L'ouvrage de Nassim Nicholas Taleb est un ouvrage pour niais. Il répond à l'arrogance des experts qu'il dénonce par la suffisance d'un pragmatisme dogmatique.
Dès le début du livre, l'insuffisance de la réflexion est évidente. Il est manifeste que l'auteur ne réfléchit qu'en terme de "preuve empirique" et non de "preuve rationnelle", la seule qui soit une véritable " preuve". L'adage "l'exception confirme la règle" , qui semble indiquer que le Cygne Noir confirme la règle que les Cygnes sont tous blancs , est une déformation de l'adage latin "exception probat regulam" , l'exception permet de tester, d'éprouver la règle logique. Lorsqu'il s'agit d'une règle empirique, les cas exceptionnels ne sont pas une infirmation de la règle, conformément à l'adage tel qu'il a évolué " Exceptio probat regulam de rebus non exceptio".
Le Cygne Noir aurait pu être une aberration statistique, cette coloration aurait d'ailleurs été parfaitement prévisible comme toutes les occurences de formes mélaniques . Il s'agit d'une sous espèce , qui est contrairement à ce qu'écrit l'auteur un très bel oiseau qui a d'ailleurs été introduit en dehors d'Australie et que l'on trouve en France comme oiseau d'ornement.
La connaissance de la réalité n'est pas simplement un apprentissage empirique et l'attente n'est pas simplement créée par l'observation . Elle doit résulter du raisonnement.
Lorsque la compréhension du monde est uniquement fondée sur des déductions empiriques, il est clair qu'elle est peu propice à la qualité de la prévision.
L'auteur du Cygne Noir, dans cette ligne empirique, croit trouver la source de l'incertitude dans l'imprévisibilité, en ignorant les limites de la connaissance et du raisonnement.
Si l'on prend son exemple du 11 septembre 2001 il affirme que "si l'on avait pu raisonnablement en concevoir le risque le 10 septembre 2001 il ne serait pas arrivé. Les prémisses sont fausses, la conclusion est fausse. L'utilisation d'un avion pour commettre un attentat terroriste en le faisant s'écraser était parfaitement prévisible : la bande à Bader, les terroristes algériens par exemple en avaient conçu le projet et un roman l'avait utilisé comme scénario. L'endroit exact de l'attentat était parfaitement prévisible : dans le procès de l'attentat terroriste dans les parkings du World Trade Centequi avait eu lieu quelques mois plus tôt le procureur pour démontrer les risques considérables d'une explosion dans le World Trade Center avait versé au débat une étude technique démontrant que l'immeuble se serait écroulé si la bombe avait été placée dans les étages où les avions se se sont écrasés. Pour que les avions s'écrasent exactement à cet endroit il suffisait , comme ce fut fait par les terroristes, de placer un walkie talkie qui allait servir de balise de guidage. On sait que les leçons de pilotage prises par les terroristes avaient attiré l'attention des services américains.
Les attentats étaient parfaitement prévisibles, ce fut la réflexion et l'estimation des risques qui a été déficient.
Affirmer comme le fait l'auteur qu'un évènement se produit "précisément parce qu'il n'était pas censé arriver" est fallacieux
Il est en effet parfaitement inexact de dire que si le tsunami avait été attendu , il n'aurait pas causé autant de dégats en prétendant que "les zones touchées auraient été moins peuplées, un système d'alerte aurait été mis en place" et que "ce que l'on sait ne peut pas vraiment faire de mal". La probabilité d'un tsunami était parfaitement connue, le tsunami a été détecté à son origine, et il est évident que le problème était qu'il n'y a pas eu de relais de l'information , et même des personnes qui auraient pu réagir en voyant au loin la vague ne l'ont pas fait. En tout état de cause , en dehors de la zone d'hotels touristiques, les habitants et en particulier les pêcheurs n'ont d'autres choix que de braver l'inéluctable.
Il y a des erreurs de prévision, mais il est faux d'affirmer une incapacité de prévision promue en évidence absolue.
Contrairement à ce qu'affirme l'auteur les découvertes ne sont pas dues à l'accumulation d'expositions au hasard, au Cygne Noir. Il y a une part de chance dans la recherche, mais il est parfaitement inexact de dire "qu'il n'y a quasiment pas de découverte ni de technologie d'importance qui aient été intentionnelles et planifiées". Si l'on va de Pasteur par exemple aux Prix Nobel scientifiques, tous ont agi dans la cadre d'une démarche réfléchie et consciente. Ce qui est important ensuite s'est de garder un esprit ouvert et de s'étonner.
De façon générale l'auteur ne se situe que dans une analyse probabiliste du monde. Lorsqu'il parle de "la courbe en cloche, cette grande escroquerie intellectuelle", il démontre à quel point il manque de culture scientifique et philosophique. L'incertitude n'est pas que hasard, la science moderne essaie de comprendre la part de déterminisme et la part de probabilisme dans la nature. Le principe d'incertitude démontre les limites structurelles à la connaissance empirique qui n'a rien à avoir avec la probabilité, les phénmènes fractaux ne se comprennent que dans une analyse quantitque et non ondulatoire, la théorie du chaos reflète tant le principe d'incertitude que cette double caractéristique de la nature. La physique des superfluides démontre que la nature connait des phénomènes téléologiques.
Si son auteur en est resté au Cygne Noir, c'est que la réflexion philosophique et scientifique qu'il souhaite mener doit le conduire à d'abord compléter ses connaissances.