Ainsi Midi-Pyrénées et contours ont décroché la palme de l’accent le plus charmant pour 70% des sondés par le site de rencontre Parship, voire du plus sexy pour 30%. Ça vous fait une belle patte ?
Par Ludo Simbille sur www.frituremag.info
Alors Don Juan de la Gascogne, va pas falloir ramollir du langage pour séduire de la caille ou du caneton. Parce que vous, canard du sud-ouest, venez d’être élu chanteur de charme numéro 1.
Faites-la roue jeune Paon vaniteux ! Exhibez pelage et tenez bec haut…
Oui, la presse n’ayant d’autre poulette à déplumer que de chatouiller les dessous d’ailes de la poulaillerie, se fait l’échotière des concours de caquètements régionaux. (Et nous avec, honte à nous).
Ainsi Midi-Pyrénées et contours ont décroché la palme de l’accent le plus charmant pour 70% des sondés par le site de rencontre Parship, voire du plus sexy pour 30%.
Ça vous fait une belle patte ?
On donne plus de crédit qu’il n’en mérite à un sondage de basse-cours ? C’est vrai. Et de la salive bénite au moulin à paroles ? Je sais. Mais derrière l’anecdote, cela en dit long sur ce que véhicule à l’envie médias avec photo de la ville rose en soutien illustratif. De l’impossibilité de « défolkloriser » le reste de son monde... France Inter, « délocalisée » (sic) à Toulouse, redore dans ses pubs les vitrines culturelles : cassoulet, rugby, savoir-vivre. So sexy.
Vous ne vous étiez pas aperçu que jacter toulousain vous conduisait au plumard ? Faut dire que c’est pas vraiment fait pour attraper du petit canard local. La séduction langagière ne peut marcher que si les tourtereaux roucoulent le même jabotage. Pour qu’il y ait bouillie de phéromone faut que l’un des plumés ne capte rien à ce qui sort du bec de l’autre.
Alors, moi qui me suis importé du côté où l’on parle bien la France (souvenez-vous) je peux vous dire que… ça ne marche pas trop non plus. Je passais plutôt pour un demeuré en demandant une “chocolatine“ à la boulangère. Bon, mais maintenant que je connais les pouvoirs attractifs, je vais lui en donner à la bourgeoise du “putain“ et du “con“. Je vais lui en servir moi de l’idiot à Paris à curiosité attachante, du langage sauvage, de l’exotisme phonétique. Elle va frétiller du plumet devant le « soleil chantant » de ses soirées à thèmes... Frisson de l’inconnu. D’ailleurs, c’est l’accent garonnesque plébiscité dans « l’étude » qui est l’un des moins célèbres. Loin derrière le blabla phocéen, connu à 95%.
Parship invite donc à arborer fièrement son accent « chantant » pour émoustiller la Galinette et le gallinacé. En plus, la plateforme en ligne d’accoquinades s’y connaît voyez-vous. Elle interprète les raisons de ce score : « Dans l’imaginaire collectif, les sonorités des accents du Sud évoquent la qualité de vie de cette région, l’ensoleillement ». Bon bien sûr le collectif ici, il est surtout parisien. Fin parisianiste plutôt. Il va de soi que Paris n’est pas de la partie. Ça c’est du hors-série, du hors-concours pour fête votive. Et Parship de se réapproprier la capitale pour nous regaver le gosier d’un français « sans accent ». Celui des présentateurs télé.
Les bretons ont eux l’immense privilège de se voir décerner par 26 % des interrogés l’accent le plus intelligent. C’est l’air marin ça. Dans l’imaginaire collectif, l’air marin évoque ciré jaune…à l’inverse, les ch’tis et les marseillais auraient le baragouin le plus drôle. T’auras beau pérorer sur le matérialisme historique teinté de dialectique hégélienne camarade nordique ou phocéen, tu passeras toujours pour le bon bougre. Dany Boon l’avait compris, on ne fait pas une comédie potache avec l’accent pointu.
Dommage. Dans l’imaginaire collectif, les sonorités franciliennes et le pointu de la capitale évoqueraient la grisaille de vie et l’étroitesse d’esprit… nan ?
Peu importe les résultats de ce combat de coqs du terroir… ce qui compte pour les bonnes volaillères, c’est jeter du haut de leurs loges de volière les bons points comme des graines à un poulailler. Comme si Toulouse, Marseille, Montpellier, Lens, Calais, Brest, Strasbourg versaient dans l’anti-parisiannisme primaire. Réduisant Paris à une usine lumière à touristes, pleine de gens stressés cultureux hautains et hostiles… Bon oui, mais c’est pour mieux raviver à peu de frais la guéguerre chauvinique - une « guerre sans merci » selon Le Point- entre Toulouse et Marseille dans l’imaginaire collectif.
Regardez les vieux coqs, de votre torrent de boue,
Rien de vous ne pourra monter aussi haut qu’eux
Et le peu qui viendra de nous à eux, c’est le « torrent de cailloux »,
Lutèce est troublée d’entendre parler les gueux… Con.