Agrandissement : Illustration 1
Matthieu Vasseur (Pierre Niney) a l’oreille fine. Très fine même. Il est acousticien au BEA, le Bureau d’Enquêtes et d’Analyses, qui étudie notamment les enregistrements des fameuses boîtes noires après un accident d’avion. Ça tombe bien, si on peu dire, un crash vient d’avoir lieu dans les Alpes, avec l’un des appareils les plus sophistiqué du marché. Mais Matthieu n’est pas envoyé sur ce dossier. C’est Victor Pollock (Olivier Rabourdin) qui s’en charge et se rend sur place pour retrouver la boîte noire, et en extraire les enregistrements. Mais quand ce dernier disparait mystérieusement sans raison, le patron du BEA, Philippe Rénier (André Dussollier) lui confie la direction de l’enquête. Défaillance technique, acte terroriste, erreur de pilotage : dans un climat de pression il est difficile de se prononcer. Très vite, cette enquête va tourner à l’obsession chez Matthieu Vasseur…
Yann Gozlan est un obsédé du son, des apparitions, des fantômes qui traînent ici ou là dans la tête des gens. Dans Un homme idéal en 2015, avec Pierre Niney qui jouait déjà un « Matthieu Vasseur », il mettait en scène l’histoire d’un jeune écrivain en quête du premier roman qui le rendrait riche et célèbre, qui pompait intégralement le journal d’un vieil homme récemment décédé, sur lequel il était tombé par hasard. Matthieu recevait courriers et coups de fil étranges de cette personne pourtant décédée, l’entraînant dans une spirale mensongère et criminelle pour tenter de préserver son secret.
Agrandissement : Illustration 2
Dans Boîte noire, Pierre Niney – qui se nomme également Matthieu Vasseur – devient si obsédé par la résolution de l’enquête qui lui est confié, que cela réveille chez lui des acouphènes – qu’il règle en mettant en tremblant des petites oreillettes sans fil dans ses précieuses oreilles – mais va jusqu’à avoir des sortes de visions, cauchemars, sensation d’être suivi, et que même son entourage proche (Noémie, sa femme) devient un suspect parmi d’autres. Le spectateur lui aussi est entraîné dans cette fuite en avant, de sorte qu’il finit par douter lui-même des intuitions, supputations, et conclusions du jeune Vasseur, pourtant brillant.
Pas assez pour devenir pilote lui-même, cependant. Le fond de Boîte noire rejoint alors les très contemporaines questions du « il y aura-t-il encore un pilote dans l’avion ? » quand les automatismes et l’intelligence artificielle, les aides au pilotage auront pris le dessus sur l’humain, et ses glorieuses erreurs… ?
Le film de Yann Gozlan est bien ficelé, l’abondance de terme technique donne à Boîte noire un sens précis et réaliste, loin de rebuter derrière l’opacité qu’on aurait pu craindre. « La quête de la vérité, c’est une thématique moderne. On arrive à un moment où la technologie complique un peu nos vies plutôt qu’elle ne la simplifie, et créé de la paranoïa », explique Yann Gozlan dans la note de présentation de son film en compétition lors du Festival du film francophone d’Angoulême en août dernier. Et les festivaliers ne s’y sont pas trompés – les spectateurs ont toujours raison disait le regretté Belmondo qui vient de disparaître – puisque Boîte noire a obtenu le Valois du public lors du palmarès du FFA.
Agrandissement : Illustration 3
Un petit poil long peut-être (2h09), Pierre Niney suscite cependant l’empathie nécessaire pour son personnage, en tension et fragilité, rendant palpable les tourments qui l’agitent jusqu’à déstabiliser son couple (très bien secondé par Lou de Laâge, interprétant Noémie, ambitieuse consultante technique du BEA). Il est probable donc que cette Boîte noire suscite l’intérêt du public, après celui des festivaliers d’Angoulême ; sans toutefois se montrer très rassurant au moment de monter dans un avion pour ceux ou celles qui redoutent déjà ce moment…
F.S.
Boîte noire. De Yann Gozlan. Avec Pierre Niney ; André Dussollier ; Lou de Laâge ; Sébastien Pouderoux ; Olivier Rabourdin. 2h09. Sortie le 8 septembre.