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Billet de blog 23 juillet 2015

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Liberté chérie

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Nous n'entendons parler de la Grèce qu'à l'occasion d'échéances rapprochées de « dettes », comme d'un mauvais payeur face à ses créanciers. En fait « la dette », aussi mondialisée que l'économie du même nom (tous les pays étant « en dette » aussi absurde que cela soit), est devenue un mode de gouvernement. La haute finance et ses affidés gouvernementaux maintiennent les peuples sous tutelle par croyance et soumission aux contraintes exercées au nom des « dettes », que chaque pays doit à des banques privatisées, alors que chaque pays devrait être souverain quant à sa monnaie donc sans aucun assujettissement à des intérêts, et dans ce cas pas si endettés que ça.

On nous dépeint comme un bras de fer en plusieurs rounds les négociations entre « la Grèce » et les hautes autorités de la finance et de la politique mondiales, présupposant que bien sûr s'il y a dette, c'est que l'on doit un argent emprunté que l'on a dépensé, si ce n'est dilapidé. Évidence trompeuse. C'est oublier le fait que dans chaque pays l'argent n'est pas réparti également entre tous, ni géré par tous, et que le peuple grec tout comme les autres peuples n'a pas eu voix au chapitre ni aux prébendes, et qu'il subit des persécutions budgétaires pour des avantages qu'il n'a pas connus.

On parle d'une Grèce débitrice. Mais qui a entendu parler de l'audit de la dette grecque ? Lancé ce 4 avril par la présidente du Parlement grec, les conclusions préliminaires en ont été présentées au parlement grec les 17/18 juin par Éric Toussaint, qui dirige les travaux de la commission.

On y découvre que cette dette est non seulement insoutenable, mais illégitime et odieuse, ces mots ayant un sens juridique précis défini par le CADTM, de nombreuses dispositions fondamentales du droit national et international ayant été violées lors de sa constitution. La troïka a abusivement dicté mot à mot sa politique « d'austérité » (doux euphémisme!) au gouvernement grec, se permettant de remanier à 180° des lois votées par le parlement grec et d'en forcer l'adoption par le chantage aux prêts.

« La dette », non pas résorbée grâce à « l'aide » perverse et sadique imposée à la population, a grimpé de 60 % du PIB depuis 2009. En 2014 le chômage a triplé, on compte moins 30 % d'entreprises, -1 million d'emplois. Le SMIC est passé de 7,5  € à 3,44 €. Salaires : -38 %. Retraites : -45 %. 46 % des Grecs sont sous le seuil de pauvreté. Budget de la santé : -40 %. Mortalité infantile : + 43 %. 2 suicides/jour dans un pays où ce taux était très bas. Etc...

Qui a parlé de l'audit grec en cours, à part le « Monde diplomatique » ou « Médiapart » et j'espère quelques autres ? Belle démonstration que les médias dits « grands » sont aux ordres, et que l'information, fort orientée, reste trop superficielle pour pouvoir nourrir des réflexions étayées.

Au plan local, quand des journaux ouvrent leurs colonnes à qui veut écrire dans des pages de libre expression, quand il y a de la place pour tout le monde et que toutes sortes d'opinions peuvent s'y exprimer, c'est trop rare pour ne pas être salué. C'est l'occasion de faire aussi entendre d'autres points de vue que ceux de la pensée unique répandue partout. J'avais pris le pli depuis de nombreux mois d'écrire ainsi chaque semaine dans notre journal local, après tout un travail de documentation préalable. J'aimais cette régularité, et la sensation de contribuer au bien social. Il se passe tant de choses graves dont on nous informe peu ou de façon si partiale ! Mais le directeur du journal m'a fait dire d'écrire moins souvent ou des textes plus courts, parce qu'une telle régularité jointe au fait que mes textes sont étoffés pourrait me faire passer pour une chroniqueuse attitrée, alors que ce que je dis n'engage que moi et ne correspond pas forcément à des positionnements du journal, puisque je ne me concerte qu'avec ma conscience pour rédiger. Je regrette cette décision, il y aurait tant à dire sur tant de sujets cruciaux, et il est si difficile de se désengluer de la pensée dominante !

Écrire de brefs billets d'humeur ne me motive pas. C'est très à la mode, dans l'idée que « les gens » sont incapables de fixer leur attention. Si nous en sommes là parfois, cela a été fabriqué et les outils n'y ont pas manqué, entre le culte de la vitesse, les manettes de zapping, l'habitude de débiter en 3mn ce que l'on appelle les informations, où l'on passe urgemment et répétitivement du coq à l'âne comme si c'était normal, ou en parlant pour ne rien dire en cas de catastrophes... Je n'ai pas l'intention de participer à ce phénomène. Si l'on veut pouvoir comprendre un sujet, il faut rassembler des faits, des arguments, et prendre le temps d'étudier la question. Il me faut donc me limiter à un texte par quinzaine. C'est malgré tout une démonstration que dans ce pays la liberté d'expression est conditionnée. Et vu les lois que le gouvernement fait voter actuellement, c'est loin d'être en voie d'amélioration.

Pourtant il nous faut trouver les moyens de faire circuler des informations consistantes, pas seulement sur le net, et cela en direction de tous nos concitoyens, y compris ceux qui ne font pas partie de nos cercles habituels. C'est une condition non pas suffisante, mais nécessaire à la vie démocratique.

 Gdalia Roulin, lundi 13 juillet 2015.

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