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Billet de blog 19 août 2025

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Ziad Medoukh, doit être accueilli en urgence. A Gaza, sa vie est en jeu !

M. Ziad Medoukh, poète palestinien francophone, est l’un des 30 lauréats du programme PAUSE délivré par les autorités françaises compétentes en mai 2025 pour les Palestiniens les plus menacés. Mais ce programme est actuellement bloqué alors que les massacres vont reprendre à Gaza Ville où il réside.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

« L’armée israélienne a déjà pris possession des quartiers ouest de Gaza ville, après des bombardements intensifs. Elle va prendre possession de Gaza ville centre, où j’habite, la semaine prochaine », « Je me sens particulièrement menacé. Les témoins du génocide à Gaza se font éliminer les uns après les autres ». C’est par ces mots chargés d’angoisse que Ziad nous interpelle, saurons-nous les entendre avant qu’il ne soit trop tard ?

Un ami avant tout

Ziad et moi, la poésie nous a rapprochés et liés, presque comme deux frères. L’histoire tumultueuse et cruelle de la Palestine occupée a été le ciment de notre amitié. Ziad est, pour moi, le narrateur infatigable de la douleur et de l’injustice infligées au peuple palestinien depuis la Nakba. Je relis encore avec émotion ses poèmes d’espoir écrits dans la douleur. La résilience transcende ses mots. Avec lui, je chemine dans des odes à la liberté, des éloges à la justice, à l’égalité. Nos échanges se nourrissent mutuellement. Il y a presque un an déjà, je diffuse son appel au secours. Ziad en retour publie mes poèmes dédiés à la Palestine dans ‘Gaza la vie’. Il les fait lire aux enfants désemparés qui essaient de retrouver des mots d’amour et de joie. Dans leur horizon barré, ce sont des lueurs d’espoir. Le monde entier ne les abandonne pas. Pour sceller notre amitié, je consacre à Ziad ce poème : « A toi, Ziad, notre frère de Gaza, toujours en vie ! ».

Son œuvre

Ziad Medoukh, est l’auteur de nombreuses publications concernant l’enseignement du français en Palestine et la non-violence, qui montrent son attachement aux grands principes : démocratie, liberté, droits de l’homme. Il est le premier Palestinien à obtenir le prestigieux titre de Chevalier de l’Ordre des palmes académiques de la République française en 2011.

Le milieu littéraire l’apprécie pour ses recueils de poésie en langue française. Il y fait preuve d’un talent reconnu et d’une grande humanité, faisant de lui l'un des plus éminents poètes palestiniens contemporains. En 2014, il est nommé ambassadeur par le Cercle universel des ambassadeurs de la paix. En 2015, il remporte le prix de la poésie francophone et, en 2017, le prix international de la fondation indienne Jamalal Bajaj pour ses activités en faveur des jeunes de Gaza et son encouragement à la non-violence.

Ses recueils de poésie dénoncent la cruauté de l’occupation israélienne et appellent à l’avènement d’une paix juste : « Gaza, Terre des oubliés, Terre des vivants » (l’Harmattan 2012), « Poèmes d'espoir dans la douleur » (Scribest 2018), …

Dans son dernier recueil, « Poèmes d’espoir à Gaza la dévastée » (Babelio 2024), sa plume redonne vie aux paysages désolés, aux êtres humains abandonnés.

Son témoignage au quotidien

En cette période de destructions massives à Gaza, Ziad Medoukh nous raconte son quotidien très difficile à Gaza, la peur de mourir qui rivalise avec la faim… En guise de catharsis et pour occuper son quotidien, il participe à des séances d'animation et de soutien psychologique pour les enfants de Gaza, même au mois d’août 2025, en pleine agression militaire israélienne.

Voici le message qu’il nous transmet au matin du 18 août 2025 : « Afin de rassurer les enfants profondément traumatisés après 22 mois de bombardements intensifs sur la bande de Gaza, des jeunes motivés poursuivent leurs actions et leurs activités récréatives, pour apporter un soutien psychologique aux enfants partout dans la bande de Gaza même en pleine agression. Ces jeunes ont organisé une activité d’animation mi-août 2025 dans un centre éducatif de Gaza. Les 30 participants ont été très attentifs, intéressés et ont montré leur joie. L'équipe formée en septembre 2014, s’occupe de plusieurs centres d’accueil de la bande de Gaza, et propose diverses activités, comme celle diffusée sur la chaîne francophone "Gaza la vie" ».

Des nuages noirs pèsent sur sa destinée

La menace qui pèse sur lui et sa famille est très sérieuse et inquiétante. 

Nous rappelons que le gouvernement israélien a scrupuleusement détruit tout ce qui touche à la culture et à l’éducation dans l’enclave de Gaza. Il a déjà assassiné de grands poètes comme Refaat Alareer, qui, dans son dernier poème « S’il est écrit que je dois mourir » prédisait sa propre mort, arrivée très peu de temps après, en décembre 2023.

Il a aussi assassiné de très nombreux témoins palestiniens gênants que sont les journalistes ou écrivains qui documentent la famine ou le génocide en cours (Edwy Plenel dénonce l’hécatombe de confrères et de consœurs délibérément tué·es par l’armée israélienne).

Notre crainte est donc maximale, Ziad est un témoin de l’horreur que vivent au quotidien tous les habitants de l’enclave palestinienne. Il n’a pas peur de décrire les destructions inouïes et la famine qui s’étendent inexorablement dans Gaza, comme il l'a fait récemment dans La Croix : « Tout le monde crève de faim à Gaza » : le témoignage bouleversant du poète Ziad Medoukh.

Comme les 225 journalistes palestiniens dont on a recensé la disparition et qui représentaient une fenêtre sur le monde, Ziad est menacé de mort.

Ziad et sa famille ont été choisis prioritairement pour un accueil en France dans le cadre du programme ‘PAUSE’ piloté par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche, concernant les ressortissants étrangers dont la vie est menacée en raison de leurs activités.

En dépit des relances effectuées par plusieurs collectifs et des dizaines de parlementaires, le rapatriement de Ziad et des autres lauréats n’a toujours pas eu lieu. Cette attente absurde est criminelle :  Ahmed Shamia, architecte qui faisait partie des lauréats, a déjà été assassiné par l’armée israélienne, alors qu'il attendait son rapatriement.

Notre ami Ziad Medoukh, narrateur de l'indicible, poète des oubliés, ne doit pas être une nouvelle victime des assassinats ciblés de témoins gênants.

Si rien n’est fait pour protéger la famille Medoukh, nous risquons sous peu d’apprendre qu’elle a été assassinée elle aussi. Nous ne voulons pas être coupables de non-assistance à personne en danger. Ziad œuvre pour une paix juste entre Israéliens et Palestiniens. Il a fait de la France et de la francophonie sa passion. La France se doit de le protéger.

Nous attendons donc de la France qu’elle assure en urgence sa mission d’accueil pour cette famille particulièrement menacée.

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