expulsion et au moins leur mise à la diète, et à la rue. Mais nous attendrons longtemps : l'approbation ici est commode, silencieuse, le sondé bien planqué chez soi, honteuse en un mot. Et puis, le sondeurs n'ont pas posé la bonne question qui serait : « Vous êtes pour cette loi, d'accord. Mais l'êtes-vous définitivement, ontologiquement, carrément, ou votre avis pourrait-il être différent si l'on vous donnait à vous les pépettes que vous méritez ? » Car si le gâteau est plus gros, l'on sera plus enclin au partage. Et restreindre les aides aux migrants ne donnera pas un kopek de plus aux français.

Je dirais même que le calcul du pouvoir est le suivant : commençons par mettre les citoyens au régime sec, économisons le pognon de dingue qu'ils nous coûtent et dépensent visiblement n'importe comment. Bien tondus, ils deviendront regardants, voire pingres. Et si on leur raconte le bobard comme quoi c'est parce que les migrants se goinfrent qu'ils crèvent la faim, alors ils voteront tout ce que DARMANIN, BARDELLA , BORNE et surtout MACRON (2) leur ont présenté ces derniers jours. Lesquels pourront triomphalement annoncer à leurs admirateurs qu'ils vont enfin pouvoir rester entre eux en imbéciles heureux qui sont nés quelque part, en payant moins d'impôts sur le revenu et/ou la fortune...

Cette loi stigmatisant l'Étranger sans le moindre pouvoir réel de modifier les flux migratoires nous concernant et sans amener le moindre mieux-être palpable aux français n'est pas simplement inutile, elle est surtout perverse en ce qu'elle s'attaque aux symboles et aux traditions universalistes faisant notre force et notre originalité, pour donner au monde l'image d'un repli sur soi cauteleux et d'une France franchouillarde. Ce quelle n'est d'ailleurs pas majoritairement (pas davantage qu'antisémite soit dit en passant). Comme le montrent (allons bon, il y aurait de l'espoir?!) les décisions des départements et mairies déclarant qu'ils n'appliqueront pas cette loi scélérate, ou la contourneront : ce ne sont pas des séditieux comme le prétend E.CIOTTI, mais de bons citoyens appliquant les préconisations de l'art.35 de la constitution de la 1ére République du 24 juin 1793 que chacun ferait bien de relire de temps en temps (3) :

«  Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs. »

Les manifestants contre la réforme des retraites, comme ceux défilant au cri de « Liberté » contre les mesures iniques et absurdes du temps du covid ne disaient et ne faisaient rien d'autre.

Le seul remède si l'on veut vraiment tarir tous les apports négatifs de l'immigration (tout en gardant les bénéfices propres aux mélanges de civilisations) sera donc bien d'aider les démunis et/ou persécutés. Soit chez eux, soit ici. Mais si nous refusons cette aide toujours et partout et comme l'environnement vivable se restreindra, alors nous subirons encore plus massivement l'immigration, avec le risque non négligeable qu'une violence du coup franche et généralisée ne vienne remplacer la demande d'asile ou de visas.

Frédéric PIC

(1) oui, bon,le « proverbe » est de moi, c'est bon, on ne va pas chinoiser !

(2) quand on observe la trajectoire du personnage, j'aimerais demander à F.HOLLANDE s'il ne lui arrive pas de penser qu'il s'est fait enfumer par les bons copains (JOUYET, ATTALI, voire MINC en billard à 3 bandes) qui le lui ont présenté ?

(3)https://www.conseil-constitutionnel.fr/les-constitutions-dans-l-histoire/constitution-du-24-juin-1793

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