Décor : un palais, une cour aux fins graviers blancs, des limousines de ministres, des scribes pressés de trouver l’abri des ors pour poser la délicate partie de leur postérieur sur des chaises aussi dorées qu’inconfortables, style en pire. La salle défaite du palais du petit homme de taille moyenne a été préparée par une armée de majors d’hommes en frac sans trop dépenser de fric. On a rangé les ministres et secrétaires dans un coin, dans l’axe de la caméra trois, celle qui capte les sourires de complaisance.
Mais il pleut sur Paris. Un major d’homme est préposé para-pluie, exclusivement réservé à la descente des ministres et au gravissement du perron du palais du petit homme de taille moyenne.
Pas de périptère et encore moins de péristyle pour protéger de l’orage subit les scribes et gloseurs qui contournent le balai des limousines. On peut distinguer le rang des ministres intègres à la couleur et à la longueur des capots lustrés. Et vient alors la surprise que la caméra une saisit sans férir, la grise de Bercy déverse deux ministres par mesure d’économie…Un petit coin de parapluie pour deux…
Retour à la caméra deux qui balaie les travées de la salle défaite du palais du petit homme de taille moyenne. Pas facile sera l’expression du jour. Pas facile de masquer les chaises vides. Les caméras un deux trois attrapent furtivement des images des alcôves de cette salle défaite. Au fond, parqués là, en rangs serrés les foutugraphes se pressent. On peut aussi apercevoir quelques caméscopes dont les vidéos seront bien vidées quelque part ?
Il est l’heure. On attend. La caméra deux attend et vise le fond du couloir. Plan furtif des breloques d’un aide de camp dans le vestibule. Question pendule dans le vestibule, le petit homme de taille moyenne sait qu’il faut faire attendre. Comme en amour tout est dans les préliminaires. Se faire désirer c’est deux points retrouvés…
Et le voilà le petit homme de taille moyenne, il arrive, de là-bas au fond du couloir, clopinant vu de face, à pas comptés, ni trop lents ni trop pressés.
Signe prémonitoire, c’est en grand uniforme que l’aide de camp du petit homme dépose le discours sur le pupitre. En off, c’est comme ça qu’ils causent les filmeurs, on nous précise que c’est le bon pupitre, celui qui ne risque pas de verser, de balancer. Un pupitre solide comme la République.
C’est pas facile. C’est pas facile ! C’est pas facile mais j’ai décidé d’aller frapper là où ça fait mal. Guerre à la dèche, guerre à ces méchants sans loi mais avec foi. Du pâté j’en ferai et j’en avertirai le parlement pour qu’il vote sans loi mon pâté de foie.
C’est pas facile mais avec l’autre petit homme nommé premier ministre nous ferons, c’est pas facile, les réformes, c’est pas facile, qu’il faut faire. Promis croix de bois croix de fer. Et pour faire, c’est pas facile, je serai petit homme de taille moyenne jusqu’au bout de mon mandat et na et na ! Et tous de l’ENA de jubiler sur leurs chaises dorées mais qui font mal aux nobles fesses tant diplômées et certifiées.
Et maintenant, j’ai promis de pas rentrer tard ce soir, si vous avez quelques questions ?
La caméra deux filme la main qui se précipite pour donner un micro à l’envoyé de la 2.
Monsieur le petit homme de taille moyenne, votre cote est aux abysses qu’en pensez-vous ?
- C’est pas facile
Au tour de l’envoyé de la Une :
- Monsieur le petit homme de taille moyenne, pensez vous à 2017.
- C’est pas facile, mais avec le petit homme nommé premier ministre nous irons au bout du bout, au terme de nos mandats.
Et puis défilent les envoyés des continues déchainées. C’est pas facile…
Enfin une femme se lève et ose : Monsieur le petit homme de taille moyenne que pensez- vous du livre de la femme répudiée.
- C’est pas facile, mais je n’en dirai pas plus, j’ai déjà pleuré dans mon casque…
- Je vous remercie de ne plus me poser de questions, j’ai promis de ne pas rentrer tard !
Dehors le perron baigne dans un soleil revenu. Les limousines défilent au rythme des ministres. La plus grosse, noire absorbe ses deux préposés aux finances. C’est juste un quatre X quatre pour deux, mesure d’économie !