gael roblin (avatar)

gael roblin

Conseiller Municipal de la Ville de Guingamp Kuzulier Kêr Gwengamp

Abonné·e de Mediapart

6 Billets

0 Édition

Billet de blog 23 mars 2025

gael roblin (avatar)

gael roblin

Conseiller Municipal de la Ville de Guingamp Kuzulier Kêr Gwengamp

Abonné·e de Mediapart

Accès à la santé : les habitants et les élus du pays de Guingamp ne désarment pas

Manif, prise d'arrêtés municipaux, cahiers de doléances, tribunal administratif... Le point sur la mobilisation pour l'accès aux soins et l'hôpital public à Guingamp.

gael roblin (avatar)

gael roblin

Conseiller Municipal de la Ville de Guingamp Kuzulier Kêr Gwengamp

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1
manif du 1er févier à Guingamp-Gwengamp © gael roblin

C’est entre juin 2024 et septembre 2024 dans les Côtes d’Armor que 57 maires prenaient un arrêté municipal pour obliger l’Etat à agir afin de garantir l’accès aux soins pour toutes et tous et faire cesser cette atteinte à la dignité humaine. Cette action était la suite donnée à une de mes propositions lors d’un conseil municipal de Guingamp. En réponse, en septembre 2024 le tribunal administratif de Rennes saisi en référé par le Préfet du département statuait en concluant à la suspension des arrêtés en question.

Tout cela s’est déroulé dans le cadre d’une offensive médiatique de type propagandiste du corps préfectoral me brocardant nommément et niant les difficultés d’accès aux soins pourtant documentées dans divers rapports très officiels comme le diagnostic de santé du territoire de Guingamp-Paimpol Agglomération.

Malgré le refus de la Préfecture de reconnaitre leur réalité quotidienne, les habitants de l’ouest du département confrontés à de nombreuses régulations des urgences ou aux fermetures de services hospitaliers comme à Lannion, Carhaix et Guingamp , aux suspensions de la maternité à l’hôpital public de Guingamp , aux grandes difficultés d’accès à la chaîne du soin, y compris à la médecine de ville, et plus encore aux spécialistes, ont continué de témoigner. Ces témoignages ont mis en exergue les mensonges préfet qui niait ces difficultés avec un discours rempli de certitudes déconcertantes.

Cahiers de doléances et renoncement aux soins

Grâce à des maires de communes de taille modeste, à des militants politiques et syndicaux regroupés dans l’Initiative Urgence Armor Santé Yec’hed Mat, entre novembre 2024  et janvier 2025 plus de 2000 habitants du secteur concerné, ont rempli de leurs témoignages des cahiers de doléances.

Issues des habitants de 198 communes, rattachées à 4 hôpitaux publics, ces doléances détaillent avec des mots simples de la dure réalité de la profonde fracture sociale sur le terrain de la santé. Plus de 17 % des répondant déclarent ne pas avoir de médecins traitant, 62 % déclarent avoir rencontrés des difficultés à l’hôpital public. Toutes et tous décrivent des distances inattendues pour consulter. Et surtout 75 % déclarent avoir déjà renoncé à des soins.

Le 1er février 2025, 2500 personnes en clôture de la collecte de ces cahiers de doléances défilaient dans Guingamp au son du biniou et de la bombarde dans un beau cortège emmené par les tracteurs de la Confédération Paysanne. Un nombre non négligeable d’entre eux venait des territoires limitrophes de Lannion et Carhaix.

la synthese des cahiers de doléances © Gael Roblin

Mi-temps en préfecture

Au lendemain de cette campagne, le préfet nouvellement nommé, a fini par recevoir une trentaine de maires, qui ont évoqués la réalité décrite dans les cahiers de doléances. Au-delà du changement de ton, on peut noter que le nouveau représentant de l’Etat, contrairement à son prédécesseur, ne peut plus nier les difficultés d’accès aux soins particulièrement aigus sur l’ouest du département. S’il change de ton et doit reconnaitre la dure réalité devant des élus qu’il reçoit, c’est uniquement grâce au processus revendicatif qu’Initiative Urgence Armor Santé a initié, à la collecte de près de 2000 témoignages documentant l’état lamentable de l’accès aux soins et bien sûr la journée de manifestation qui a vu plus de 2500 personnes dans les rues de Guingamp et Lannion samedi 1er février 2025 porter ces problématiques.

Mais à quoi sert cette nouvelle posture préfectorale si par ailleurs l’ARS continue de verser de l’argent public à la Clinique privée de Plérin pour subventionner son activité de maternité après avoir suspendu la possibilité d’accoucher à l’hôpital public à Guingamp ?

A quoi bon une nouvelle communication préfectorale s’il n’y a pas de réouverture des urgences H24 à Lannion et la réouverture du service de Gastro-Entérologie de ce même hôpital, la réouverture des urgences de Carhaix qui sera aussi bénéfique aux costarmoricains ?

Enfin à quoi bon discuter avec la Préfecture de St Brieuc s’il n’y a pas un dialogue sur la base des propositions contenues dans les arrêtés municipaux qui portaient sur les moyens humains, le recours aux médecins hospitaliers étrangers payés dignement, le partenariat avec la République de Cuba, et les moyens techniques pour le SMUR et le SDIS ?

Ne pas répondre positivement à ces propositions pragmatiques c’est mettre la tête sous l’eau à une population particulièrement paupérisée et dépourvue d’accès à des soins basiques et dont la dignité est chaque jour éprouvée. En recevant la délégation, le préfet et l’ARS « ont ouvert la porte » mais n’ont pas répondu à l’urgence des questions posées ni même proposé de calendrier de rencontres. Cette posture d’attente qu’ils imposent à la population est indigne.

Mais faut-il s’en étonner ? Le préfet du département est un représentant de l’Etat, lui-même géré par un gouvernement qui mène ouvertement une politique d’austérité brutale qui impacte négativement les politiques de santé et la sécurité sociale.

Match retour au tribunal

Après cette rencontre certains maires ont retiré leurs arrêtés... Et d’autres non ; le 13 mars dernier, les derniers rebelles de l’ouest costarmoricain comparaissaient sur le fond.

La Ville de Guingamp faisait partie de la sélection pour ce match retour et avait fait le déplacement en m’envoyant représenter la commune...C’est ainsi que j’ai pu redévelopper à l’oral les arguments du Maire Philippe Le Goff et les miens consignés dans le mémoire en défense que nous avions conjointement rédigé.

Dans un premier temps il s’agissait pour le premier magistrat signataire de l’arrêté, de rappeler la compétence du maire en matière de police administrative :

Aux termes de l'article L. 2212-2 du CGCT, le maire est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l'État, d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. La notion de salubrité publique inclut la santé publique, comme l'a confirmé la jurisprudence administrative à plusieurs reprises. 

Dans le cas présent, l'insuffisance de l'offre de soins sur le territoire de Guingamp et des communes environnantes constitue une menace directe pour la santé et la sécurité des habitants. Les fermetures de services hospitaliers, le manque de médecins généralistes et spécialistes, ainsi que les délais d'attente excessifs pour les soins urgents, créent une situation de péril grave et imminent pour la population.

La carence de l'État et le principe de subsidiarité 

L'État, en ne garantissant pas un accès équitable aux soins sur le territoire, a failli à ses obligations. La fermeture de la maternité de Guingamp, la saturation des services d'urgence, et le manque de médecins généralistes et spécialistes sont des carences manifestes qui justifient une intervention locale. 

Le principe de subsidiarité, selon lequel les décisions doivent être prises au plus près des citoyens, s'applique pleinement ici. Face à l'inaction de l'État, il était de son devoir de prendre des mesures pour protéger les administrés. 

L'urgence sanitaire 

La situation actuelle est urgente. Les habitants de Guingamp et des communes environnantes ne peuvent plus attendre que l'État prenne des mesures pour remédier à cette crise sanitaire. L'arrêté municipal a donc été pris dans un contexte d'urgence, pour protéger la santé et la sécurité des administrés. 

Réponse aux arguments du préfet

 Sur l'incompétence du maire 

Le préfet soutient que le maire n'est pas compétent pour enjoindre l'État à prendre des mesures en matière de santé publique. Cependant, l'article L. 2212-2 du CGCT confère au maire des pouvoirs étendus en matière de police administrative, y compris pour assurer la salubrité publique. 

En l'espèce, l'arrêté ne vise pas à se substituer à l'État, mais à pallier ses carences dans une situation d'urgence. Cette intervention est pleinement justifiée par les circonstances exceptionnelles auxquelles nous sommes confrontés. 

Subsidiarité ascendante ?

Si la procédure au T.A est écrite, j’avais joint les arguments suivant à notre mémoire pour permettre de valoriser notre conception originale  et ascendante du principe de subsidiarité ;ce sont surtout sur ces arguments que j’ai appuyé mon intervention. .

Il nous a semblé pertinent à ce stade de citer Olivier Renaudie, professeur de droit public à l'École de droit de la Sorbonne et membre de l'Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne (ISJPS).

En effet, il a publié un article stimulant sur le site du Conseil Constitutionnel intitulé santé et territoires en octobre 2023.

Olivier RENAUDIE. « Santé et territoires », Titre VII [en ligne], n° 11, Santé et bioéthique, octobre 2023. URL

« La première observation porte sur la notion juridique de santé. Celle-ci est définie le plus souvent en s'appuyant sur le préambule de la Constitution de l'Organisation mondiale de la Santé, selon lequel il s'agit d'un « état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité »). Cette définition présente l'avantage de montrer que la santé ne saurait se limiter aux soins dispensés aux malades et comprend une dimension sociale. Pour autant, elle a un inconvénient, qui tient à son caractère relativement imprécis : la référence au « complet bien-être » peut être considérée comme empreinte d'une indéniable subjectivité. À défaut d'être une notion juridique clairement identifiable, la santé constitue certainement une politique publique, à savoir un programme d'actions mené par plusieurs autorités publiques dans un secteur social donné. »

Nous soulignons ici qu’un éminent professeur de droit estime que « plusieurs autorités publiques » œuvrent de concert à la mise en place d’un programme d’action pour conduire une politique publique.

C’est très exactement ce qui fonde l’action des maires ayant pris des arrêtés sur lesquels nous discutons. Ils estiment concourir, comme les services de l’état, à la mise en place de ce programme d’action. Ils sont donc bien acteurs et ont donc compétence à intervenir dans ce cadre à travers des arrêtés sur la salubrité publique et l’accès aux soins.

Renaudie estime que si « De manière relativement constante, la santé est une politique élaborée au niveau national. Pour autant, cette politique est aujourd'hui largement territorialisée»

Il poursuit :

« La seconde observation est relative à la « territorialisation » de la politique de santé. De manière générale, ce terme doit être entendu comme signifiant l'adaptation des politiques publiques aux spécificités des territoires ou encore la différenciation des politiques publiques en fonction des spécificités de territoires donnés. Appliqué au domaine de la santé), il implique l'identification par les pouvoirs publics d'un territoire permettant d'analyser les besoins de santé et l'offre sanitaire, mais également celle d'un lieu de pouvoir doté d'une certaine autonomie. Entamé au milieu des années 1990, ce mouvement a conduit le législateur à modifier en 2016 le code de la santé publique pour y introduire un chapitre intitulé « Territorialisation de la politique de santé ». Cette territorialisation de la santé publique est justifiée par deux raisons principales. La première raison tient aux inégalités dans l'accès aux soins. De multiples facteurs (démographiques, topographiques, économiques) sont à l'origine de situations contrastées avec, d'un côté, des zones particulièrement bien dotées en personnels et en moyens sanitaires et, de l'autre, des déserts médicaux. Dès lors, il est apparu nécessaire d'identifier un territoire pertinent et des outils permettant de corriger localement de telles inégalités. La seconde raison tient aux différences épidémiologiques. Comme le montrent régulièrement les études menées sur le sujet, notamment l'enquête annuelle sur l'état de santé de la population en France, réalisée par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques du ministère de la Santé), des différences sont susceptibles d'être constatées selon les territoires. Ces différences peuvent porter, par exemple, sur le taux de mortalité ou encore sur la prévalence de maladies dans certaines zones géographiques. C'est ainsi par exemple que l'Est de la France est particulièrement sujet aux maladies cardio-vasculaires, notamment pour des raisons d'habitudes alimentaires. Ce simple constat conduit à considérer le lieu de résidence comme un déterminant social de la santé et justifie une approche sanitaire différenciée selon les territoires. »

Les maires des Côtes D’Armor ayant pris les arrêtés dont nous discutons aujourd’hui ne disent pas autre chose. Et les indicateurs de santé du pays de Guingamp portés à la connaissance du Tribunal viennent étayer de fortes spécificités territoriales qui impactent négativement la santé des habitants des communes ayant pris ces arrêtés. Une approche sanitaire spécifique et différenciée pour les Côtes D’Armor chroniquement sous dotés pour garantir l’accès aux soins s’impose.

Ces indicateurs négatifs spécifiques à la commune de Guingamp et aux autres communes du territoire, ont été largement exposés dans le mémoire en défense devant le juge des référés et sont issus notamment du contrat local de santé.

Le professeur Renaudie conclu ainsi sa démonstration qui vient opportunément en soutien à la prise d’arrêtés pour garantir l’accès aux soins et conforter les maires dans leur compétence : « À l'origine, le terme « territoire » renvoie à une notion juridique précise : il est l'élément permettant d'identifier un État ou une collectivité territoriale. Aujourd'hui, il apparaît plutôt comme le lieu pertinent où les questions sanitaires sont posées et les réponses, élaborées. Cela conduit à brouiller les repères : tout espace se révèle désormais un territoire en puissance. »

Evidemment, les cahiers de doléances sous forme de synthèse ont été joints au mémoire en défense.

Cette hypothèse de la commune, territoire en puissance, pour co-conduire les politiques de santé publique est corroborée par les signatures des contrats de villes entre l’état et les communes qui mentionnent l’amélioration de l’accès aux soins dans ses objectifs comme à Guingamp par exemple ; , dans le co-financement par les EPCI ( conseils d’agglomération constitués rappelons le... De communes ! ) de maisons de santé, par la prise en charge en période de pandémie de nombreuses mesures à l’échelon municipal.

Le succès participatif des cahiers de doléances portés ou soutenus par les communes,  le soutien de la population à la prise d’arrêtés municipaux pour enjoindre l’état de remplir ces missions, contribuent à cette logique, comme le souligne le très modéré club des juristes « Les maires veulent surtout être informés, consultés, écoutés et suivis.  Au-delà des textes, ils se sentent investis d’une mission générale de  protection du bien-être de la population locale et d’une mission de  lanceur d’alerte... »

« Le principe de subsidiarité consiste à dire que le niveau territorial le plus petit a toujours une priorité politique : si l’échelon le plus petit peut efficacement résoudre un problème, il doit avoir la compétence pour le faire » Nous disent Ismaël Benslimane et Raul Magni-Berton dans leurs défense de la subsidiarité ascendante ( in Libérons nos communes ! PUF 2024). Et de de poursuivre : « Si l’échelon le plus petit peut résoudre efficacement un problème, il doit avoir les compétences pour le faire, cette notion qui fait partie des principes fondamentaux de l’UE exprime l’idée suivante : la seule raison pour laquelle une entité supérieure devrait se voir confier un pouvoir sur les entités inférieures est, ce faisant, les objectifs visés par cette organisation seront mieux remplis. »

Quel contributeur au débat public sur les politiques de santé peut sérieusement, dans le contexte actuel, prétendre que lEtat central rempli de manière efficiente ses missions et obligations dans l’égalité d’accès aux soins ?

D’ailleurs ce débat sur les compétences, la participation des élus locaux aux politiques de santé a irrigué les  échanges entre élus de la Région Bretagne à l’automne dernier . Interpellée par Aziliz Gouez, conseillère régionale du groupe écologiste et autonomiste « Breizh A-Gleiz/Bretagne à Gauche » sur le soutien aux maires ayant pris des arrêtés, Delphine Alexandre ( PCF et membre de l’exécutif Régional) déclarait ( Ouest France 11 octobre 2024 ):

« Oui, ils ont raison de se mobiliser par tous les moyens à leur disposition. Parce que quand un citoyen ne peut pas emmener son gamin  aux urgences, il ne se retourne pas vers le préfet où la direction de  l’Agenre régionale de santé (ARS), mais vers le maire »

Mais encore : «   Nous ne savons rien de sa structuration, de ses modalités, de son évolution réglementaire… nous n’avons aucun document, ni aucune  précision apportée après notre demande , déplore Delphine Alexandre qui demande  une  évolution nette des fonctionnements de l ’ARS pour permettre aux  politiques une véritable appropriation des enjeux et contribuer aux  décisions de façon éclairée. »

Delphine Alexandre demandera à cette occasion au nom de l’exécutif régional :  « une évolution nette des fonctionnements de l ’ARS pour permettre aux politiques une véritable appropriation des enjeux et contribuer aux décisions de façon éclairée »

Et de poursuivre comme nous le rapporte Ouest-France : «  La Région Bretagne est capable, avec les élus locaux concernés, d’assumer  ce que Paris ne sait plus faire, , la vice-présidente prévient que  ce sera difficile et long. Il n’y aura pas de fausses promesses et nous ne créerons pas de faux espoirs, si faciles à faire naître dans ces situations de détresse dans laquelle se trouvent tant de nos concitoyens. Nous n’avancerons qu’avec les moyens financiers et réglementaires pour le faire ».

Des propos novateurs, un débat riche passés sous les radars de la presse parisienne, à la veille d’une manifestation à Carhaix le 12 octobre dernier ( dont les urgences sont toujours fermées malgré un engagement de l’Etat dans le cadre d’un protocole de sortie de crise qu’il est incapable de respecter ) qui rassemblera des milliers de personnes venus du centre Bretagne mais aussi du pays de Guingamp voisin, sous une forêt de Gwenn-ha-Du...

Gael Roblin prenant la paole à Carhaix le 12 octobre 2024 © Poher Hebdo

Fin de partie, ou nouvelle saison ?

C’est le 27 mars 2025 que le tribunal administratif de Rennes rendra son avis sur le fond. Si le débat est juridique et nous offre a priori peu de chances de victoire, il est éminemment politique. De ce point de vue, habitants, élus, militants syndicaux et politiques du pays de Guingamp ont initié avec une ténacité certaine, un mode d’interpellation qui contribue de la nécessité de poursuivre sans relâche la mobilisation pour l’accès aux soins et pour que les bretons ( et les autres !) aient leurs mots à dire sur les politiques publiques qui impactent leur vie quotidienne.

A propos de chiffres, en voici encore quelques-uns qui parlent du Pays de Guingamp, évoqués au Tribunal par des maires qui savent de quoi ils parlent.

Un indice de vieillissement (rapport entre la population des plus de 65 ans sur celle des moins de 20 ans) de la population particulièrement fort (127 contre 109,35 au niveau du Pays de Guingamp et 94,6 au niveau régional ;

  • Une mortalité générale supérieure de 12 % par rapport à la moyenne nationale ;
  • Une surmortalité prématurée évitable de 54% par rapport à la moyenne nationale

(+58% pour les pathologies alcooliques ; + 54 % pour les accidents de la route ; + 98%

pour les suicides) ;

  • Une surmortalité due aux maladies de l’appareil respiratoire (+ 22%) et aux cancers

des voies aérodigestives (+ 53%).

Ces chiffres sont issus de la Synthèse du diagnostic établi dans le cadre du contrat local de santé de Guingamp-Paimpol Agglomération. Les services de l’Etat en ont une parfaite connaissance. Il savent aussi que, en 2021 déjà, était mise en exergue une carence significative de l’offre de soins par rapport aux données départementales (-12 % pour la médecine générale) ou nationales (-11,5 % pour la médecine générale).

Ne pas s’engager dans des réponses positives à nos revendications de réouverture immédiate des urgences au CH de Lannion et Carhaix , de la maternité de Guingamp, c’est continuer à mettre la tête sous l’eau à une partie de la Bretagne dont la population tente de surnager dans une période forte tensions sociales, cette partie de la Bretagne qui est la plus mal payée, la plus précaire, avec le revenu moyen le plus faible.

Pour finir, cette bataille pour le droit à la santé partout en Bretagne fait partie d’un vaste mouvement pour la défense des services publics, contre l’austérité. Elle est en lien direct avec le long conflit contre le report de l’âge de départ à la retraite, dont l’issue ne sous satisfait pas. Quand on connaît la sociologie du pays de Guingamp, Lannion, Carhaix ou Pontivy on sait qu’à la fin de notre vie, l’immense majorité d’entre nous n’a pas de capital ou si peu à léguer à ceux qui restent après nous. Quand on arrive finalement à la retraite la seule chose que l’on a donné , à léguer ..C’est du temps libre...Du temps pour nos enfants, nos petits-enfants, du temps libre pour les associations, pour l’éducation populaire, pour la solidarité...Du temps pour siéger dans les conseils municipaux...Mais pour pouvoir jouir de ce temps libre et en faire bénéficier la société il faut être en bonne santé ! Il faut avoir accès à la chaîne du soins près de chez nous sans encombre, tout au long de la vie.

La Bretagne des bourgs comme la Bretagne des tours doit pouvoir accéder à la chaîne du soins H24 depuis la naissance jusqu’à la mort, c’est une question d’égalité, une question de dignité. C’est un choix de société.

Notre santé c’est notre seul capital. Nos vies valent plus que les profits et les économies. Restons unis, combatifs, inventifs...Et déterminés !

En conclusion, le 26 avril marquera les deux ans de suspension des accouchements à la maternité de l’hôpital public de Guingamp. Décision prise par l’ARS. La clinique privée de Plérin près de Saint-Brieuc a bénéficié  d’aides publiques versées par l’ARS pour payer des médecins intérimaires afin maintenir l’activité de la maternité privée qui a absorbé une partie de l’activité de l’hôpital public.... Autant de contradictions, d’échéances et de décisions qui annoncent une nouvelle saison pour la mobilisation en faveur de la santé dans ce coin de la Bretagne...

Gael Roblin Conseiller municipal de la Ville de Guingamp.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.