Georges de Furfande

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Billet de blog 1 juin 2011

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Affaire Tapie/Lagarde : , application de la loi, échec à la loi et fraude à la loi

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Cela fait maintenant 20 ans que la Cour d'Appel de Paris puis la Cour de Cassation ont effacé du droit interne français une notion qui était fondamentale dans l'application de la loi, celle de fraude à la loi. Dans l'affaire Pinault/Printemps la Cour d'Appel de Paris, puis la Cour de Cassation, ont mis fin à la jurisprudence Barilla, qui protégeait une application de la loi conforme à son esprit. En avalisant un montage qui était une fraude manifeste à la loi boursière, la Cour d'appel et la Cour de Cassation ont ouvert les vannes des montages destinés à contourner la loi. Cette jurisprudence a permis le développement de techniques comptables, financières et juriqiues, qualifiées de créatives et d'innovantes alors qu'elles n'étaient que frauduleuses. Cette jurisprudence a par ailleurs accompagné les dispositions législatives de la loi Badinter (l'ancien associé de Jean Louis Bredin dans ce qui était le cabinet Bredin Badinter ) qui, en matière de procédures collectives, permettaient toutes les pratiques illégales en supprimant les possibilités de recours, seul le Ministère Public pouvant exercer les recours. Tout ceci a permis le développement en toute impunité d'un affairisme mêlant politiques, haut fonctionnaires nommés dirigeants des entreprises publiques et en particulier des banques publiques, magistrats (avec le développement de l'arbitrage avec nomination à cette époque de magistrats en exercice) , juges consulaires, avocats et auditeurs. Les réseaux d'influence se sont renforcés . Le pouvoir économique et financier s'est développé en intégrant le pouvoir politique. La doctrine du ni-ni a amené une dénaturation de la notion d'actionnariat, qui a amplifié un dévoiement de la protection des actionnaires pour en faire uniquement un concept de valorisation des fonds investis dans l'entreprise, au dépens des salariés et actionnaires réels et en saignant l'entreprise. La spoliation de l'épargne au profit des financiers a accompagné le développement d'un capitalisme financier imposant les délocalisations et l'externalisation . La banque industrie a été en fait une facette de ce parasitage de l'industrie par la finance. La jurisprudence a couvert de plus en plus les pratiques abusives des banques au dépens des entreprises.

Les scandales qui ont été la conséquence de ces dérives n'ont pas été sanctionnés, l'impunité des dirigeants coupables de ces dérives a été quasiment totale. Le législateur a cherché à masquer le plus possible les pertes causées par ces dérives qui ont causé des crises immobilières, financières et économiques.

Le véritable échec à la loi , c'est celui qui résulte de toute cette évolution jurisprudentielle et législative qui favorise les techniques de fraude et d'évasion fiscale , la spéculation financière (en particulier à des fins de blanchiment ) et la spoliation des épargants, travailleurs et clients des banques .

La sanction de pratiques avec des montages frauduleux, des violations évidentes de la loyauté à l'égard du client et des techniques de communication destinées à tuer moralement celui qui ne se laisse pas tuer financièrement, n'étaient pas un échec à la loi. C'était au contraire une application de la loi où le droit a une composante morale, où la justice inclut l'équité. On comprend facilement pourquoi tous ceux qui ont été coupables de ces dérives frauduleuses cherchent à remettre en question de telles sanctions.

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