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Billet de blog 7 juillet 2015

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Port-au-Prince, capitale des cataclysmes tueurs...

Tremblements et secousses déchaînent leurs fureurs...

Murs en transe, qui s'écroulent, qui écrasent, qui broient

les corps enchevêtrés sous les pierres, les gravats.

Des morts partout. Des os brisés. Le deuil. La peur...

On pense à ceux qui souffrent. On pense à ceux qui meurent,

aux blessés qui attendent sans recevoir de soins,

on pense aux maladies, à la soif, à la faim.

On a le cœur serré. On voudrait les aider.

Nos chers gouvernements vont tout organiser !

Les tonnes de surplus du monde occidental

pourraient répondre là à l'urgence vitale.

« Nous » avons bien assez d'avions, d'hélicoptères,

pour larguer des rations comme on fait à la guerre,

palliant au plus pressé : besoins en nourriture,

besoins en eau, besoin de panser les blessures,

parachutant provisions et médicaments,

des chirurgiens, en nombre, avec leurs instruments,

et des abris, des dizaines d'hôpitaux gonflables...

-Mais non ! Nos dirigeants sont bien plus raisonnables !

Vous ne voudriez pas que le peuple haïtien

s'organise lui-même, prenne son sort en mains,

se déleste du poids d'un État corrompu,

agisse librement, de manière imprévue ?

D'abord, faire débarquer G.I. et policiers

qui monteront la garde dans les supermarchés.

Prendre en charge, structurer, gérer et contrôler,

c'est la priorité. À huit jours écoulés,

cent mille rations, en fait, ont été distribuées

aux trois millions de sinistrés. Ces affamés

n'ont qu'à bien se tenir et se montrer patients,

courbés sous la férule du marché triomphant.

Ils pourront à la queue-leu-leu passer leur temps

pour consommer un peu, s'ils ont assez d'argent !

Les médecins, trop rares, s'épuisent. Et ils opèrent,

ils amputent, sans calmant, et ils se désespèrent

parc' que les moyens manquent, à voir des vies perdues.

Un' petit' fill' de quatre ans n'a pas survécu :

intoxication. Juste extirpée des décombres,

il fallut l'enterrer, la remettre à la tombe.

Les grand's puissanc's occup'nt à nouveau Haïti.

C'est un lieu stratégique pour les États-Unis,

prêts à refaire le coup de la démocratie

en chef, dictant sa loi, et celle du F.M.I.

Comme si les Haïtiens n'avaient qu'à dire « Amen »,

en s'effaçant face aux possédants qui s'en viennent,

qui parl'nt de reconstruire. Et qui donc les mandate ?

Qui donc a décidé ? Quand ? Comment ? Quel contrat

a été concocté ? Au bénéfice de qui ?

Qui va payer ? Et qui va établir les prix ?

Car les entrepreneurs qui, par philanthropie,

dans de vastes chantiers veulent tous investir,

vont-ils offrir, sans une contrepartie, les clefs

de jolies maisons neuves à des déshérités ?

Pauvre « perle des Antilles », vrai paradis sur terre,

qui voyait deux récoltes par an sans effort,

île pourvue de richesses à foison, pillée,

rendue exsangue par les tyrans qui t'ont spoliée,

dévastée, mise à genoux sous les dictatures,

qu'est-ce qui attire encor chez toi tous ces vautours ?

Les U.S. veul'nt-ils, sous couvert d'humanitaire,

qu'aucune île n'échappe à leur emprise guerrière ?

Servant l'ordre régnant, leur armée, étrangère,

de fait, installe déjà ses bases militaires,

s'alliant à un État qui enfin touchait terre,

comme si la vie de l'île était sa propre affaire !

...N'y aurait-il donc pas aussi un gisement

énorme, d'un' main d'œuvre, qui sera trop contente

qu'on lui donne, pour survivre, un emploi sous-payé,

puisque, c'est décrété, tout doit être acheté

en ce monde. Comme si vraiment tout était à vendre !

Louisiane. Katrina. L'aide qui se fait attendre.

Les militaires qui traqu'nt les victim's, euh, pardon,

les pillards, qui pourraient se servir sans façons

dans les supermarchés inondés, mais fermés.

En Haïti, le mêm' spectacle est programmé.

Par contre, après les trois cyclones de 2008,

quand vos dons généreux fur'nt détournés sans bruit,

ça ne fit pas tant d'histoires... Mais alors, que faire ?

Et si nous nous mêlions, enfin, de nos affaires ?

Nous moutonnons sans fin au profit de leaders,

proies de la démesure aveugle et meurtrière...

Nous ne serions que mieux libres et solidaires

en réorganisant tout à échelle humaine.

Si, sans délai, nous changions tout ? La vie humaine

n'a pas de prix. La vie des êtres que l'on aime.

 Gdalia Roulin, 21 janvier 2010

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