La mort est le mur à travers lequel on passe dans un sens, mais jamais dans l’autre. La mort, le christianisme l’a installée dans le cœur des hommes parce qu’ils ont su montrer que cet ennemi avait été surmonté, une fois, par le Christ. Cette annonce met en place une éternité à venir, mais immédiatement active. Quoique apparemment restée insurmontable depuis, elle est cependant vaincue virtuellement par la foi qui inscrit l’éternité dans le moment vécu de la prière. Les trois extases temporelles que sont : passé-présent-futur, enroulées l’une sur l’autre, forment très vite une trame imaginale excessivement solide. C’est cette conception de la mort qui se décompose sous nos yeux, dans nos vies et se recompose à partir de fils nouveaux.
Les fils nouveaux ressemblent à ceux qu’ils remplacent ou du moins trouvent en eux leur point de départ et pourtant la torsion qu’ils inventent n’a plus rien à voir avec celle qui jusqu’ici a constitué le cadre de référence du mode de pensée porté par la conscience.
Il nous faut ici observer en détail ce qui est en jeu dans ce remplacement ou ce glissement qui nous fait passer d’une trame imaginale à une autre. Et ce détail, si l’on peut dire, est bien lié à la question de la mort. Mais la mort n’est plus pensée en tant que question métaphysique préférée des humains, mais en tant qu’engagement des corps et des pulsions dans la bataille pour la domination des esprits.
C’est à un changement de statut et de fonction de la mort, ce grand obstacle à la possibilité d’une éthique, que l’on assiste tout particulièrement dans trois épisodes de la saison 7, Des gens ordinaires (S7E1), USS Callister : au cœur d’Infinity (S7E6) et enfin, De simples jouets (S7E4).
La mort en direct de jean Pormanove témoigne, s'il en était besoin, que cette mutation est en cours et que le monde de la bonne vieille conscience est en cours de remplacement. Jouer est le mode même dans lequel nos existences s'inscrivent et dans le jeu la mort réelle n'est plus qu'un moment d'une série infinie de morts possibles que chaque joueur a déjà vécu au cours des parties qu'il a pu effectuer par écrans interposés. La mort dite "réelle" n'a plus d'importance puisque immédiatement de nouveaux joueurs sont là qui offrent leur vie avec joie à la dévoration par ce dieu invisible et partout présent à travers les écrans.
Black Mirror ou la dans des images sur les ruines de la conscience, Jean-Louis Poitevin,
Agrandissement : Illustration 1
Les éditions du chien qui passe