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Billet de blog 21 juillet 2017

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À la Caisse des dépôts aussi, la majorité présidentielle choisit son opposition !

Le soir du 19 juillet a été mise en place la nouvelle commission de surveillance de la Caisse des dépôts qui a immédiatement élu son nouveau Président, Gilles le Gendre, député LERM de Paris. Le problème, c'est que parmi les trois députés désignés pour y représenter l'Assemblée, on ne compte aucun membre de l'opposition contrairement aux exigences de la loi et de la tradition républicaine.

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Le 19 juillet, la Commission de surveillance de la CDC a élu son nouveau président , en la personne de Gilles Le Gendre , député de Paris sous l'étiquette de la République en Marche. Il succède ainsi à Marc GOUA (ancien député socialiste rallié à Emmanuel MACRON) qui lui-même avait remplacé Henri EMMANUELLI, décédé en mars dernier.

Si cette élection ne suscite pas de commentaire particulier et est conforme à la loi (art L518-5 du code monétaire et financier), on peut en revanche être surpris et inquiet de la désignation effectuée la veille par François de Rugy, Président de l'Assemblée Nationale, des trois députés censés représenter le parlement aux côtés de deux sénateurs , au sein de l'instance de contrôle et de gouvernance de la Caisse. En effet, si la désignation de messieurs Le Gendre et Savatier, tous deux issus de la majorité présidentielle ne fait pas débat, celle de Gilles Carrez est tout à fait contestable, non pas en raison de ses compétences qui sont grandes et reconnues mais plutôt au motif de sa légitimité à y incarner l'opposition. En effet, la loi prévoit clairement selon les termes de l'article L518-4 du CMF que "la Commission de surveillance est composée de trois membres de la commission de l'Assemblée Nationale chargée des finances dont un au moins appartient à un groupe ayant déclaré ne pas soutenir le gouvernement".  Or, M.Carrez appartient au groupe "Les Républicains  " dont l'actuel Premier Ministre est issu et dont la majorité des membres, y compris Gilles Carrez, s'est abstenue lors du vote de confiance au gouvernement intervenu le 5 juillet dernier. Seuls les membres des groupes de "La France Insoumise " et de la "Gauche Démocrate et Républicaine" répondent sans ambiguïté à cette définition et auraient pu et dû légitimement représenter l'opposition au sein de la Commission de surveillance de la Caisse des dépôts. Ceci est d'autant plus vrai que par ailleurs, cette instance comprend deux sénateurs dont au moins un représentant de la majorité sénatoriale détenue aujourd'hui par LR et que les 8 autres membres sont soit des personnalités qualifiées nommées par les Présidents des deux assemblées soit des représentants de la Cour des comptes, de la Direction du Trésor ou encore de la Banque de France ou du Conseil d'Etat, ce qui exclut, par construction, toute possibilité d'une expression contraire à la politique du gouvernement et même tout écart par rapport au courant dominant prônant la restriction de la dépense et de l'investissement publics. Pour s'en convaincre , il suffit de lire les rapports de la Cour de comptes qui, pire que l'IFRAP, répètent, ad nauseam, toujours les meme antiennes, au service des marchés et de l'initiative privée .

Cette question pourrait paraître anodine mais elle est pourtant fondamentale si l'on considère que la Caisse des dépôts est "théoriquement " un Établissement public "autonome" du gouvernement et placé à cette fin "de la manière la plus spéciale sous la surveillance et la garantie de l'autorité législative". Autrement dit, c'est bien le Parlement dans sa diversité démocratique qui est censé protéger la CDC des interventions et pressions intempestives de l'exécutif notamment au travers de sa participation à la Commission de surveillance. Ce rôle ne peut être joué efficacement si la représentation démocratique y est faussée et que l'opposition parlementaire au gouvernement n' y est pas représentée.

Cette affaire prend encore plus d'importance si l'on tient compte de la période  particulièrement instable que traverse le système de gouvernance de la Caisse, affaibli tant par les incertitudes entourant la continuité du mandat de l'actuel Directeur général, Pierre-Rene Lemas, que par les départs quasi-simultanés du directeur de la stratégie et de la directrice des retraites tout autant que par les mises en causes idéologiques récurrentes de la Cour des comptes , sans parler , pour revenir à la Commission de surveillance elle-même, de l'évocation récente dans ces mêmes colonnes,sous la plume de Laurent Mauduit, du versement d'indemnités indues à ses membres lors des précédentes mandatures.

Pour conclure, cette question met également en évidence l'urgente  nécessité de modifier les règles de composition de la Commission de surveillance pour l'ouvrir enfin à la représentation des salariés du groupe Caisse des dépôts comme le prévoyait un amendement porté par Henri EMMANUELLI et voté par l'Assemblée mais hélas censuré par le Conseil Constitutionnel pour des raisons de pure forme. Seule cette réforme permettrait à la gouvernance de la Caisse de sortir d'un "entresoi" de plus en plus restreint.

Plus  généralement , quant à la relation entre le pouvoir exécutif actuel et les organes de gouvernance des institutions publiques, cette "anecdote" pourrait être révélatrice ou annonciatrice d'une dérive vers une conception de type "spoil  systèm" totalement contraire aux principes de neutralité républicaine et de continuité qui fondent le service public dans notre pays. 

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