Quand il me demande innocemment "delo", que j’ouvre un robinet pour en verser dans son verre, puis que je le regarde boire avec ses petites mains, je pense à tous ces gens que l’on fait mourir de faim et de soif.
Que nous serions-nous en train de vivre si nous étions nés là-bas ?
Tout ce que nous connaissions aurait été détruit méthodiquement. Nos lieux de vies, nos habitations, nos écoles, nos routes, nos hôpitaux, nos moyens de subsistance.
Beaucoup de ceux que nous aurions connu seraient morts ou disparus. Tous ceux qui seraient encore vivants seraient blessés, estropiés, affamés, assoiffés, traumatisés à vie.
Peut-être que ma femme aurait agonisé pendant des jours dans les décombres de notre immeuble détruit par une frappe israélienne.
Peut-être que mes parents se seraient fait abattre comme des chiens et enterrés dans une fosse commune.
Peut-être qu’un de mes neveux adolescent se serait fait tirer dans les jambes par des soldats hilares, qui savent qu’ils ne se seront jamais punis.
Peut-être que mon cousin aurait voulu témoigner au monde entier de la folie qu’était devenu son quotidien, et un missile aurait fait sauter sa maison et sa famille en pleine nuit.
Peut-être que j’aurais vu la tête d’un de mes frères exploser alors nous allions chercher la nourriture pour nos enfants.
Peut-être que je serais mort de désespoir d’avoir entendu mon petit bébé d’amour hurler de soif jusqu’à mourir dans mes bras.
Je ne peux plus rien lire ou regarder sur Gaza, ça me met dans un colère sourde, j'ai l'impression que ça va me rendre fou.
Au moins 100 000 personnes sont mortes à Gaza. Combien de centaines de milliers de vies gâchées ? Sur combien de générations ?
Comment peut-on commettre toutes les horreurs que font subir le gouvernement israélien et son armée aux palestiniens ?
Comment peut-on ne serait-ce que penser qu’on est en droit de commettre de tels actes ?
Comment peut-on laisser faire ou justifier toutes ses ignominies ?
Certains nous répètent ad nauseam que "c’est le droit d’Israel à se défendre". Mais par quelle circonvolution mentale peut-on justifier de tels massacres avec une petite phrase si simpliste, si stupide ? Comment est-ce que "le droit d’Israel à se défendre" pourrait-il être de massacrer tout un peuple pour lui voler son territoire ? Parce que c’est ce qui se joue depuis le début, et ce que beaucoup font semblant de ne pas voir. Et aujourd'hui, plus grand chose ne semble pouvoir empêcher que Gaza ne devienne une "Riviera" bâtie sur un génocide, ni que la Cisjordanie ne soit entièrement colonisée, sa population spoliée et déplacée.
Et malheur à celui qui ose rappeler le droit international ou critiquer un peu trop fort la violence absolue du gouvernement israélien. On le traite aussitôt "d’antisémite" ou de "complice du Hamas" pour le faire taire. Ces "arguments" n’ont aucun sens. Leur seul objectif est de neutraliser toute pensée contraire, faire comme si la faute revenait à ceux qui osent s’indigner de ces actes barbares plutôt qu’à ceux qui les commettent. Ils permettent de se déculpabiliser, pour massacrer et coloniser l’esprit tranquille.
C'est pitoyable, d'une bêtise insupportable. Mais ça marche et c'est effrayant.
Mais évidement que beaucoup d’israéliens et de juifs à travers le monde sont contre ce qui se passe à Gaza et en Cisjordanie. Et évidemment que des "non-juifs" sont pour, ou n’y voient aucun inconvénient. Soutenir ces horreurs n’a absolument rien à voir avec une religion, un statut social, une nationalité ou une appartenance à un peuple, quoique cela veuille dire. C’est une question d’humanité. Quel type d’être humain peut faire subir de telles atrocités à ses semblables, à son prochain et à ses enfants ? Quel type d’être humain peut les balayer avec des arguments aussi stupides ?
Gaza est une honte pour l’Humanité. Tous ceux qui commettent ces horreurs ou les légitiment avec des raisonnements absurdes seront jugés très durement par l’histoire.
Mais combien de ces gens seront un jour paralysés par la honte et capables de se repentir ? Combien n'auront jamais le moindre remord ?
J’espère que malgré le monde de plus en plus dénué d’humanité dans lequel il va grandir, mon fils n’aura jamais à subir de telles horreurs. Et qu’il ne sera jamais capable de les commettre.