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Billet de blog 2 mai 2015

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Le klaxon indien est mort, vive le klaxon !

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Bonne nouvelle, en apparence, pour tous ceux qui s’agacent, à Bombay, des perpétuels coups de klaxon qui caractérisent, nuit et jour, la circulation automobile intense de cette mégapole de 21 millions d’habitants : le ministère des transports de l’Etat du Maharashtra vient de publier une circulaire interdisant désormais le fameux “Horn OK please” écrit bien souvent à l’arrière des camions, bus et autocars. Généralement peinte de couleurs vives, telle une décoration, cette phrase autorise les conducteurs qui suivent les véhicules en question à faire un usage immodéré de leur klaxon, même - et surtout - quand cela s’avère parfaitement inutile, estiment les autorités. Vraiment ?

Selon le chef de la police de Bombay, “les agents de la circulation essaient depuis déjà un certain temps d’apprendre à la population à moins utiliser le klaxon, en partenariat avec des ONG”. Or de toute évidence, les résultats ne sont pas au rendez-vous. D’où cette nouvelle disposition, qui mettra cependant un certain temps à s’appliquer et à produire des effets, convient Mahesh Zagade, le directeur des transports au ministère. “Nous voulons en finir avec cette pratique mais cela représente un vrai changement culturel”, reconnait-il, prévenant qu'il s'agit d'une "première initiative qui sera suivie par d’autres mesures visant à réduire la pollution sonore en ville”.

Pas facile, en réalité, de savoir s'il faut se féliciter de cette circulaire. Le journal économique Mint rappelle fort à propos qu'il y a deux ans, New York a fait retirer des panneaux publicitaires de la ville les affiches invitant les conducteurs... à ne pas klaxonner. Les dirigeants de Big Apple ont en effet jugé que de simples mots ne suffisaient pas à modifier les habitudes des gens, même s'il n'y a pas que les incitations financières qui soient capables de faire réagir l'être humain. La science comportementale a en tout cas de beaux jours devant elle, si elle souhaite continuer à investir le champ des politiques publiques.

Et puis rien n’est jamais gagné d’avance, ainsi que le prouvent les propos pour le moins curieux qu’a tenus le ministre national de l’environnement dans l’édition du 2 mai du quotidien The Indian Express. Selon Prakash Javadekar, tout ce qui est raconté depuis quelques semaines sur le niveau de pollution intolérable constaté à Delhi relève du “complot”. Si les médias écrivent que la capitale de l’Inde est la ville la plus polluée au monde, c’est parce qu’une ambassade - dont il préfère taire la nationalité - a intérêt à le faire croire au grand public, affirme-t-il. “Est-ce que la qualité de l’air à Delhi a empiré depuis seulement dix mois ? Le problème existe en fait depuis dix ans et personne ne le dit”, assène Prakash Javadekar. Circulez, donc, il n’y a rien à voir. Et si possible, sans klaxonner.