En Italie, une loi qualifiant la gestation pour autrui (GPA) de « crime universel » est entrée en vigueur lundi 18 novembre 2024, après sa publication au Journal officiel italien (Gazzetta Ufficiale). Elle interdit cette pratique non seulement sur le territoire national, où elle était déjà illégale, mais aussi pour les citoyens italiens qui y auraient recours à l’étranger, et ce même dans des pays où elle est autorisée.
Cette loi prévoit une peine d'emprisonnement de trois mois à deux ans et une amende de 600 000 euros à un million d'euros pour "quiconque réalise, organise ou fait de la publicité pour la commercialisation de gamètes, d'embryons ou de la maternité de substitution".
Une nouvelle Inquisition
Il ne s’agit pas ici de lancer un débat pour ou contre la GPA, mais simplement de prendre acte que cette pratique existe, elle est légale dans beaucoup de pays et concerne tous les genres, même si le but poursuivi par le gouvernement Meloni est de détruire les familles homo-parentales.
Ainsi l’État Italien et sa majorité parlementaire envisage de poursuivre ses ressortissants pour leurs choix intimes familiaux et reproductifs sur un plan mondial et vraisemblablement sans limites de temps.
Est ce le rôle d’un Etat de pénaliser un choix aussi intime que sa reproduction ?
Est ce le rôle d’un Etat de réprimer les familles en plaçant des parents en prison pour la naissance de leurs enfants… et ensuite en plaçant sans doute les enfants dans des orphelinats d’État !!
Cette situation épouvantable pourrait nous rappeler les époques où les Etats développaient une politique raciste de la natalité mais le rapprochement le plus judicieux se réfère aux tribunaux de l’inquisition qui mettaient en place d’une procédure spécifique pour poursuivre et éliminer les sorcières ou tout autre personne ne rentrant pas dans les canons de l’Église Catholique.
D’ailleurs cette pénalisation est soutenue par les associations catholiques extrémistes comme Pro Vita & Famiglia, une association en faveur du « droit à la vie » et fervente défenseure de la loi, qui s’est félicitée de son adoption. C’est « une étape importante dans l’abolition du marché international des enfants », a noté le président de l’organisation, Antonio Brandi, exhortant le gouvernement à donner la priorité à ce sujet dans les relations diplomatiques et les forums internationaux, tels que l’Organisation des Nations Unies (ONU) et l’Union européenne (UE).
Les nouveaux réfugiés parentaux
L’Europe fonde son ordonnancement juridique sur la CEDH, et autres déclarations protégeant les droits mais aussi mis en place une entraide répressive internationale à l’échelon du continent européen.
L’article 8 de la CEDH prévoit que : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. » Sur cette base le projet liberticide italien devrait être invalidé.
Mais le débat rebondit lorsque l’on sait que l’Italie délivrera certainement des mandats d’arrêts ou procédera à des procédures d’extradition sur la base de ces infractions inquisitoriales pour interpeller les familles qui se seraient réfugiées dans des pays tiers et/ou européens.
Ces nouveaux réfugiés parentaux devront s’en remettre aux décisions judiciaires de ces pays tiers notamment en cas de mandats d’arrêts européens. Sur ce plan, dans la situation actuelle, il ne fait pas de doute que les juges saisis feront application de la CEDH pour éviter la remise à l’État Italien : voilà encore une bonne polémique pour l’extrême droite contre le pouvoir des juges…
Mais il est possible d’assister à une volonté de contournement de textes fondamentaux et de ces contentieux par la procédure d’extradition qui dépens souvent du pouvoir exécutif. Mais en France celle-ci est aussi garante des droits fondamentaux et applique la règle de la réciprocité d’incrimination c’est à dire que les faits doivent également être considérés comme des crimes ou des délits aux termes de la loi française (principe de la réciprocité d’incrimination).
Enfin, l’extradition est refusée si les infractions sont punies dans l’État demandeur par des peines ou des mesures de sécurité contraires à l’ordre public français et les faits doivent également être considérés comme des crimes ou des délits aux termes de la loi française (principe de la réciprocité d’incrimination). Les causes de refus peuvent aussi concerner le cas où les infractions sont punies dans l’État demandeur par des peines ou des mesures de sécurité contraires à l’ordre public français et notamment une décision d’extradition ne doit pas porter atteinte de façon disproportionnée à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) qui garantit le droit au respect de la vie privée et familiale.
Cette situation est donc encadrée juridiquement, il faudrait vérifier la situation exacte dans les autres pays européens mais surtout les pays tiers à l’Europe. Toutefois, on imagine les polémiques et conflits diplomatiques engendrés par ce nouveau contentieux des réfugiés parentaux et surtout on ne peut pas ignorer l’hypothèse dans laquelle ce serait un gouvernement d’extrême droite qui arriverait au pouvoir en France et changerait notre ordonnancement juridique .
En réalité, le vote de cette loi en Italie, en dehors du contexte politique interne, est une déclaration de guerre à l’application de la CEDH et une volonté de retourner aux années trente, lorsque ni la CEDH ni l’ONU n’existaient, stratégie réactionnaire que nous avons longuement déjà décrit.
https://blogs.mediapart.fr/gillessainati/blog/270523/la-tyrannie-est-elle-notre-seul-avenir
Aujourd’hui les courants les plus réactionnaires des églises sont utilisés par un gouvernement d’extrême droite qui veut éliminer les familles homo parentales, s’il réussi il aura totalement détruit les garanties fondamentales et toutes les dérives deviennent possibles.
Dans ce contexte, assez déprimant, raisonne alors la phrase du pasteur Martin Niemöller :
« Quand les nazis sont venus chercher les communistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas communiste.
Quand ils ont enfermé les sociaux-démocrates, je n’ai rien dit, je n’étais pas social-démocrate.
Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas syndicaliste.
Quand ils sont venus me chercher, il ne restait plus personne pour protester. »
Il est temps de se mobiliser pour le respect des droits fondamentaux universels.
Lien mediapart :https://www.mediapart.fr/journal/international/271224/en-italie-le-pouvoir-mene-une-chasse-aux-sorcieres-contre-les-familles-homoparentales