Au lendemain du choc électoral américain, à mon sens, de ce scrutin, trois enseignements me semblent à retenir dans la perspective de la Présidentielle de 2017 en France.
1 – La personnalité et les propos du candidat républicain ont été validés.
Quels que soient les propos nauséeux tenus à longueur de campagne, vidéo comprise, les refus opposés, les casseroles fiscales et frauduleuses révélées, quel que soit le ton pris par une personnalité égotiste et irascible qui ne maîtrise ni pulsion ni impulsions, quelle que soient les dangers qu'une telle personnalité devenue président avec tous les pouvoirs entre ses mains fait peser, il a été élu. Contre toute attente, le rationnel qui condamnait une telle candidature a été hors jeu. L'émotionnel a bousculé toute réflexion, libéré les passions, les colères, les haines. Que ce soit malgré ce langage de charretier ou grâce à ce langage, des millions d'électeurs ont validé cet homme dangereux, validé un changement de paradigme en élisant un inconnu en politique, amateur, outsider fort en gueule et en coup de menton. Tout ce qui, a priori, le condamnait, au nom de valeurs de sociabilité commune, ne l'ont pas desservi voire même ont favorisé une adhésion à ce ton, à ce langage, à ce programme-slogan. D'autres, dans l'Histoire, ont eu ce profil pour notre grand malheur !
2 – La non-adhésion et le rejet de la candidature Clinton
La carrière, la personnalité, les soutiens de Wall Street et de la presse, les casseroles diverses de sa compétitrice Hillary Clinton ont découragé nombre d'électeurs d'Obama à voter : malgré son expérience politique, malgré son punch lors des débats télévisée, malgré ses positions sur l'immigration en particulier, elle n'a pas pu mobiliser parce que perçue comme représentante d'un système verrouillé qui suscite le rejet sinon la haine, comme responsable d'une situation globale voulue par la finance et la mondialisation accélérée ; certainement la plus mauvaise des candidates, hélas !
3 – Un candidat vu comme anti-système, bon cheval pour un coup de balai.
Trump a pu se donner une image d'homme libre d'un système honni par beaucoup. Sa richesse de milliardaire (qui n'est pas celle d'un self made man), le lâchage de responsables républicains en fin de campagne ont même renforcé cette image anti-système. Ce vote est un sérieux coup de balai, revanche des « petits » contre un système-cancer.
Considérons à cette aune la situation française à la veille de notre échéance présidentielle
Par les affaires toujours plus nombreuses, les fraudes en tous genres, l'impunité, la corruption, le carriérisme interminable, la classe politique française s'est toujours plus déconsidérée. De Sarkozy à Hollande, la coupe est pleine pour toujours plus de français : droite ou gauche, pas mieux !
Sans nuance, cette classe politique est rejetée dans son ensemble, avec dégoût et colère par beaucoup de nos concitoyens quand le FN surfe sur ce sentiment en chevalier blanc vs peste brune. Cette disqualification s'est élargie à un ensemble appelé « système » où les organismes de contrôle notamment, sont minés par les conflits d'intérêt (par exemple dans le nucléaire, la santé, l'agro-alimentaire) qui sont souvent des corruptions cachées déniées mais évidentes pour le peuple. Le « Tous pourris » d'extrême-droite a fait et fait beaucoup de dégâts quand à longueur de journaux, de journée tombent les faits de corruption, de fraude, d'enrichissement etc...
Ce monde apparaît comme une écurie d'Augias qui réclame un homme providentiel, celui ou celle qui apparaîtra anti-système pour donner un coup de balai. Le peuple n'attend plus rien c'est dire que celui ou celle qui saura séduire par tous les moyens deviendra providentiel et raflera la mise. Providentiel ? Quelle connerie dangereuse ! C'est l'aventure !
Tous les candidats potentiels (primaires droite et gauche, écolo, confondues) apparaissent comme liés au système, prompts à oublier tout engagement de campagne, où personne ne s'impose comme leader mais comme chef de clan inapte à entraîner un mouvement populaire.
En 2017, il est vain d'attendre un rejet de cette candidature par la peur d'un profil extrémiste, d'une personnalité douteuse, d'un programme électoral bancal ou franchement délirant. En clair, la candidature Le Pen ne sera pas rejetée par peur du FN, de sa candidate, de son programme y compris si ses thèses ne plaisent pas, y compris si l'électeur ne croit pas non plus à ses promesses. Au contraire : plus elle s'affirmera virulente, plus elle captera d'électeurs écœurés. La voie moyenne a perdu d'avance. L'élection américaine renforce le danger d'une présidente Front National (et la ruée des courtisans après). M.L.P attend son heure au-dessus de la présente mêlée.
Le ras-le-bol du peuple est à son comble après les quinquennats successifs de Sarkozy et de Hollande. Cette Présidentielle pourrait être l'occasion d'un grand coup de balai même à se jeter dans les bras du pire comme l'a été, en définitive, l'élection américaine. Le pire ne serait pas évité si la candidate FN, sans même être élue, atteignait un score très élevé et un nombre de députés conséquent qui pourrait constituer le premier groupe parlementaire d'opposition.
Est-il encore temps de se battre sur des valeurs authentiquement de gauche à l'opposé du déni et du mensonge de ceux qui nous gouvernent depuis cinq ans ? Oui ce combat est à mener non pour un homme providentiel mais pour reconstruire une alternative qui n'existe plus, pour une rupture avec un système démocratique et économique perverti par le mensonge et la corruption en refondant la République. Faute de celle-ci, l'autre rupture serait celle que nous promet l'extrême-droite et l'internationale du brun et du noir que l'Histoire de France a connu. Le temps est compté. Nous sommes entrés dans le tunnel des jours sombres. L'exaspération est telle que tout peut arriver.