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Billet de blog 12 février 2023

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La Montagne : la fantastique abstraction de l’appel des cimes

Film quasiment inracontable, La Montagne de Thomas Salvador n’accouche pas d’une souris, bien au contraire. Ample et généreux, il mêle fantastique et abstraction avec un certain brio. Le festival du film de Gérardmer l’a d’ailleurs primé.

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Illustration 1
- Le soleil se couche aussi en montagne - © (c) Christmas in July

Le pitch : Pierre (Thomas Salvador), dont on ne sait rien si ce n’est qu’il travaille dans une entreprise fabricant des bras articulés, se rend dans une ville près des montagnes pour faire une démonstration. Par la fenêtre, il perçoit l’appel des cimes. Il décide de rester le week-end et part, après avoir acheté un peu de matériel, en « bivouac » près de pistes de skis. Au moment de repartir vraiment, Pierre laisse filer le train dont on devine qu’il le ramènerait à Paris. S’équipant plus sérieusement, il va planter sa tente sur le glacier de l’Aiguille du Midi, près de la mer de glace. Nous sommes donc dans les Alpes, et Pierre va vagabonder de plus en plus loin, ignorant les blocs rocheux qui se détachent des sommets, réchauffement climatique oblige, à cause de la fonte du permafrost. Il fait la connaissance de Léa (Louise Bourgoin), cheffe d’un restaurant d’altitude, dont on ne sait pas grand-chose non plus, si ce n’est qu’elle semble quand même avoir un fil d’une dizaine d’années. Pierre remarque, lors de ses escapades entre roches et glaciers, d’étranges éléments rougeoyant qui se déplace en rampant. Qu’est-ce que c’est donc que ça ? On ne le saura jamais… En tout état de cause, Pierre suit ces étranges créatures et plonge dans la montagne elle-même, et là le film passe du fantastique à l’abstraction.

Illustration 2
- Pratique si on n'a plus de batterie dans sa frontale... - © (c) Christmas in July

Le festival du film fantastique de Gérardmer ne s’y est pas trompé : La Montagne a raflé les prix du jury et de la critique. Il y a de quoi. On demeure, en sortant, entre circonspection et admiration : dans les plis de la nature semble se cacher une forme matricielle, dont on pourrait se laisser accoucher une seconde fois – comme Pierre mais on ne va pas « divulgâcher »  la fin – dans le scintillement des glaces qu’on croyait éternelles, la mère-nature engage à dépasser l’abstraction. À plusieurs reprises, Pierre Salvador, avec l’entêtement et l’obstination propres aux alpinistes, engage entre lui et la montagne, entre lui et lui, entre lui et le spectateur, une conversation métaphysique où la fusion des corps, de la roche et de la glace, dans une ambiance amniotique, donne à La Montagne une générosité et amplitude rarement vue au cinéma.

Thomas Salvador et Louise Bourgoin, dans une joute faite à la fois d’observation, d’admiration, pour enfin laisser place à l’attraction irrémédiable des corps en fusion, donnent à l’ensemble de ces 115 minutes un bien beau moment ce cinéphilie qu’il pourrait être intéressant, dans l’ambiance actuelle de fin du monde, de se laisser entraîner sans retenue…

F.S.

La Montagne, film de Thomas Salvador, avec Thomas Salvador, Louise Bourgoin.

Illustration 3
- Louise Bourgoin - © (c) Christmas in July
Illustration 4
- L'obstination de l'alpiniste solitaire - © (c) Christmas in July

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