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Billet de blog 2 février 2025

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Pesticides interdits ici, exportés là-bas

Écoutons-les, Sénégalais, Camerounais, Congolais, Ivoiriens, anciens colonisés français ou encore Brésiliens : « Vous n’avez pas honte d’exporter chez nous des pesticides que vous avez interdits chez vous depuis longtemps ? » On tombe de l’armoire: il y a bien une loi dite Egalim qui avait proscrit cette pratique en 2018. L’entrée en vigueur de la loi n’y a rien fait. (Gilles Fumey)

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Illustration 1
Des exportations depuis l'UE pourtant interdites

L’ONG Public Eye et Unearthed révèlent que les Britanniques ont exporté 28 000 tonnes d’un pesticide, à base de paraquat, produit pouvant causer la mort, interdit en Europe depuis.... 2007. Leur enquête montre qu’en 2018, les pays membres de l’UE ont approuvé l’exportation de plus de 81 000 tonnes de 41 pesticides vers des pays à très grande majorité en développement.

Mortelles si on les inhale, provoquant des malformations congénitales, des troubles de la reproduction et du système hormonal, des cancers, contaminant des sources d’eau potable, ces molécules sont un véritable poison toxique aussi pour les écosystèmes végétaux. 

Les entreprises «criminelles», selon le mot du Genevois Jean Ziegler sont l’entreprise bâloise, Syngenta et la multinationale étatsunienne Corteva. L’une et l’autre ne sont pas européennes, mais ont un important réseau d’usines à travers le continent, notamment en France et au Royaume-Uni. Le paraquat, pesticide très violent, et l’atrazine sont fabriqués dans l’Hexagone sur des sites comme ceux de Saint-Pierre-la-Garenne et Saint-Aubin-lès-Elbeuf (Seine-Maritime) dont la localisation est peu connue du grand public. Dans l’enquête de 2018, l’ONG a mis en avant le rôle de Bayer et BASF, firmes allemandes, mais aussi des petites entreprises comme Finchimica (Italie) et Alzchem (Allemagne).

Les exportations européennes pèsent une part importante sur le marché mondial, jusqu’à 100% pour l’oxadiargyl, le propargite, l’éthalfluraline, le propisochlore et le zinèbe. 

Comment est-ce possible ? Les industriels ont découvert une faille dans le dispositif réglementaire, qui crée une distinction entre les produits pesticides et les substances actives qu’ils contiennent. Du coup, en 2023, la France a exporté près des deux-tiers des 7 300 tonnes de sa production toxique. Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, reconnaissait qu’une correction était nécessaire.

En vain. L’institut Veblen et le CCFD-Terre solidaire ont porté l’affaire au Conseil d’Etat et à l’ONU. A l’échelle européenne, la Belgique a renforcé l’interdiction depuis son pays, mais les autres pays n’ont rien changé malgré les négociations de 2024 sur le futur de l’alimentation. 

Le boomerang qui fait qu’on importe des produits contaminés aux pesticides (même en respectant les limites maximales de résidus) devrait faire réagir les populations européennes. Plus grave : un effet cocktail dérivant du fait qu’on mélange plusieurs produits toxiques, mais aussi l’absence de limites pour des produits d’alimentation animale, voire à usage énergétiques, comme le bio-éthanol. Tout cela échappe aux législations.

Cerise sur le gâteau : l’accord du Mercosur signé par von der Leyden en décembre 2024 devrait supprimer, s’il entre en application tel quel, les droits de douane sur plus de 90% de produits chimiques exportés d’Europe vers les pays latino-américains. La bataille n’est pas terminée. 

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Pour en savoir plus : Humundi SOS Faim

Le Congo face aux dangers des pesticides © Humani

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