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Billet de blog 27 juin 2023

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Wahou ! La drôle de mélancolie d’un duo d’agents immobiliers

La nouvelle comédie de Bruno Podalydès nous entraîne dans le monde si particulier des agents immobiliers. Mais loin de ne verser que dans les sketchs et la caricature, l’auteur-réalisateur ouvre des portes sur la mélancolie de personnages à la fois drôles et touchants.

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Illustration 1
- Oracio (Bruno Podalydès) et Catherine (Karin Viard), proches de l'effet wahou ! - © (c) Anne-Françoise Brillot

Un deux-pièces fonctionnel dans le « triangle d’or » de Bougival (qui n’existe pas), une grande maison bourgeoise avec terrain arboré « piscinable » et vue imprenable sur les voies du RER (« avantage : on est tout près de la gare »). Ce sont les deux biens qu’Oracio (Bruno Podalydès) et Catherine (Karin Viard) font visiter à tour de rôle, en s’emmêlant un peu les clés. Du neuf et de l’ancien. Du pratique et du charme. Choix de raison ou coup de cœur. Oracio le dit à son jeune stagiaire : « il faut qu’en moins de deux minutes, le visiteur fasse wahou !, sinon c’est foutu ».

Illustration 2
- Eddy Mitchell et Sabine Azéma s'apprêtent à faire une croix sur de longues années de souvenirs dans leur maison - © (c) Anne-Françoise Brillot

L’effet Wahou !, pour un bien « d’exception », selon la formule consacrée - qui ne l’a pas déjà lu dans une annonce immobilière ? - connaître parfaitement son produit (exposition, superficie…), avoir réponse à tout… Ne pas voir – ou faire semblant de ne pas voir – tous les défauts d’un bien, et la somme des travaux qu’il y aura à y faire pour la rendre habitable ; tenter de rendre attrayant un bien standardisé. A ce petit jeu-là, nos deux agents immobiliers jouent parfaitement la partition très bien écrite, comme à son habitude, de Bruno Podalydès (Les 2 Alfred, 2020). S’il y a beaucoup de drôlerie dans ce Wahou !, il y a aussi beaucoup de mélancolie dans ces personnages. On y trouve aussi une certaine référence à la bande dessinée, notamment Hergé avec des personnes à la Dupont et Dupond, qui à force d’effectuer les même geste en même temps confinent à la bêtise : ces deux frères casqués arrivés en scooter, qui ne pensent en réalité qu’à la belle opération immobilière qu’ils pourraient faire en rasant tout en en construisant autre chose. Ce jeune couple de primo-accédant qui arrive à vélo pliant et le range dans une singulière chorégraphie mimée. Il y a aussi cette infirmière en burn-out, qui recherche quelque chose pour sa mère, et on ne sait jamais si, dans cette scène, elle va s’effondrer en larmes ou embrasser Karine Viard qui lui fait visiter l’appartement.

Bruno Podalydès, dont on apprécia aussi l’univers vagabond de Comme un avion (2014), Liberté Oléron (2001), Adieu Berthe (2012), signe avec Wahou ! une fantaisie toute en douceur, pas du tout dans l’air du temps, une douce poésie à l’univers singulier. Le monde des agents immobiliers est d’ailleurs un très beau sujet de comédie, B. Podalydès sait parfaitement gérer les espaces, et on oublie l’aspect film à sketchs comme on pourrait le regretter. Comme le dit Oracio : « l’art de l’agent immobilier c’est d’enjoliver ». Le réalisateur de Wahou ! n’a pas besoin, lui, d’enjoliver son film : l’effet « wahou ! » fonctionne très bien.

F.S.

Wahou !, de Bruno Podalydès. Avec Karin Viard, Bruno Podalydès, Denis Podalydès, Sabine Azéma, Eddy Mitchell, Agnès Jaoui, Isabelle Candelier, Manu Payet, Roschdy Zem… 1h27. En salle depuis le 7 juin.

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