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Billet de blog 21 septembre 2011

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AZF, dix ans...dégâts

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

C’est un grand "Boum" qui reste dans toutes les têtes et les oreilles des Toulousains. Il y a dix ans de cela, heure pour heure, minute pour minute, l’usine AZF explosait et creusait un cratère rempli de larmes et de sang aux portes du centre-ville, à deux pas des habitations fragiles, des entreprises, des usines, de la rocade surplombant le site chimique, voisin apparemment calme qui allait se déchaîner un doux matin d ’automne. Tout, ou presque a été dit sur cette catastrophe exceptionnelle, mais dix ans après, il faut se souvenir, et surtout en tirer des leçons, encore.

Revue de presse spéciale par Philippe Gagnebet sur www.frituremag.info

  • Mémoire

Se souvenir, c’est d’abord revoir les images effrayantes quelques minutes après l’explosion. Scènes d’apocalypse, immeubles et bâtiments dévastés, blessés juchant le sol... C’est ce que propose le documentaire de France 3 Sud, avec en prime les témoignages d’une dizaine de personnes, connues ou pas, qui se souviennent et racontent.
Même exercice de catharsis pour LibéToulouse, qui a recueilli le témoignage d’une dizaine d’acteurs culturels toulousains. De Pascal Dessaint (écrivain) à Eric Lareine (chanteur) décrivant, souvent avec émotion, ce qu’ils faisaient et comment ils ont réagi ce jour-là.
Et pour ne pas oublier les milliers de sinistrés, on notera par exemple que beaucoup d’entre eux n’ont pas encore touchés les aides promises comme le souligne Le Parisien. Effrayant.

  • Commémoration

Après tout ce temps, on aurait tendance à penser que l’émotion se vit à l’unisson. Il n’en est rien. Il a fallu des tonnes de concertation pour essayer de construire une cérémonie unitaire, ou tout au moins commune. Métro France et LibéToulouse, racontent en détail les efforts de la Mairie pour aligner devant la stèle tous les représentants de la société civile, des ex-salariés, des politiques, des associations diverses. Le fossé de la discorde n’a pas été comblé, et l’on apprend que NKM, au début prévue ne viendra pas, que Eva Joly sera présente, et que des associations comme Plus jamais ça ! feront relativement bande à part....

  • Procès

Que s’est -il passé depuis sur le plan, judiciaire ? Un procès, et à ce jour, aucun coupable... A moins que le nouveau procès en appel qui débute dans quelques semaines ne désigne enfin ce vrai coupable, c’est à dire l’entreprise Total qui jusqu’à présent se cache derrière le rôle de ses filiales, la longueur des procédures, et l’argent distribué depuis. En masse. Cela ne suffira certainement pas, car dans l’opinion, comme on dit, il faudra bien le désigner ce véritable "coupable". A moins que comme le titrait à l’époque l’hebdomadaire "Tout Toulouse", nous ne soyons justement "Tous coupables" ou responsables, ou bien complices de l’usage à excès de la chimie et donc de ses risques...
Pour revivre le procès fleuve, rien ne vaut le blog très complet réalisé par les journalistes de La Dépêche tout au long de celui-ci. Et consulter également le quotidien régional pour faire un point sur le calendrier et la teneur du futur procès.

  • Et maintenant ?

A t-on véritablement tiré les leçons de la catastrophe ? Que s’est-il passé depuis sur les périmètres de protections, les zones Seveso, l’utilisation d’une nouvelle chimie, les usines à risque hors des villes, la réglementation européenne ? En réalité, pas grand chose. Un reportage et une analyse dans La Croix confirment que "... votée dans la foulée de l’explosion de l’usine AZF, le 21 septembre 2001, la loi Bachelot de 2003 visant à protéger les riverains des sites Seveso à hauts risques" est en panne. Le journal en ligne Romandie.com parle même d’une "triple peine" pour les riverains toujours exposés autour de plus de 1000 sites dangereux répertoriés en France.
Et l’on se dit que la fatalité l’a encore emporté.

D’autant que depuis, sous la pression des entreprises, de la course à l’emploi et l’intervention de certains politiques, la chimie a repris ses droits. Même si l’on parle désormais de chimie "verte" ou "innovante". C’est ce que détaille La Dépêche du Midi dans un reportage qui fait la part belle aux élus qui portent ces nouvelles solutions et pratiques.

Sur le site lui-même, "les travaux de remise en état du site (sécurisation, déconstruction, dépollution) ont duré 5 ans. Le site accueillera bientôt un pôle d’activités pour la recherche médicale contre le cancer... Les opérations de dépollution achevées, les travaux d’aménagement ont pu commencer en 2007. Entre 2002 et 2007, Grande Paroisse a alloué un budget de 100 millions d’euros pour la remise en état du site.
Le futur site du Cancéropôle, dont une partie est bâtie sur l’ancien site AZF, sera divisé en deux grandes zones
" apprend-on par la voix même d’AZF et Grande Paroisse.
La recherche contre le cancer a donc remplacé à Toulouse le fameux nitrate d’ammonium, qui rôde un peu plus loin.

Non loin de là, on apprend dans Le Monde (édition papier) que "Dix ans après l’explosion de l’usine AZF (...) le nitrate d’ammonium, à l’origine de la catastrophe qui avait fait 30 morts, fait toujours peur. Le projet du groupe norvégien Yara, premier producteur mondial de cet engrais qui entre également dans la composition d’explosifs, d’utiliser le port de Bayonne pour ses exportations suscite ainsi de nombreuses oppositions locales.

Pour rassurer la population, et à la demande de Yara, qui possède une unité de production à Pardies, la préfecture des Pyrénées-Atlantiques a prévu d’organiser, le 28 septembre, un test de circulation " à blanc " : un train censé transporter du nitrate d’ammonium reliera la gare d’Artix au port de Bayonne.
Ce trajet de 70 kilomètres permettrait à Yara d’économiser 300 000 euros par an. L’exportation des engrais se fait aujourd’hui depuis Port-la-Nouvelle (Aude), à proximité de Narbonne, au terme d’un itinéraire compliqué : à cause d’une portion trop pentue de la ligne qui longe les Pyrénées, les trains font un détour de plus de deux cents kilomètres par Bordeaux et Toulouse.
"

De quoi s’inquiéter encore et toujours... Et regarder la nouvelle campagne de France Nature Environnement qui a convoqué pour ce 21 septembre à Paris un artiste qui, on l’espère, n’a que trop d’imagination.

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