
De l’Hérault à la Gironde, en passant par la Haute-Garonne, mais le cas d’école se répète partout en France, la publication par le ministère de l’Education nationale de son étude printanière, sobrement intitulée « Indicateurs de résultats des lycées », donne lieu chaque année à une vaste pantalonnade. Dont acte ces derniers jours.
par Lise Valette sur www.frituremag.info
Hâtivement rebaptisée « Palmarès des lycées » par les médias généralistes, cette avalanche de statistiques semble délivrer systématiquement le même message à la foule angoissée des parents en quête du meilleur avenir, scolaire tout au moins, pour leurs enfants : si vous voulez miser gagnant, choisissez le privé !
De fait, si l’on s’en tient au seul indicateur du taux de réussite au baccalauréat, et bon nombre de médias se contentent encore de ce palmarès simpliste, le constat est sans appel. Que vous habitiez Toulouse, Bordeaux ou Montpellier, mais encore une fois le constat vaut aussi pour Narbonne ou Montauban, c’est du côté des lycées privés que l’on trouve le plus fréquemment les taux frisant les 100 % de succès. Peu importe que le calcul porte sur une poignée d’élèves (le lycée en tête de ce palmarès 2013 pour la Haute-Garonne est ainsi l’institut Ohr Torah qui a présenté 20 élèves au bac en 2012) ou sur plusieurs centaines.
Les parents ne s’y retrouvent plus
Pour nuancer ces résultats, quelques news magazines ou journaux plus spécialisés se livrent à un savant – et très personnel – mixage entre les trois indicateurs communiqués par le ministère de l’Education. Outre ce résultat « sec » du taux d’admis au bac, sont en effet publiés des indicateurs de « taux d’accès au baccalauréat » (quelle est la probabilité pour un élève de seconde ou de première d’obtenir, dans les années suivantes, son bac dans ce lycée) et la « proportion de bacheliers parmi les sortants » (le taux d’élèves qui quittent le lycée avec le bac en poche). Tous ces indicateurs visant à détecter les lycées qui se débarrassent, avant l’heure du bac, des élèves jugés trop faibles, qui plomberaient les résultats de l’établissement. Là, pour le coup, les calculs effectués par les uns et les autres donnent lieu à des palmarès radicalement différents, qui finissent de donner le tournis aux parents d’élèves.
Enfin, si l’on veut être sûr de restituer pleinement les enseignements que tâche de transmettre le ministère via ses indicateurs, reste à se rabattre sur l’indice de « valeur ajoutée » qui est livrée avec l’étude. En clair, si un lycée « recrute » naturellement les meilleurs élèves, issus des classes sociales les plus favorisés, il ne faut pas être surpris qu’il obtienne d’excellents résultats au bac. Et dans ce cas, sa valeur ajoutée est nulle. C’est particulièrement vrai dans les grands lycées parisiens, comme Henri IV et Louis-le-Grand, mais cela vérifie aussi au lycée Montaigne, à Bordeaux, et à Fermat, à Toulouse.
Mais là aussi, encore une fois, trop peu de médias se donnent la peine de rentrer dans une telle arithmétique. Et le ministère, qui donne une publicité abondante à ses statistiques, a beau jeu d’avertir que « la complexité et la diversité des situations réelles (…) conduit à souligner une fois encore le danger qu’il y aurait à utiliser ces indicateurs (…) pour établir des palmarès ou faire des comparaisons sans en fournir les termes ». Aboyez toujours, la caravane médiatique passe.