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Billet de blog 22 juin 2013

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Note sur l'annulation de la manifestation brésilienne à Paris

Les récents événements au Brésil présentaient un contenu assez clair lors de leur début il y a 3 semaines, guidés par les revendications faites par le Mouvement  « Passe libre » (Ticket Gratuit) exigeant la révocation de l'augmentation du prix des tarifs du transport public. Des foules énormes sont descendues dans les rues à l'appui de cette demande, avec une force sans précédent au cours des vingt dernières années.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Les récents événements au Brésil présentaient un contenu assez clair lors de leur début il y a 3 semaines, guidés par les revendications faites par le Mouvement  « Passe libre » (Ticket Gratuit) exigeant la révocation de l'augmentation du prix des tarifs du transport public. Des foules énormes sont descendues dans les rues à l'appui de cette demande, avec une force sans précédent au cours des vingt dernières années. Dans ce contexte, on a pu observer une criminalisation du mouvement par une grande partie de la presse, qui a légitimé l'action violente et disproportionnée de la police. C'est à ce moment-là que nous, les organisateur-ices, en tant qu'étudiant-es brésilien-nes résidant à Paris, avons décidé d'organiser une manifestation politique, prévue pour le samedi 22 juin, afin d'exprimer notre solidarité envers ce mouvement, ses revendications et contre la violence policière employée.


Au cours de cette dernière semaine, la nature des événements a cependant changé. Prenant élan dans la force populaire alors mobilisée, les magnats de la presse et la droite brésilienne ont décidé de soutenir les manifestations, dans le but de diluer leur contenu et de parvenir ainsi à imposer leur agenda conservateur à un mouvement qui au départ ne se situait absolument pas à droite sur l'échiquier politique. A partir de ce moment nous avons assisté à la montée des discours réactionnaires et à la prolifération d'attitudes fascistes dans les rues des villes brésiliennes. Dans le même sens, un anti-partidarisme de caractère diffus et enragé a incité à la violence, menant certains groupes autoritaires à se sentir dans le droit d'agresser des membres d'organisations de gauche, organisations qui ont toujours participé activement à la construction des grandes mobilisations historiques au Brésil et qui surtout ont été à l'origine du Mouvement Passe Livre et des premières protestations.

Nous avons conscience qu'une grande partie des personnes dans les rues ne défendent pas ce type de comportement mais, malheureusement, leur protestation a été largement récupérée par la droite et associée par les médias à ces violences, à l'insu des manifestants eux-mêmes. Une telle situation met en péril le droit à la libre expression et à la libre organisation politique, des droits conquis au cours de luttes historiques commandées par la même gauche qui s'est vu agressée dans les rues le jeudi 22 juin.


Certains médias profitent de ces événements et les décrivent comme une bataille pour la déstabilisation du gouvernement. Telle est sans aucun doute la position de la droite - à laquelle les médias sont fréquemment associés. Nous avons également, mais pour des raisons complètement différentes, des critiques à faire aux différentes sphères politiques brésiliennes (au niveau fédéral, des états et des municipalités) : il va sans dire que la façon dont ils ont conduit la négociation avec le groupe « Passe Livre » ne nous satisfait pas. Nous nous indignons de voir la manière technocrate utilisée par le gouvernement pour traiter les revendications populaires et déplorons que le gouvernement fédéral ait abandonné le dialogue avec le mouvement de base d’où son parti est né. Néanmoins il est clair que ces manifestations ne sont pas une marche pour la destitution du gouvernement démocratiquement élu, quand bien même nous ne lui épargnons pas nos critiques.

Il nous faut commémorer, sans aucun doute, la conquête obtenue par les « Passe Livre » dans les rues, ainsi que le fait que les manifestations aient pu faire valoir leur volonté devant les sphères représentatives du pouvoir. Les manifestations ont réussi à placer dans le débat public ce que signifie un État efficacement démocratique, ainsi qu'à sensibiliser une partie de la population quant aux conquêtes de la participation politique directe.

Ce qui arrive aujourd'hui dans notre pays est très important, mais le sens de ces événements, toutefois, reste indéterminé. L'organisation de cet acte n’est pas en accord avec la façon dont les grands groupes de presse et la droite ont essayé de s’approprier la protestation populaire et d’imposer leurs discours aux mobilisations en cours dans le pays. Nous sommes toujours mobilisés pour la transformation sociale au Brésil et soutenons les orientations historiques des mouvements sociaux.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.