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Billet de blog 21 mars 2016

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« Cohn-Bendit : le couteau suisse de la politique ! »

Loi El Khomri: Compromis? ou sape des piliers de la République?

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« Cohn-Bendit : le couteau suisse de la politique ! »

Daniel Cohn-Bendit  : "Et si on arrêtait les conneries, plaidoyer pour une révolution politique" (mars 2016, Fayard).

Un compromis avec les fondements de la République

Le fameux idéologue révolutionnaire, émeutier,  de mai 68, avait contribué à mettre la France sens dessus dessous, au prétexte qu’il lui était interdit d’accéder au dortoir des filles. Depuis la parution de son dernier livre, il est invité de tous les médias. Le personnage, avec sa faconde rigolote, a toujours dit   (http://www.lefigaro.fr/politique/2009/08/20/01002-20090820ARTFIG00236-cohn-bendit-un-touche-a-tout-libre-.php),  que son rêve, c'était d'être le plus polyvalent possible, vis-à-vis de la politique». Il se rêve en couteau suisse de la politique, comme les patrons rêvent d’employés flexibles, qu’ils pourraient affecter de façon souple et réversible à différents postes, à des horaires disparates etc.

Il explique donc que la révolution… c’est le compromis ! Pourtant -cela va peut-être sans dire, mais cela va encore mieux en le disant, et même en le soulignant-  le compromis peut valoir, sur le plan technique, ponctuel, partiel, mais comment abandonner quoi que ce soit des « Droits de l’homme », ou du préambule de la Constitution de 46, parties, avec  la Constitution de la Vème République, du « bloc de constitutionalité », c’est-à-dire de l’ensemble des principes et des valeurs devant lesquelles toute Loi doit s’incliner ? Ainsi peut-on lire, dans le préambule de 46, : « Tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises. » Doit-on concéder, alors, à MM. Cohn-Bendit et Hollande, Gattaz, à la CFDT, que l’employeur puisse se dispenser de l’avis des syndicats, livrant, par référendum interne, la décision des salariés à la seule propagande des informations télévisées et radiophoniques, elles mêmes aux mains de grands patrons ?

Le droit à la sureté, « imprescriptible »,  est inscrit dans l’article 2 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen en 1789. A l’époque, ce droit venait remplacer l’arbitraire des lettres de cachet qui, sous l’Ancien Régime servait à la transmission d’un ordre du roi, permettant l'incarcération sans jugement, ou l'exil, de personnes jugées indésirables par le pouvoir. Cette sûreté est le sentiment que l’on  vit dans des conditions de stabilité qui permettent de donner du sens à son travail, d’envisager sereinement un avenir, pour soi, sa famille. Ce droit à la sûreté, à la dignité,  est donc, aujourd’hui, garanti par la Constitution. Imprescriptible, « Il précède toute autorité civile (qui n’a pas de prise sur lui), que cette autorité soit liée à la force ou contenue dans un contrat. »Doit-on concéder à MM. Cohn-Bendit, Hollande, Gattaz, et à la CFDT, à qui que ce soit, le privilège de passer un compromis avec les fondements de la République française, de les saper, pour que l’employeur puisse, enfin, licencier à son aise ?

Le PS, depuis 1983, s’est converti à la pensée unique.

Le seul compromispossible  avait été trouvé au lendemain de la Seconde guerre mondiale par la mise en pratique des théories de Keynes : économie capitaliste, certes, mais orientée et règlementée par l’Etat. Depuis mars 1983, en France, les socialistes ont opéré un virage à 180° par rapport au Programme commun, pour lequel ils avaient été élus. Et il n’y a de compromis nulle part : le PS se rend en rase campagne au capitalisme occidental, décidant « le tournant de la rigueur ». Comme au XIXème siècle, les riches industriels poussaient des cris d’orfraies : en  diminuant le travail des enfants, on allait à la ruine. Le patronat et ses hérauts serviles martèlent depuis toujours qu’en rendant plus facile les licenciements, les embauches seront « naturellement » plus nombreuses ! Le recours au contrat à durée déterminée et à l’intérim, le travail à temps partiel, vont donc être  facilités.Bien entendu, on admet aussi, avec le patronat, que le coût du travail est trop élevé, principale raison du chômage. Pas de compromis alors mais –déjà !- des guirlandes de cadeaux aux entreprises : primes à l’emploi, subventions, exonérations de charges, réductions d’impôts, et l’Intérim prend vraiment son envol, surtout dans les BTP. Non, pas de compromis : on libéralise, on privatise, et on dérèglemente. On vend donc les biens communs des Français : TF1, Suez, Thomson, 36 banques, des assurances, etc. l’Etat-Providence des riches va prendre racines et, dans ce  mariage de la carpe et du lapin, des soins palliatifs vont être réservés aux salariés et aux chômeurs car, évidemment, le chômage, qui s’élevait à 7,3 % en 83, ne va pas cesser d’enfler jusqu’à aujourd’hui (10%).  

Le tapis de velours se déroule tranquillement devant le FN.

 Ce dernier l’a parfaitement compris : paisiblement, silencieusement désormais, il « est » la « troisième voie ». Saoulée  par les terminologies nomades, les auto-proclamations, étiquettes fantaisistes, promesses mensongères, compromissions, bricolages et autres  manipulations vouées au capitalisme désormais mondialisé, la proportion de Français qui doutent aujourd’hui de l’importance d’une démarcation  nette entre la droite et la gauche ne cesse, en effet, de grandir. En novembre 2001 (Sofres), alors que la gauche est au gouvernement depuis plusieurs années, 45% des sondés disent partager cette appréciation. Encore plus impressionnant, le résultat (septembre 2010) du sondage Gabriel Péri/Sofres : à la question « Faites vous confiance à la gauche, à la droite, ou à personne ? », 16% accordent leur confiance à la gauche, 13% à la droite, et 69 % (!) : « ni à la gauche, ni à la droite » !

M. Cohn-Bendit évite soigneusement de se poser en adversaire déterminé du capitalisme mondialisé. Il se revendique simplement bricoleur de gauche et de droite : « polyvalent ». Pagliacci  de l’opéra italien, il est évidemment prisé par les médias : c’est un bon client, à l’aise dans le grand fleuve de la pensée unique, bricolant les berges, allègre et goguenard, sans jamais tenter d’en modifier le cours.

GR.

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