Sauf à centraliser les informations, on ne comprend pas tout de suite l'ampleur d'une catastrophe. Quelle tristesse sur St-Affrique, ville si souriante et agréable à l'accoutumée. Malgré la chaleureuse solidarité manifestée de partout, on croise dans les rues des personnes figées dans une détresse intense, des gens murés dans la vision de leur cauchemar, d'autres aux yeux rougis par la douleur ou l'empathie. La ville porte comme un deuil, bien que personne, heureusement, n'ait perdu la vie dans cette catastrophe.
Une telle hauteur de crue ne s'était pas vue depuis 1953. A l'époque la fonte rapide des neiges abondantes expliquait la montée des eaux. En novembre 2014 les fortes pluies sont en cause.
Espérons que les facteurs d'aggravation des crues seront reconnus et étudiés sérieusement, sur la base d'observations objectives tant des causes naturelles que de l'impact des constructions et interventions humaines. Il est nécessaire d'établir les raisons du désastre pour y remédier et mieux se protéger à l'avenir.
Savoir par exemple pourquoi le « Carrefour » a été dévasté, et pas l'« Intermarché » ? Le premier est construit face à des zones bâties, le second face à des terres cultivées…
Déterminer pourquoi certaines rives ont été emportées ? Traditionnellement, les peupliers au bord de l'eau servaient à la ramée, ce qui les empêchait de beaucoup grandir. La pratique abandonnée, ces arbres sont devenus énormes avec une grosse prise au vent, leur système racinaire restant peu profond. Conséquence, ils sont emportés et la terre avec eux, comme sont embarquées aussi les rives dépourvues d'arbres. Les berges qui ont résisté sont celles où la végétation était équilibrée.
De plus les anciens avaient construit des digues au bout de leurs champs au bord de l'eau. Mais l'agriculteur moderne fait fi des vieilles pratiques et préfère augmenter sa surface cultivable, si bien qu'en l'occurrence ses terres sont largement inondées, mais aussi celles du voisin, qui, s'il avait maintenu ses digues, a vu le flot arriver par les prairies…
Demandons-nous aussi quels effets a produit le creusement artificiel du lit des rivières, qui a probablement accéléré la vitesse d'arrivée des eaux ?
Va-t-on continuer à vouloir bétonner au bord des rivières les meilleures terres agricoles, aggravant ainsi systématiquement les dommages entraînés par les crues, alors que nous avons tous intérêt à ce que ces terres soient destinées à produire notre alimentation ?
Et que dire des constructions en zones inondables ? Ceux qui avaient reçu le feu vert pour construire dans des endroits à leur insu pourtant inondables, qui ont vu les vagues envahir leur demeure parfois jusqu'au toit, qui ont perdu tout leur mobilier, leurs photos de famille, des souvenirs de personnes aimées ou le résultat d'années de travail, ceux qui vont peut-être même perdre leur maison, en outre à l'entrée de l'hiver, que pouvons-nous leur dire ? Quel dédommagement impossible leur offrir ? Des familles veulent partir, et on les comprend vraiment. Cependant, que vont devenir ces maisons si elles restent debout, si elles sont plus ou moins réparables ? Seront-elles vendues dans quelques années à de naïfs arrivants ? Ou les possesseurs actuels sont-ils condamnés à perdre aussi cette valeur qui représente peut-être le fruit du travail de toute leur vie ?
Il semblerait juste que ces personnes soient indemnisées correctement par la puissance publique qui leur a donné abusivement le permis de construire et qu'en corollaire toute vente ou location de ces immeubles soit interdite. A moins de trouver une protection réellement efficace et qui ne provoque pas d'autres calamités plus loin, ce qui semble très aléatoire.
Cette fois nous avons eu une chance relative que la brusque montée des eaux n'ait pas eu lieu la nuit ! Nombre de gens auraient sans doute été surpris dans leur sommeil, davantage de biens auraient été noyés et probablement nous aurions déploré des victimes à domicile ou sur les routes. Mais compter sur la chance ne saurait être une politique sérieuse. Les occupants des postes de « responsabilité » donnent depuis des lustres la priorité absolue dans leurs décisions aux sempiternelles questions financières qui leur font bétonner des plaines fertiles parce que le coût des constructions y est moins onéreux que sur les pentes. Il faut changer ces pratiques aberrantes, inspirées une fois de plus par des contraintes budgétaires au mépris des conséquences vécues. Et espérons que si enfin les « décideurs » se résolvent à bâtir en hauteur et non pas « les pieds dans l'eau », ils ne défigureront pas les collines. Nous pourrions réapprendre à inscrire les constructions dans le paysage, comme l'étaient les bâtisses traditionnelles, incomparablement mieux conçues et tellement plus solides et durables que nos pitoyables édifices modernes. Nous serions bien inspirés d'ailleurs de les restaurer utilement car leurs emplacements et leur orientation n'étaient pas choisis à la légère…
Gdalia Roulin, lundi 8 décembre 2014
Aux dernières nouvelles les maisons neuves construites en zone inondable seront rachetées par la commune et démolies. Ce qui n'empêche pas nos vaillants édiles communaux de vouloir à toute force installer au Mialaguet une nouvelle zone artisanale supplémentaire sur les berges occupées aujourd'hui en partie par du maraîchage en bio, sans même avoir lu ou surtout transmis aux conseillers municipaux la présentation écrite d'un contre-projet de grande qualité réalisé par les opposants à la zone, qui respecterait la nature et les paysans au contraire du bétonnage programmé officiellement.