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Billet de blog 28 mars 2016

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M. Hollande sert le MEDEF contre les PME-TPE

A tous points de vue le projet de loi El Khomri ne bénéficierait qu'aux entreprises du CAC40. Ce jeudi manifestation nationale contre le projet. Ne rentrons pas chacun chez soi sans perspectives après les cortèges et les discours, formons des collectifs citoyens pour travailler dans la durée et œuvrer à fédérer les citoyens à la base plutôt que nous en remettre aux directions patentées.

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On compte 3,5 millions de patrons en France, dont la plupart de PME-TPE. Les artisans, commerçants et TPE constituent 36 % des entreprises françaises, les professions libérales un quart, et presque autant, 800.000, sont des entreprises de l'économie sociale et solidaire.

Selon ses propres chiffres, le MEDEF totaliserait 21 % des entreprises. Résultat plus que probablement très surévalué. M. Offerlé, politiste professeur à l'ENS, croisant l'annuaire du MEDEF avec les statistiques de l'INSEE, a trouvé selon 2 scénarios possibles une fourchette de 111.463 à 334.390 adhérents au MEDEF, soit à peine 3 % à 10 % des entreprises du pays.

Or dans les organismes paritaires dits du dialogue et de la protection sociale : Caisses de retraite, d'assurances maladie, de chômage, des allocations familiales etc, où 700.000 « mandats » subventionnés par l'État sont pourvus, les professions libérales et les entreprises de l'économie sociale et solidaire ne sont pas du tout représentées, les artisans, commerçants et TPE le sont à raison de 10 %, et le MEDEF, la voix des grosses entreprises boursières, rafle 60 % des places.

Un accord de 2013, signé par le MEDEF, prévoyait d'établir une représentativité patronale en proportion du nombre d'entreprises adhérentes à chaque organisation, selon le principe : « une entreprise = une voix ». Car ce n'est pas le cas ! Mais son application a été reportée à 2017...

Et l'article 20 du projet de loi El Khomri (par laquelle la ministre du travail salit son nom) prévoit que la représentativité patronale ne soit calculée qu'à 20 % selon le nombre d'entreprises adhérentes et à 80 % selon le nombre de salariés de ces entreprises, d'où sur-représentation assurée du MEDEF et des patrons du CAC40, qui auraient autant de voix à 12 que 1000 PME. Ainsi le MEDEF consoliderait son hégémonie dans les sinécures qu'il occupe. M. Crouzet, président de l'UPA, proteste : « Les membres du gouvernement crient leur amour pour les TPE-PME et dans les faits font presque tout pour les entreprises du CAC40 ». L'UPA dénonce : « Le gouvernement a clairement choisi de favoriser les très grandes entreprises au détriment des autres et le MEDEF au détriment des autres organisations patronales. C'est particulièrement grave lorsque l'on sait que c'est au sein des TPE-PME que se situent la croissance et l'emploi ».

Le projet de loi, consternant à tous égards, impulse un dumping social qui serait dévastateur, amplifiant des processus déjà à l'œuvre tels les « accords de compétitivité » de M. Sarkozy ou de « sécurisation de l'emploi » de M. Hollande. Ce chantage à l'emploi s'exercerait non seulement dans des entreprises mises en difficulté, mais pour conquérir des marchés et soi-disant créer des emplois… avec baisses de salaires et hausses de la durée du temps de travail à la clef, et le salarié qui oserait refuser de tels « accords » serait licencié pour « cause réelle et sérieuse » !

Un exemple concret. En 2014 un « accord de compétitivité » a été imposé aux salariés de Renault : temps de travail augmenté de 6 %, gel des salaires, 8000 suppressions d'emplois. Et en 2015 le PDG de Renault-Nissan était payé 7,2 millions € chez Renault et autant chez Nissan ! L'État malgré sa part de capital accrue dans l'entreprise, n'a pas jugé bon d'exercer le moindre contrôle sur cette répartition scandaleuse toujours plus inégalitaire.

Le projet de loi El Khomri, de quelque côté qu'on le regarde, ne bénéficierait qu'aux entreprises du CAC40 déjà outrageusement sur-puissantes et privilégiées financièrement, échappant à l'impôt, subventionnées à coups de milliards d'argent public sans contrepartie, tandis que tous les autres pans de la société basculeraient de plus en plus vers la précarité, une insécurité entretenue, et l'impuissance codifiée. Ce projet scélérat doit être retiré sans autre circonlocution.

Si, à l'opposé de la philosophie de ce gouvernement, il s'agissait de donner beaucoup plus de droits aux travailleurs, là oui. Mais cela n'arrivera pas en négociant avec des gouvernements prêts à toutes les entourloupes en faveur des entreprises du CAC40, qu'il s'agisse de la fausse gauche « aux affaires » actuellement ou de la droite que nous avons vue à l'œuvre, ni bien sûr avec l'extrême-droite dirigée par une famille de milliardaires.

Pour instaurer l'égalité, la démocratie, le bien-être pour tous, et le respect de notre écosystème qui devrait être obligatoire pour chacun et, c'est vital, en particulier dans le secteur économique, il nous faudrait changer les institutions française afin que tous les citoyens puissent s'exprimer eux-mêmes et décider ensemble des choix de vie et de société, au lieu de nous laisser mener au gré des cours délirants des profits boursiers qui font jouer le monde entier à la roulette russe. Il faudrait nous y préparer dès maintenant, en élaborant dans le cadre d'assemblées générales populaires ce que nous voulons, et commencer par travailler au changement de pacte social, de constitution.

Ce jeudi manifestation nationale contre le projet de loi El Khomri.

Ne rentrons pas chacun chez soi sans perspectives après les cortèges et les discours, formons des collectifs citoyens pour travailler dans la durée et œuvrer à fédérer les citoyens à la base plutôt qu'au sommet.

Gdalia Roulin, dimanche 27 mars 2016.

Source : blog de Jean-Luc Mélenchon.

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