Dans une interview au Monde, le Président du Tribunal de grande instance se plaint que "des principes fondateurs de notre démocratie ont été malmenés" .
Pour illuster son propos il déclare" A l'origine, il y a le fait que des conversations à caractère privé, dans un lieu privé, ont donné lieu à des enregistrements clandestins et que ceux-ci ont été publiés. C'est un premier principe fondamental, l'intimité de la vie privée, qui a été mis à mal. Il ouvre la voie, si on ne le défend pas, à des enregistrements pirates au préjudice de tous, à n'importe quelle occasion, pour tenter de démontrer n'importe quoi." On comprend facilement pourquoi le Président du Tribunal de grande instance cherche à donner à l'intimité de la vie privée un caractères sacramentel, dont il faut reconnaitre qu'il est assez largement consacré par la jurisprudence française. Le parti pris du propos, et son caractère contestable, apparait à la fin de l'affirmation, lorsqu'il parle de "tenter de démontrer n'importe quoi". Lorsqu'il s'agit de délits civils ou pénaux qui par essence sont commis dans le cadre de la vie privée, ériger de façon absolue le principe de l'intimité de la vie privée ne peut qu'empêcher de dénoncer par exemple des violences conjugales, des actes de pédophilie ....ou des actes d'abus de faiblesse. L'enregistrement, sonore et le cas échéant video des faits critiqués est la seule façon objective d'apporter la prevue des actes fautifs ou illicites, tout effort de preuve de faits commis dans l'intimité ne peut que violer l'intimité.
Par ailleurs le magistrat déclare que "Parmi ces conversations figurent les échanges d'une personne - Liliane Bettencourt - avec ses avocats et avec son notaire. C'est une deuxième violation d'un principe essentiel que les magistrats et les avocats doivent respecter, faute de quoi le risque existe de voir les libertés individuelles réduites comme peau de chagrin. Faut-il rappeler que les Etats totalitaires sont ceux qui ne respectent pas la confidentialité de la relation entre un avocat et son client ?" On présume que le magistrat n'est pas savoir que la confidentialité des échanges avec l'avocat ne peut protéger les propos confidentiels démontrant la participation de l'avocat à des actes illicites , or les propos en question se rattachaient potentiellement à la commission d'actes de fraudes fiscales, de subornation de témoin et de complicité d'escroquerie.
Il y a en France depuis la collaboration avec le régime nazi une phobie de tout ce qui peut paraitre une "dénonciation" , sans que souvent on ne tienne compte des autres intérêts en présence. La préservation à tout prix des "secrets de famille" est une préoccupation qui est encore très vivace, mais elle est signe d'obscurantisme, et non de préservation des libertés individuelles.