La paix au pays basque est-elle possible ? La question se pose à quelques semaines des prochaines élections municipales en Espagne prévues le 22 mai 2011. Malgré la trêve générale décrétée par l’ETA le 10 janvier dernier, les partis indépendantistes ne seront pas autorisés à participer à ce scrutin. C’est le cas de Batasuna interdit depuis 2003 en raison de ces liens supposés avec l’ETA. C’est désormais aussi le cas de Sortu, le nouveau parti indépendantiste de la gauche abertzale (patriote en basque) créé en février 2011.Réfugiée en France, la famille nationaliste -association de jeunes, comités de soutien aux prisonniers basques, syndicalistes, membres de Batasuna- continue cependant de croire à une résolution définitive du conflit basque. Reportage à Bayonne réalisé fin janvier et réactualisé

"Gora Euskal herria askatasuna !” Vive le pays basque libre ! : Dimanche 16 janvier, la salle des fêtes de la commune française de Laressore, prés de Bayonne, accueille l’Elkartasun Eguna, le rassemblement annuel de solidarité avec les prisonniers basques.
La manifestation interdite "au sud" en Espagne est organisée par Askatasuna, leur comité de soutien lui aussi considéré comme illégal par Madrid pour sa proximité avec l’ETA. Parents, amis, conjoints : venus des deux cotés de la frontière, la plupart des convives attablés dans la salle de Larressore sont des proches des 714 détenus incarcérés en Espagne et en France pour leurs liens avec l’organisation séparatiste basque. Sur fond de musique techno, leur décompte apparaît sur l’écran posé sur l’estrade.
Debout près du bar, seuls les plus jeunes laissent éclater leur admiration pour les prisonniers. Le reste de la salle se tait. Il n’y effectivement pas de quoi pavoiser.
Un demi-siècle de "guerre"
En près de cinquante ans de guerre civile avec Madrid, le mouvement indépendantiste, de l’ETA jusqu’à son aile politique et sociale rassemblée dans la gauche radicale abertzale (patriote), n’a jamais été aussi affaibli.
Laminés par les arrestations des polices françaises et espagnoles, les clandestins d’ETA se planquent sans bouger. Les militants de Batasuna sont réduits au silence ou à la fuite en France depuis l’interdiction de leur parti pour cause de liens avec l’ETA. Batasuna avait recueilli plus de 10% des votes aux régionales espagnoles de 2003. Il n’en reste plus grand-chose.
C’est dans cette traversée du désert que l’ETA a décrété le 10 janvier 2011 une trêve illimitée, vérifiable par des observateurs indépendants « de façon à mettre définitivement fin à la confrontation armée ». La dite trêve intervenait après cinq mois d’arrêt des attentats.
Le ministre de l’intérieur espagnol Alfredo Perez Rubacalba a cependant jugé le propos « peu novateur » sans preuves concrètes d’une reddition. Échaudée par la reprise des attentats ayant suivi la rupture des précédents cessez-le-feu, la classe politique espagnole s’est alignée sur cette position d’intransigeance. Idem à Paris où la gestion du dossier basque est laissée aux policiers et aux juges de l’anti- terrorisme.
Vers un processus démocratique
Retour sur l’estrade de la salle des fêtes de Laressore : le silence des quatre anciens activistes d’ETA tout juste libérés de prison auxquels hommage est rendu, témoigne de l’usure du mouvement indépendantiste.
Ses représentants en sont conscients. Depuis octobre, ils sondent le moral des troupes des deux côtés des Pyrénées, dans les municipalités qui leur sont traditionnellement acquises. « Un pari courageux, difficile à mener, qui a mobilisé au total prés de 7000 personnes dans des réunions parfois clandestines, raconte une journaliste du quotidien indépendantiste Gara. Au final, la majorité des participants a voté pour un processus démocratique, incluant entre autres l’option de l’indépendance, sans violence, sans menaces et sans ingérence de l’organisation armée ».
Un tournant, autrement dit. Lequel est consigné dans un texte de quatre pages accepté par l’ETA. A partir de là, le mouvement indépendantiste espère pouvoir se présenter à nouveau aux élections municipales de mai 2011 en Espagne. Sa survie politique en dépend.
« C’est ainsi qu’il faut lire la trêve prononcée », reprend la journaliste de Gara.

Reuters©
Sur l’estrade de la salle des fêtes de Larressore, c’est au tour d’Anaïs Funosas, porte-parole d’Askatasuna d’intervenir. Sur l’échiquier basque, le comité de soutien aux prisonniers est la courroie de transmission entre les prisonniers d’ETA et l’extérieur : « Nous avons fait des pas importants vers un processus démocratique que nous voulons solide et réel », annonce la jeune femme. Malgré l’arrogance de l’Etat Espagnol, les choses se sont accélérées. Nous savons que ce n’est qu’un début ». Salve d’applaudissement. Les plus âgées laissent la soirée aux groupes de rap et de hard rock basque des plus jeunes....
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