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Billet de blog 24 juin 2011

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Une Marine de Damoclès au dessus de l'isoloir

Il faudra s'y résoudre, dorénavant toute critique, surtout si elle est pertinente, du parti socialiste devra répondre d'une éventuelle responsabilité dans la montée du front national. Dans montée, il faut bien sûr comprendre une augmentation des intentions de vote dans les sondages. Cette étrange vision de la politique semble avoir été adoubée par certains caciques d'EELV. 

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Il faudra s'y résoudre, dorénavant toute critique, surtout si elle est pertinente, du parti socialiste devra répondre d'une éventuelle responsabilité dans la montée du front national. Dans montée, il faut bien sûr comprendre une augmentation des intentions de vote dans les sondages. Cette étrange vision de la politique semble avoir été adoubée par certains caciques d'EELV.

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Le problème du front national en France est abordé de façon surréaliste, ou plutôt de façon réaliste, puisque malheureusement la manière dont on traite effectivement les problèmes dans notre société, consiste à ne jamais agir sur le fond mais toujours sur l'écume des choses.

Quel est le problème finalement?l'extrême droite monte partout en Europe. Traiter le fond consisterait à chercher pourquoi les électeurs se détournent des partis politiques classiques. On pourrait oser une hypothèse audacieuse, un peu folle, et si c'était parce que la majorité de ces partis ne représentent plus du tout ceux qu'ils sont censés représentés?ceci nous amène à une autre question, comment est-ce possible dans une démocratie?

Au lieu de mettre sur la table ces bonnes question, ce qui aboutirait fatalement à de meilleures réponses, le débat se focalise sur le FN, donc sur la conséquence d'un problème politique de fond et non sur ses causes. Ainsi aucune solution ne peut émerger, et le refrain sur le FN revient à chaque nouvelle élection comme une boucle sans fin. Remarquons au passage que les deux seuls partis que cette situation avantage électoralement sont aussi les deux seuls à avoir exercé le pouvoir depuis 30ans, peut-être y a t-il là encore quelque chose à creuser.

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La réponse au problème est relativement simple, si une réforme de la pensée politique est envisageable il faudrait un certain nombre d'années pour qu'elle entraîne des effets sensibles, or l'élection de 2012 approche et il nous faut une solution rapide. Si le FN est un tel danger pour la démocratie en accédant au pouvoir avec les institutions actuelles, il n'y a que deux solutions pour eradiquer cette menace lors de l'échéance qui nous intéresse:

1- Interdire ce parti.

2- Modifier les institutions puisque cette peur découle de l'insuffisance en contre-pouvoir dans la Vème république, autrement dit il y a un grave déficit de démocratie dans notre pays, rendant dangereux un président-monarque extrémiste.

La première solution est séduisante mais ne traiterait qu'une partie du problème et comporte de nombreux risques. La deuxième me semble la plus adaptée notamment dans le contexte d'une élection présidentielle. Établir une 6ème république devrait être naturel pour le PS, et une vraie démocratie devrait contenir les excès du parti au pouvoir. Une démocratie citoyenne contient en germe les éléments permettant de destituer le pouvoir qui l'aurait mise en place, elle s'auto-régulerait démocratiquement. Seul A.Montebourg au PS défend cette idée, et le moins que l'on puisse dire c'est qu'il n'est pas majoritaire.

La solution superficielle consiste à utiliser cette menace pour conquérir le pouvoir en faisant l'économie d'un programme, tout en ne proposant rien pour éviter que la situation ne se reproduise. C'est cette solution qui malheureusement semble avoir été choisie pour le moment. Que la 6ème république ne soit pas au cœur du programme du PS pour 2012 après cinq années de sarkozisme en dit long. Soit les dirigeants du PS ne comprennent pas le problème et c'est très grave, soit ils ne veulent pas le voir car les institutions et le FN les favorisent électoralement et c'est encore plus grave en ce qui concerne les valeurs qui les animent. Dans les deux cas il vaut mieux regarder ailleurs.

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Dans ce contexte il est très surprenant d'entendre D.Cohn-Bendit puis J.Bové expliquer qu'EELV serait prêt à se rallier au PS dès le premier tour si le FN était trop menaçant. C'est surprenant à plusieurs titres.

1- Ces deux personnages, aussi influents soient-ils, ne sont pas les porte-parole de ce mouvement, Cohn-Bendit n'était même pas présent lors du congrès fondateur d'EELV, il est donc très curieux qu'ils se prononcent pour un choix engageant tout le parti. D'autant qu'E.Joly a expliqué qu'il n'en était pas question. Les militants de ce jeune parti apprécieront surement.

2- C'est en rupture avec l'accord tacite de la 5ème république qui veut que le président soit élu au suffrage universel mais que toutes les tendances soient représentées au premier tour.

3- Aucune contre partie démocratique n'est demandée au PS pour ce sacrifice. Seulement un accord législatif, c'est poursuivre dans les pratiques qui insupportent de plus en plus de français.

4- C'est donner une importance invraisemblable aux sondages. J.Bové et D.Cohn-Bendit ont annoncé que cette décision serait prise en février en fonction des enquêtes d'intention de vote, c'est ahurissant. Les sondages deviennent ainsi officiellement la clé de voûte de la pensée politique française. De plus des questions techniques interviennent, quelle marge sera choisie pour estimer qu'il faut se rallier au PS? il y a 40% de personnes qui choisissent leur candidat la veille parait-il, faudra-t-il que le PS ait 40% de plus que le FN pour estimer que la situation est sans danger? ces questions n'ont pas de sens, autant qu'EELV se rallie tout de suite au PS, ce qui aurait au moins un fondement idéologique, ces deux partis étant somme toute très proches. En réalité la seule question qui intéresse les dirigeants d'EELV est celle de leur poids dans les sondages, pour pouvoir monnayer en conséquence le nombre de poste à l'assemblée, avoir une base de négociation. C'est une manière élégante de faire passer une décision purement électoraliste pour un accès de conscience républicaine anti-FN.

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Finalement on pourrait imaginer que toute la gauche, y compris le Front de gauche, accepterait un front républicain qui instaurerait une vraie démocratie, seul point qui devrait en théorie convenir à tous les partis se réclamant de la gauche. Le raisonnement serait le suivant, nous acceptons de ne pas nous présenter cette fois-ci parce que la situation du pays est très grave, nous refusons d'avoir à choisir entre une droite fascisante et une extrême droite au second tour. Mais à condition que cette situation ne se reproduise jamais plus.

En effet il y en a assez de devoir choisir un candidat non parce qu'il défend nos idées, mais parce qu'il semble être le mieux placé pour éviter que celui que nous ne voulons pas voir au second tour, ne nous oblige finalement à voter pour le candidat défendant des idées contraires lors du 2eme tour. C'est l'avilissement complète de la politique, de cette manière l'élection n'a plus aucun sens pour le citoyen.

Étant donné les enjeux électoraux, le PS ne semble pas à la mesure du rôle historique qu'il pourrait jouer en acceptant de sacrifier son hégémonie, préférant soutenir des institutions iniques mais qui en bout de course l'arrangent et semble bien correspondre à sa vision du citoyen.

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