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Billet de blog 22 février 2017

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Etre homo ce n'est pas si grave, même en Inde

Une campagne d'information lancée par le gouvernement Modi à l'adresse des adolescents redonne de l'espoir à ceux qui réclament la dépénalisation de l'homosexualité dans le sous-continent.

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Encore une crise de schizophrénie à l'indienne. Alors que le gouvernement Modi, en place depuis bientôt trois ans, se refuse à légiférer pour annuler la décision de la Cour Suprême ayant réintroduit fin 2013 le délit d'acte sexuel "contre nature" dans le code pénal (le fameux article 377 qui avait été supprimé en 2009), le ministère de la santé est en train de distribuer à des dizaines de milliers d'enseignants s'étant porté volontaire un kit visant à apprendre aux adolescents des collèges et des lycées le b.a.-ba des relations amoureuses.

Préparés avec le soutien du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA), les documents qui composent ce kit recommandent de dire à la jeunesse indienne qu'il est tout à fait normal d'être attiré par des personnes du sexe opposé... ou du même sexe que le sien. Comme si cela ne tombait pas sous le sens. Mais il y a une condition : le rapprochement qui pourrait s'ensuivre doit nécessairement reposer sur "le consentement mutuel, la confiance, la transparence et le respect" (sic).

Encore une initiative sur laquelle il conviendrait d'interroger la ministre des droits des femmes et de l'enfance, Maneka Gandhi. La veuve de Sanjay Gandhi, fils d'Indira qui était promis par sa mère au poste de premier ministre en tant que représentant du parti du Congrès, jusqu'à ce qu'il s'écrase aux commandes de son avion de tourisme en 1980, est membre du parti aujourd'hui au pouvoir, le BJP. Et selon elle, le viol conjugal n'a pas lieu d'être puni en Inde, car il s'agit d'un concept occidental incompatible avec l'histoire et la culture locale. Le BJP, qui, rappelons-le, assimile officiellement l'homosexualité à une maladie génétique.

Le kit du ministère de la santé est d'autant plus remarquable - et surprenant - qu'il invite les enseignants à rappeler à quelque 2,6 millions d'adolescents qu'on a le droit de pleurer et d'aimer faire la cuisine quand on est un garçon, et qu'on n'est pas pour autant efféminé. Qu'une fille a le droit de s'habiller en garçon et un garçon en fille, sans que cela signifie que l'on veuille changer de sexe. Que lorsqu'une fille dit "non" à un garçon entreprenant, cela veut dire qu'elle ne veut pas coucher avec lui.

Le kit informe également les jeunes sur les maladies sexuellement transmissibles, dont le sida fait partie (ce qui n'est pas une évidence pour tout le monde en Inde). Il donne enfin les conseils de base de la contraception. En expliquant que le meilleur moyen de se protéger (des maladies ou d'une grossesse) reste... la masturbation. Le ministère de la santé ne pouvait pas être parfait jusqu'au bout. On lui donne 18/20.