Par la dissolution d’un collectif écologiste, Macron soutient les violences contre la Terre organisé par le système agro-industriel. Alors même qu’une nouvelle étude scientifique alerte les Français contre un réchauffement qui s’annonce pire que prévu. (Gilles Fumey)
Alors que la FNSEA a une longue histoire de destructions et de dégradations ferroviaires et routières (un péage détruit à l’explosif sur l’A9 en 1975), de barrages routiers, de lourds bilans (31 blessés chez les forces de l’ordre à Redon en juillet 1967), de mises à sac (un hôtel des impôts en 1982 à Châteaulin), le même syndicat parvient aujourd’hui à se ranger du côté de la police et réclamer l’interdiction de manifestations écologistes. Pire encore, le lobby agrochimique entretient toujours des formes de violences psychologiques, des intimidations comme en témoignent le cas d’une journaliste menacée récemment, ou celui d’un agriculteur charentais gagnant un procès contre Monsanto, agressé chez lui par des hommes cagoulés.
Aujourd'hui, les mobilisations contre les méga-bassines, le maraîchage industriel et les cimenteries signent de nouvelles formes de lutte pour des campagnes paysannes. Elles passent aussi par l’interdiction des Soulèvements de la Terre décidée par Macron qui soutient, finalement, la violence contre la Terre par le système agroindustriel.
Le gouvernement climatosceptique de Borne
Comment vaincre cette mauvaise foi et ce déni pratiqué à coup de bons « gestes-pour-la-planète » consistant, pour l’historien Johann Chapoutot, à « surtout ne rien changer à ce mode de vie meurtrier » ? Comment voir qu’il faut faire le contraire de ce qui est actuellement encouragé par un gouvernement climatosceptique : une décélération. Pour l’instant, c’est la réussite par la quantité « d’amis, d’argent, de voyages, de streaming, de projets » ? Comment freiner alors que tous les indicateurs des festivals, conférences, billets d’avion sont à la hausse ?
Comment faire comprendre que ce qui attend la France dans les prochaines décennies, c’est une température supérieure de 3,8°C à celle du début du 20e siècle qui va impacter, d’abord, l’agriculture industrielle et ses écosystèmes ? Voici la France engagée dans un réchauffement 50% plus intense que ce qui était prévu. Une équipe du CNRS, de Météo France et du Centre européen de recherche et de formation avancée en calcul scientifique[1]a modélisé la température moyenne de la France à partir des tendances actuelles d’émission de carbone.
Pour faire simple, on a utilisé les données climatiques pour contraindre les modèles comme le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) l’a fait dans son rapport de 2021. Les chercheurs disposent des données depuis plus d’un siècle. Et font des projections plus solides qui atténuent les incertitudes. L’intérêt de ce travail est de passer de l’échelle planétaire à l’échelon européen et méditerranéen. Avec des données fiables de trente stations météo en France depuis 1899.
Une première mesure avait calculé le réchauffement à 1,7°C de température moyenne supérieure à celle des trente premières années du XXe siècle. Soit, quand même, 0,5 point de plus que la moyenne du globe, plus basse du fait qu’on prend en compte les océans.
Aujourd’hui, on sait que la hausse des températures est proportionnelle aux émissions de gaz à effet de serre (GES) émises par les humains. L’étude montre le rôle des aérosols qui ont, jusque dans les années 1980, masqué le réchauffement climatique. Les aérosols sont issus de la combustion des carburants fossiles et ils limitent l’impact du rayonnement solaire à la surface du globe. Voici une pollution qui a un fort effet refroidissant. Jusque dans les années 1980, en grimpant ensemble, pollution et gaz à effet de serre s’annulaient. Puis, à mesure qu’avec de nouvelles technologies on a lutté contre la pollution pour une meilleure santé humaine, l’effet des aérosols sur le climat régresse et la courbe des températures s’envole.
Le climat demain
Pour décrire le climat demain, les chercheurs bâtissent des scénarios avec un état du monde en 2100. On va du très optimiste si on atteint la neutralité carbone en 2050, au très pessimiste si les énergies fossiles sont toujours utilisées (ce qui est le cas aujourd’hui, puisque leur usage augmente encore, en 2023), le tout avec de fortes inégalités. Un scénario intermédiaire où les émissions de GES stagnent au niveau actuel et où les grands pays émetteurs s’engagent à leur limitation.
Mais, dans ce scénario-là, la France de 2100 est devenue plus chaude de 3,8°C par rapport au début du 20e siècle. Les étés pourraient être plus chauds de 5°C en moyenne par rapport aux trente premières années du 20e siècle. Pics de chaleur, sécheresses : tout devient plus intense, se prolonge. Mettant en avant la question de l’eau.
Actuellement, les chercheurs travaillent à modéliser le climat région par région. Pour mieux sensibiliser les populations et faire davantage pression sur les politiques, particulièrement frileux en ce moment, au point que certains pourraient être comptés comme des climatosceptiques.
L’interdiction des Soulèvements de la Terre est une grave faute politique. Macron la paiera très cher. Son bilan, déjà catastrophique, portera cette énorme tache comme celle des gilets jaunes.
Le livre de Edouard Lynch, Insurrections paysannes, Vendémiaire, 2019. On y apprend que la FNSEA avait "symboliquement" arraché des plantations de sapins.