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Billet de blog 15 juin 2015

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Interdire le glyphosate ? Bien ! Faire respecter la réglementation actuelle ? Mieux.

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La ministre de l'Ecologie, Ségolène Royal, a déclaré le 14 juin 1 vouloir obtenir l'interdiction à la vente aux particuliers des préparations phytosanitaires à base de glyphosate, le désherbant commercialisé notamment par Monsanto sous l'appellation Roundup 2. On ne peut que se réjouir d'une telle position. Pour autant, on est en droit de ne plus attendre que cette prise de conscience politique se traduise dans les faits, tout particulièrement en matière de respect de la réglementation existante, domaine régalien par excellence. Or la France ne fait pas respecter sa réglementation, et ce depuis juin 2011, ce qui l'expose à une condamnation au niveau européen, accompagnée d'une lourde amende.

En effet, depuis le 27 juin 2011 3, la réglementation française interdit l'usage des produits les plus dangereux pour la santé humaine – dont les désherbants contenant du glyphosate, comportant plusieurs phrases de risques autres que celles portant sur les atteintes à l'environnement 4 – dans une série d'espaces et à 50m autour d'eux, espaces fréquentés par les personnes les plus fragiles (jeunes enfants, adolescents, personnes âgées ou malades) : hôpitaux, cliniques et maisons de retraites, cours de récréation et enceintes des établissements scolaires, crèches, haltes-garderies et centres de loisirs, aires de jeux destinées aux enfants dans les parcs, jardins et espaces verts ou encore terrains de sport et de loisirs ouverts au public…

Pour les seuls produits encore autorisés, les zones traitées - trop souvent encore les voiries et trottoirs, sur lesquels le produit appliqué ruisselle à la première pluie jusque dans nos rivières - doivent obligatoirement faire l'objet d'un balisage et d'un affichage signalant l'interdiction d'accès au moins 24 heures à l’avance et pour une durée définie selon le produit (6h minimum, jusqu’à 48 heures pour certains). L'affichage doit préciser le produit utilisé, la date de traitement et la durée d'éviction du public. Le non-respect de cette réglementation expose de manière conjointe applicateurs et donneurs d'ordre (élus, techniciens, entreprises prestataires...) au risque de poursuites judiciaires au pénal et non devant lle triibunal administratif.

En clair, si vous habitez à moins de 50 m d'un des équipemenst publics ou privés cités plus haut, et si votre commune asperge de désherbant le trottoir devant chez vous sans avoir la veille affiché son projet et/ou juste après l'application empêché l'accès du public pendant au moins 6h par un barrièrage ou balisage ad hoc, celle-ci agit dans l'illégalité et vous pouvez vous retournez contre elle. Les communes ont été largement informées de leurs obligations en la matière, notamment par les préfectures 5.

Or, la connaissance fine des pratiques des collectivités sur les espaces dont elles ont la gestion (zones non agricoles, désormais désignées dans le plan Ecophyto comme Espaces verts et Infrastructures) montrent que ces dernières sont extrêmement rares à respecter la loi en la matière. Des contrôles des pratiques des collectivités comme des bailleurs ou des syndics de copropriétés, suivis d'une transmission immédiate au Procureur de la République des infractions constatées, aboutiraient très rapidement à une modification des pratiques de ces acteurs.

La plupart des collectivités pionnières en la matière ont choisi le « zéro pesticide » 6, par choix politique ou pour se mettre en conformité. Certaines à l'instar de la Ville de Pau 7 ont choisi de respecter scrupuleusement la loi lorsqu'elles estiment ne pas pouvoir se passer de désherbant dans des cas particuliers, comme l'entretien des cimetières.

Il est de la responsabilité de la ministre de l'Ecologie, en s'appuyant sur les ministères de l'Intérieur et de la Justice, d'obtenir le respect immédiat de la réglementation en zones non agricoles. Nul doute que cela aura un effet d'entraînement rapide et puissant sur les pratiques en milieu agricole, dépendante aussi de la demande des citadins !

1 http://www.francetvinfo.fr/france/le-roundup-dans-le-collimateur-de-segolene-royal_951581.html

2 « J'ai demandé aux jardineries d'arrêter de mettre en vente libre le Roundup de Monsanto » citée par Le Point http://www.lepoint.fr/environnement/l-offensive-de-segolene-royal-contre-le-roundup-de-monsanto-14-06-2015-1936364_1927.php

3 http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000024404204&categorieLien=id

4 http://e-phy.agriculture.gouv.fr/spe/7400057-4270.htm

5 Par exemple en ïle-de-France, par Natureparif et par le Préfet de Région http://www.natureparif.fr/images/stories/Reglementation_zeropesticide/2-notice-explicative.pdf

6 Dès 2010, Strasbourg atteignait le « zéro pesticide » total : http://www.strasbourg.eu/environnement-qualite-de-vie/nature-en-ville/zero-pesticide

7 http://www.pyreneesinfo.fr/actu/lactu-de-pau-dans-les-cimetieres-de-la-ville/47545/

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