La finale d'une coupe du monde controversée a vu s'opposer la France et l'Argentine. A cette dernière est associée depuis plusieurs années le nom de Messi et, les commentateurs sportifs, les supporters de l'équipe et autres ont souvent espéré qu'une sorte de “messi-anisme” puisse donner à l'Argentine une nouvelle étoile.
Le messianisme est l'intervention d'une personne dans la résolution de problèmes et la promesse d'un avenir meilleur. Dans ce cas, cette intervention serait associée à Messi et à ses performances sur le terrain de football. Au-delà d'avoir obtenu, avec son équipe, une nouvelle étoile, Messi représente donc un homme sur lequel fut déposée la confiance du public. Et quel public ! Le Qatar était paré des couleurs argentines et les supporters argentins étaient au rendez-vous, malgré la distance et la controverse autour de cette Coupe du monde au Qatar. Avant la finale, la FIFA a publié des photos des deux finalistes, la France et l'Argentine, sur son compte Twitter. Comme le montrent ces images, l'Argentine, un pays où le football est un mode de vie qui a inspiré les compositeurs de tango, le cinéma et la littérature, était là :
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Le messianisme attendu par le public apparaît clairement : un homme, Messi, est mis en avant devant son public. Ces images sont d'ailleurs bien différentes de celles que la FIFA publia de l'autre finaliste, la France, et dans lesquelles une sorte d'héroïsme collectif est mis en avant :
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La confiance accordée à Messi peut être comparée à celle que les Grecs accordaient à Achille, le meilleur guerrier de l'armée grecque, pendant la guerre de Troie. Pendant cette guerre légendaire, les dieux sont intervenus dans les combats pour retarder certains événements. Ils ont fait cela non pas pour changer le destin des héros de la guerre mais pour les glorifier. Ainsi, la guerre de Troie a été l'arène choisie pour la glorification de ces héros. Nous savons que cette guerre a duré longtemps à cause de la colère d'Achille qui a refusé de se battre pendant de nombreuses années. Dans le récit homérique, la présence indispensable d'Achille sur le champ de bataille est ainsi rendue plus claire et la gloire des héros grecs et troyens semble s'expliquer par l'absence d'Achille. Achille est donc un héros emblématique au combat qui par sa colère représente toutefois la radicalité et l'excès absolu.
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La confiance aveugle qu'on accordait à Achille lui octroya ainsi un statut particulier tout comme la confiance aujourd'hui accordée à Messi fait de lui un héros des temps modernes. De même que le héros homérique, le héros du terrain de football semble à la fois indispensable et victime de la démesure. L'héroïsme achiléen dans le football peut toutefois paraître aujourd'hui plus éphémère, moins durable qu'il ne le fut dans l'Antiquité puisque nous témoignons régulièrement de la chute de ces héros qui, une fois le devoir accompli, sombrent dans l'oubli. Ils deviennent souvent des produits que nous consommons et que nous remplaçons facilement. Mais, tout comme dans l'Antiquité, l'existence de ces héros, avec leurs qualités et leurs défauts, leur renouvellement, représente notre quête de valeurs auxquelles nous sommes attachés. Leurs actions nous passionnent et nous permettent de sentir, critiquer et des fois de rêver avec une force incroyable.
La mise en avant de l'héroïsme qui se développe dans le football nous permet donc de ressentir et d'exprimer des émotions. C'est aussi le signe d'un monde à la dérive, à la recherche du fair play et de modèles exemplaires. L'importance que nous accordons à l'héroïsme lors d'un match de football témoigne de la recherche du messianisme dans le sport et peut être du besoin de voir le caractère pacificateur des compétitions être diffusé à d'autres domaines.