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Billet de blog 9 juillet 2015

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Le traité transatlantique programme l'asservissement et la ruine des peuples

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

L'APT (Accord de Partenariat Transatlantique), résurgence aggravée de l'AMI, dans la droite ligne des accords de l'OMC et de l'AGCS, se négocie dans la plus grande opacité entre les USA et la Commission Européenne, celle-ci ayant été mandatée le 14 juin 2013 par les 28 gouvernements de l'UE, tandis que les parlementaires eux-mêmes sont tenus dans l'ignorance du contenu des négociations.

L'APT organise le libre-échange intégral, pur et dur, entre les « investisseurs » des USA et ceux des pays de l'UE.

L'APT exige la levée de tous les garde-fous en matière financière, interdit aux gouvernements de contrôler le volume, la nature ou l'origine des produits financiers mis sur le marché, et leur fait obligation stricte de traiter avec autant de bienveillance sonnante et trébuchante les investisseurs, qu'ils soient étrangers ou nationaux.

L'APT stipule que les pays signataires assureront la « mise en conformité de leurs lois, de leurs règlements et de leurs procédures » avec les dispositions du traité.

En cas de conflit sur une norme, un règlement, une loi entre une firme privée et les pouvoirs publics – État, Région, Département, Commune – plainte pourra être déposée devant une structure d'arbitrage privée. Une firme privée pourra traîner un État devant un tribunal d'arbitrage, et obtenir de lourdes réparations (sur le dos des contribuables) quand elle estimera que la législation d'un pays porte atteinte à ses « futurs profits espérés ».

Délirant ? Oui. Mais c'est bien ce qui est négocié actuellement. Dès lors qu'une firme privée est en cause, les juridictions du pays sont remplacées par un groupe d'arbitrage privé créé au cas par cas, composé de 3 avocats d'affaires – et seuls 15 juristes de l'investissement dans le monde se sont partagés 55 % des affaires traitées à ce jour... Ils délibèrent dans le secret, sans débat contradictoire, et leurs décisions sont sans appel. Nous en avons eu un exemple en France avec l'affaire Tapie.

Ce mécanisme de règlement des différends sert à transférer la souveraineté aux géants du secteur privé.

De telles procédures sont déjà à l'œuvre dans le cadre de plusieurs accords de commerce signés par Washington, et en particulier depuis 20 ans dans le cadre de L'ALENA (accord de libre-échange entre le Canada, le Mexique et les USA).

Le bilan est clair :

Sur 30 affaires où une firme privée des USA a attaqué le Canada, 30 fois le Canada a perdu.

Des firmes privées canadiennes et mexicaines ont attaqué une quinzaine de fois le gouvernement des USA. Dans tous les cas elles ont perdu.

Moralité : les mécanismes de régulation des différends sont au service des firmes des USA et de leur gouvernement.

Un exemple : malgré l'ALENA et contrairement à leurs engagements, les USA ont continué à protéger leurs géants industriels et agricoles. Les conséquences sont épouvantables pour le Mexique. Il y a 20 ans, ce pays était exportateur net de produits agricoles. Aujourd'hui il est importateur net. Des centaines de milliers d'emplois agricoles ont disparu, et on assiste à des phénomènes de désertification. Quand le Mexique a accusé les USA de ne pas respecter les règles de l'ALENA, il a perdu devant le tribunal d'arbitrage !

Ce scénario menace l'Europe, la France. Les droits de douane protègent encore notre agriculture. Leur suppression prévue par l'APT entraînerait une compétition totale et l'invasion massive de soja, de blé américain OGM, de viandes traitées chimiquement etc... La catastrophe est programmée si nous laissons signer ce traité.

Bien d'autres faits scandaleux sont à dénoncer mais la place manque :

Sociétés qui engagent des poursuites contre l'augmentation du salaire minimum en Égypte, ou contre la limitation des émissions toxiques au Pérou, ou contre un système de brevet qui baisserait le prix de certains médicaments au Canada, ou contre l'indication du pays d'origine sur les viandes, etc.

Pas un secteur n'échapperait au désastre.

Imaginez l'arme de destruction massive constituée par l'APT pour les Cies pétrolières qui tiennent de gré ou de force à exploiter les gaz de schistes !

Les entreprises dicteraient leurs normes dans tous les domaines d'intérêt général relevant normalement du politique, qu'il s'agisse des services publics, des politiques de santé, de sécurité sanitaire, de protection de l'environnement, de l'énergie, de l'eau, de l'éducation, des transports, des droits sociaux, de la culture, de la protection de la vie privée, etc...

Il s'agit de « l'élimination, la réduction ou la prévention de politiques nationales

superflues » tous azimuts. Place au profit décomplexé !

Les USA ont d'autres accords au feu, notamment le Trans Pacific Partnership avec 12 pays dont l'Australie et le Vietnam.

C'est à une marche au coup d'État mondialisé que nous assistons.

Qui serait à l'avenir en mesure de refuser les conditions dictées par une telle puissance financière, concoctant elle-même ses lois contraignantes et s'arrogeant le droit d'imposer des amendes colossales en cas d'insubordination des pays ?

Un accord de libre-échange entre le Canada et l'UE a déjà été signé dans la plus grande discrétion le 18/10/2013.

Quant à M. Hollande, il déclarait le 11 février dernier à Washington : « Nous avons tout à

gagner à aller vite. Sinon, nous savons bien qu'il y aura une accumulation de peurs, de menaces, de

crispations ».

Face à une attaque aussi grave qui veut nous pousser à des choix de société insupportables, la complicité avec les fossoyeurs de toute démocratie et de toute douceur de vivre, les partis de droite – dont le PS est devenu une composante – que cette collusion se passe à l'échelon national ou sur le plan local, c'est une trahison envers les classes populaires.

 Gdalia Roulin, 10 mars 2014

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