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Billet de blog 14 mai 2012

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Un habitat groupé s’élève aux abords du Canal

L’habitat groupé du canal de Ramonville St-Agne, à quelques encablures du Canal du Midi, sort enfin de terre.

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L’habitat groupé du canal de Ramonville St-Agne, à quelques encablures du Canal du Midi, sort enfin de terre. Huit foyers associés au sein d’une SCIA (société civile immobilière d’attribution) et voici le premier habitat participatif de la région depuis 25 ans. Un pari utopique qui dépasse la simple question du logement et trace une nouvelle voie du vivre ensemble.

par Christophe Abramovsky sur www.frituremag.info

Ce qui rassemble ces habitants étranges, c’est d’abord l’envie de ne pas vivre replié sur soi, caché de son voisin, c’est la volonté de construire du lien, dans un lieu pensé dans le respect de l’environnement et de l’humain. Partage et convivialité sont les maîtres mots de ce paradis en construction. Au cœur d’un quartier résidentiel de Ramonville, juste à côté du hameau de Mange-Pommes, un habitat groupé pionnier qui fête ses 26 bougies, ce sont quatre duplex et quatre simplex qui vont bientôt accueillir les treize adultes et sept enfants.

Un projet écologique

Le projet reste très largement influencé par une recherche permanente d’écologie. Le bâtiment orienté au sud est construit selon les normes BBC (bâtiment basse consommation), le bois abattu sur le terrain est réutilisé pour la fabrication de mobilier, les déchets verts sont évacués vers les jardins partagés de la maison de l’économie sociale à deux pas du site, le chauffe-eau solaire couvre les besoins des quatre simplex, l’isolation est en laine de bois, les murs extérieurs sont en bardage bois non traité, l’eau pluviale est bien sûr récupérée, le chauffage est assuré par un poêle à bois dans chaque logement… « On a essayé d’interroger les matériaux par rapport à la gestion environnementale. C’est donc un compromis ancré dans le réel », confesse Roland Bréfel, qui porte ce projet depuis de nombreuses années. Mathieu Hazard et sa femme Marieke sont les derniers arrivés. « L’aspect économique est important : la mitoyenneté permet d’économiser de l’énergie et aussi l’emprise au sol. Mais ce qui nous a convaincu, c’est d’abord l’idée du partage ».

Chaque futur habitant a mûrement réfléchi ce choix. Car en plus des logements privatifs, de nombreux espaces sont conçus pour être partagés. Le terrain est ouvert à tous : pas de grillage ou de hautes haies pour délimiter les parcelles. Une salle commune est prévue pour les réunions, les festivités et les associations du quartier, une buanderie et des ateliers seront aussi mutualisés. Et quand des amis viendront, ils pourront bénéficier d’une chambre, commune à tous les foyers. Mais attention, il ne s’agit pas là d’une communauté de baba cool. L’habitat participatif est une démarche où le collectif est déterminant, mais où la place de chacun et l’intimité comptent tout autant.

Mixité générationnelle et sociocratie

« Au départ, nous voulions un terrain plus grand, afin de construire une vingtaine de logements, en intégrant aussi des logements sociaux. L’idée étant de réfléchir au vivre ensemble, avec ses différences, permettant à tous de trouver à se loger selon des normes environnementales et qualitatives élevées », précise Roland. En effet, l’habitat participatif est aussi un projet social, où l’enjeu est de faire cohabiter des familles aux revenus disparates et des personnes à mobilité réduite.

Le projet joue aussi sur la mixité générationnelle. Yveline Pinvidic, future habitante de l’habitat groupé est enthousiaste à l’idée de vivre cette aventure : « Dans ce projet, nous réfléchissons à l’idée de vieillir ensemble, un peu comme les Babayagas, ce groupe de femmes qui ont décidé de s’entraider en partageant un même lieu de vie ». Quand on l’interroge sur la vie en communauté, Yveline est sans ambiguïté : « chacun est chez soi et possède son appartement, mais nous voulons surtout travailler les liens entre nous, mettre en commun autant nos savoirs, savoir-faire et expériences que des lieux collectifs ». D’ailleurs, l’habitat groupé du canal n’aurait pas vu le jour sans l’investissement de chacun, les heures de réunion et la mise en mouvement des compétences existantes au sein de ce collectif. « On a été assez complémentaire dans nos compétences, de l’administratif à l’informatique en passant par le juridique, la maîtrise d’œuvre ou le suivi du chantier, chacun a donné de son temps selon ses possibilités, et ce n’est pas fini !  » rappelle Yveline.

Mais, là comme ailleurs, les conflits peuvent naître. Ils sont souvent à l’origine des échecs dans ce genre d’aventurecollective. Aussi, pour se prémunir de tels risques, les associés ont fait appel à un intervenant extérieur spécialiste en communication non violente et accompagnateur en relations humaines, formé à la sociocratie. La répartition des logements entre les futurs habitants a ainsi pu se passer au mieux.

Le premier bâtiment n’est pas encore sorti de terre et déjà l’habitat participatif remplit sa fonction : redéfinir les relations entre les habitants, en privilégiant l’entraide sur l’individualisme, l’échange sur l’enfermement, le respect de l’environnement sur le "toujours plus" consumériste. Et pour faire partager cette expérience, en août, un chantier participatif devrait pouvoir accueillir toutes les bonnes volontés. Objectif : construire les espaces communs à ossature bois. Alors, rien de tel pour découvrir l’habitat groupé du canal que de mettre la main à la pâte, avec le sourire bien évidemment…

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