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Billet de blog 21 juin 2011

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Biodynamie: l'esprit retrouvé du vin?

Il y a eu Mondovino, réalisé en 2004 par Jonathan Nossiter, qui en pointant d’un humour corrosif l’industrialisation de la culture du vin a révolutionné le regard du consommateur sur les grands châteaux et leurs méthodes édictées par des tout-puissants oenologues. Il y aura désormais «L’esprit du vin, le réveil des terroirs», un documentaire polémique mais très didactique sur les vignerons en biodynamie qui met en avant les pratiques utilisées par ces partisans d’une viticulture respectueuse de l’environnement et du consommateur.

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Il y a eu Mondovino, réalisé en 2004 par Jonathan Nossiter, qui en pointant d’un humour corrosif l’industrialisation de la culture du vin a révolutionné le regard du consommateur sur les grands châteaux et leurs méthodes édictées par des tout-puissants oenologues. Il y aura désormais «L’esprit du vin, le réveil des terroirs», un documentaire polémique mais très didactique sur les vignerons en biodynamie qui met en avant les pratiques utilisées par ces partisans d’une viticulture respectueuse de l’environnement et du consommateur. Car toute l’intelligence de ses réalisateurs, Yvon et Olympe Minvielle, un couple de vignerons bordelais convertis à la biodynamie, a été de ne pas produire un documentaire à charge dénonçant l’usage massif de la chimie dans l’industrie vinicole. Plutôt qu’un réquisitoire contre l’utilisation des herbicides, pesticides, engrais, levures aromatiques artificielles et autres techniques de chais employés par l’immense majorité des viticulteurs dits "conventionnels", le parti pris retenu est une explication argumentée des pratiques naturelles usitées par ces partisans d’une viticulture respectueuse de la notion de terroir : un lieu, un goût.

"Par leur simple existence, la viticulture biologique et en biodynamie dénoncent les pratiques de l’agriculture conventionnelle et soulignent le désastre provoqué par les intrants sur les sols, sur les plantes, sur l’état sanitaire des grains de raisin donc sur le vin", souligne Yvon Minvielle, co-auteur avec sa compagne Olympe, réalisatrice du documentaire.

Leur point de départ a été une volonté farouche de dire par eux-mêmes ce qu’est la biodynamie avant que d’autres ne le fassent de manière détournée à leur place.
Et le résultat est édifiant car il en appelle au simple bon sens.

"Révéler les terroirs"

On y voit ainsi Marc Angéli, vigneron de la Ferme de la Sansonnière, dans la Loire, disant ne pas récolter plus de 30 hectolitres par hectare, alors que la notion de rendement à l’hectare est primordiale pour les commerçants du vin, en premier lieu le champagne qui tourne à 120 hectolitres par hectare. Le but unique de ce vigneron en biodynamie, membre du groupement "Renaissance des appellations" parmi lesquels ce documentaire nous amène à la rencontre, est de « révéler le terroir » sur lequel est produit son vin.

Avec lui, comme avec ceux qu’il nomme ses « frères d’armes résistants », le bon sens l’emporte. Un terroir c’est en effet une terre, un sol, ainsi qu’un lieu battu par le vent, le soleil ou la pluie. On y apprend que la touche finale pour révéler ce terroir c’est la levure naturelle présente sur les grains de raisins qui produit la magie de la fermentation du jus de fruit en vin.

Ainsi en filigrane tout au long du documentaire il est question de levure naturelle préservée par les tenants de la biodynamie et de levure chimique ajoutée par les viticulteurs conventionnels.

Car ce que révèle "L’esprit du vin, le réveil des terroirs", c’est encore plus distinctement ce qu’avait déjà dénoncé Mondovino, en ridiculisant Michel Rolland grand gourou payé à grand frais pour ses interventions durant la vinification, au sujet des modifications apportées dans les chais pour que le vin se conforme aux effets de mode et plaise aux critiques qui par leurs notations fixent les prix des bouteilles.

Nicolas Joly, viticulteur de la Coulée de Serrant et président du groupement "Renaissance des appellations" qui fédère quelque 176 viticulteurs en biodynamie de 13 pays différents, fustige ainsi le rôle « des levures aromatiques issues de manipulations génétiques » ajoutées massivement par les « conventionnels » dans leur vin afin de lui donner un goût qui plaira au plus grand nombre.

La levure assassine les vins

« C’est une supercherie pour le consommateur qui a le droit de savoir si le goût de cassis, de poivre vert ou de fruit rouge dans son vin est le produit du lieu ou de la technologie mise en place par un oenologue », s’emporte-t-il. « La levure est le lien du vin au lieu, re-levurer est un assassinat du vin », dit-il d’un ton solennel en tendant la liste des « 350 goûts arbitraires issus de manipulations génétiques » qui sont proposées par les oenologues aux viticulteurs.

« Il y a des vins qui sont arbitrairement fabriqués au cellier dont les goûts ne permettent pas de savoir s’ils viennent des Etats-Unis, d’Australie ou de l’Union européenne. Et il y a des vins qui sont la musique du lieu enregistrée par le lieu et transmise par la levure du lieu. C’est un retour profond au sens profond des AOC », estime M.Joly rencontré dans son domaine près d’Angers.

« En biodynamie on s’engage dans une démarche de vérité en rendant le vrai goût du lieu, en n’utilisant aucun pesticide ni chimie de synthèse pour finalement vendre un produit sain. Le commerce passe après » jure-t-il.

Allant au-delà de la viticulture dite biologique, qui s’attache à remplacer les intrants chimiques par des intrants bio, la biodynamie s’apparente à de l’homéopathie préventive pour aider la plante à être vigoureuse et donc mieux se défendre contre les maladies. Résultat : « les sols en biodynamie, en profondeur, ont plus d’activité microbienne que les sols en biologie », assure Anne-Claude Leflaive, viticultrice du château du même nom en Bourgogne.

La biodynamie sans poisons

« La base de la biodynamie c’est de redynamiser la vie des sols pour que cela devienne un lieu attractif pour des tas d’insectes », indique Philippe Gourdon, vigneron du château La tour grise dans la Loire qui explique son passage à la biodynamie quand il a découvert que les bois taillés de la vigne ne se désintégraient plus du fait des produits chimiques aspergés. « Un sol nu dans la nature ça n’existe pas, il y a un dysfonctionnement quand on voit un sol glacé » ajoute-t-il en référence aux vignes presque cliniques où sont pulvérisées des herbicides.

« Si on met du désherbant, la vigne ne peut plus se nourrir en minéraux présents dans le sol. Il faut alors mettre de l’engrais pour aider la plante à pousser. Elle est alors attaquée par des insectes et des champignons et il faut pulvériser des pesticides. C’est un cercle vicieux qui entraîne la perte de goût et de typicité », explique Marc Angéli. « Or les fabriquant d’engrais, de pesticides et de désherbants sont les mêmes », s’insurge-t-il, soulignant par ailleurs que « la biodynamie est, elle, gratuite ». Moralité pour ce vigneron pour qui « il est essentiel de ne pas mettre de poison » dans les aliments : « vu que personne ne peut gagner de l’argent dessus, les multinationales et oenologues dénigrent la biodynamie ».

Point donc de pesticide ni de souffre ou de bouillie bordelaise en biodynamie, mais des pulvérisations de décoctions de plantes activatrices de la vie dans les sols, appelées « préparats ». De la biodiversité est également insufflé entre les ceps pour faire proliférer insectes et herbes qui nourrissent les sols. Et certains vont même jusqu’à inviter certains oiseaux prédateurs d’insectes à nicher en bordure de leur vignoble.

« En emmenant des forces précises qui sont des synergies entre des éléments animal, végétal et minéral, on aboutit à des catalysations dont la plante bénéficie », explique Nicolas Joly qui rappelle avoir été « pris pour un clown » lorsqu’il a débuté en biodynamie il y a vingt ans. « On veut aider la vigne à faire son travail et non pas se substituer au travail de la vigne. Voilà l’erreur de l’oenologie contemporaine », ajoute-t-il.

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La suite de l'article de laurent Abadie : http://www.frituremag.info/actualites/l-esprit-du-vin-retrouve-dans-la.html?var_mode=calcul

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