Reflet des mouvements d'idées qui traversent le site comme l'actualité, le Club de Mediapart s'interroge sur le débat sur l'identité nationale lancé par le gouvernement, comme sur les enseignements à tirer du vote suisse venu télescoper les projets du ministre Eric Besson.
Deux jours avant le vote suisse de refus des minarets, Samuel Dixneuf s'interrogeait: «Et si on parlait de l'identité nationale suisse?» On en parla... et pas que dans les Alpes. Pour Rachid Benzine, chercheur associé à l'observatoire du religieux à l'Institut d'études politiques d'Aix-en-Provence, «l'islam et ses expressions sont devenus une préoccupation centrale». Et en Suisse comme dans les pays qui l'entourent, «l'islam fait désormais partie de (la) réalité. Le nier, c'est refuser de s'accepter (...). C'est s'enfermer dans une identité rêvée, une identité sclérosée.»
Le DijonScope a rencontré Jean-Jacques: «Et si l’on débattait des droits humains plutôt que de l’identité nationale ? cela serait plus approprié. Comme un certain nombre d’êtres humains, ce Dijonnais est Citoyen du Monde. Pour lui, l’Homme se définit avant tout par son appartenance au genre humain.» Un autre jour, sa rédactrice en chef, Sabine Torres, conclut ainsi sa «reprise» du Déserteur de Boris Vian, à l'adresse de Nicolas Sarkozy:
«Posez-vous cette question :
Qu’est-ce qu’être Président
D’une identité nationale ?»
Plutôt que de l'identité elle-même, Eric Fassin , sociologue, propose qu'on débatte de la politique de l'identité nationale : «L’objet de ce second débat, ce ne serait pas tant de dénoncer une intention électoraliste évidente (« politicienne ») que de prendre pour objet la politique d’un ministère» .
Pour les deux anciens ministres socialistes Marie Noëlle Lienemann et Paul Quilès , la gauche ne doit pas déserter le débat mais le retourner en sa faveur: à elle de «répondre aux incertitudes nationales et démontrer que la politique du gouvernement est fondée sur l'exaltation des différences, la compétition entre groupes et communautés, le creusement des inégalités», affirmaient-ils dans une tribune publiée le 18 novembre.
Mathieu Potte-Bonneville , enseignant de philosophie, dénonce «le renversement systématique des composantes de la citoyenneté en autant de critères d’exclusion»: «Parce que, surtout, l’ouverture, la tolérance et l’égalité, constitutives de notre identité nationale, seront présentées et utilisées comme elles le sont depuis 2007 : comme autant de valeurs fragiles qui exigent une sélection d’autant plus sévère de ceux qui, présents sur notre territoire, pourraient être suspects de ne pas les partager», à Eric Besson et sa question «qu'est-ce qu'être français?», il faut répondre «Cela ne vous regarde pas» .
Pascal Mournard redonne vie à l'appel lancé en juin 2007 par le réseau scientifique Terra: «Identité nationale et immigration : inversons la problématique !» Dix-huit mois plus tard, le souhait d'ouvrir «un vaste chantier national de recherche, de débat et de réflexion sur les origines des nationalismes, xénophobies et discriminations ainsi que sur les causes de leurs réapparitions périodiques dans l’histoire de l’humanité» est devenu urgent.
Dès la mi-novembre, Jacky Dahomay , professeur de philosophie à la Guadeloupe, ancien membre (démissionnaire) du Haut Conseil à l'intégration, prophétisait : «En lançant donc le débat sur l'identité nationale, Sarkozy et Guaino savent bien que l'opposition de gauche est faible sur ce sujet. Mais il se pourrait qu'ils soient rusés par l'histoire car un tel débat peut être l'occasion d'une authentique mobilisation de la société civile pour rompre l'hégémonie qu'exerce sur elle le pouvoir en place».
NB: Vous êtes nombreux à vous demander pourquoi des signatures "fantaisistes" apparaissent dans l'appel de Mediapart . Le module de signature étant ouvert, il est inévitable que certains en jouent: c'est le cas par exemple de Jean Deux Gaulle... De notre côté, nous effectuons une modération a posteriori sur ces identités improbables pour ne garder que les personnes qui ont indiqué leur nom et prénom et un email valide.