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Billet de blog 16 novembre 2025

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Nuñez contre Barré : outrage à la Sainte-Matraque

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Illustration 1
PEB-Nunez © MasavIA

Pierre Emmanuel Barre a comparé la police à Daesh, j’avoue que j’ai bien ri. Mais non, un islamiste tue pour une place au paradis, pas pour un salaire et la sécurité de l’emploi. Voilà quoi. Je vous dis pas le bordel qui a suivi !


Je préviens : je raconte comme je l’ai vu, moi, avec mon œil en vrac, ma morale unijambiste et ma passion secrète pour les types qui gueulent plus fort que les autres. Et ce dimanche-là, dans le studio de Nova, Pierre-Emmanuel Barré avait la gueule du môme qui s’apprête à foutre un pétard dans les chiottes du collège, juste pour entendre un pion hurler. Et putain, il a été servi : c’est Nuñez, le ministre de l’intérieur lui-même, qui a sauté au plafond. On pensait avoir atteint le palier maximal de la connerie avec Retailleau, mais Roland Nuñez frise le sommet de la hiérarchie en la matière, si vous voyez ce que je veux dire.
Barré, lui, a fait ce qu’il sait faire : remuer la merde. Pas la nôtre, pas celle qu’on porte au fond du pantalon quand on entend « contrôle d’identité », non : la grande, la sacrée, la merde d’État, celle qui pue l’impunité, les consignes invisibles, les hiérarchies de traviole, les dossiers classés sous le tapis. Et évidemment, quand tu trifouilles là-dedans, il y a Nuñez qui déboule, crispé comme un bedeau surpris à caresser un gosse derrière la sacristie : « Comparer la police à Daesh », qu’il couine, mâchoire serrée, costard en sueur.


Moi, je me suis avancé. Pas physiquement, hein, j’ai un respect immense pour la distance de sécurité avec les flashballs, mais mentalement, comme un poivrot qui revient dans un bar après la baston, juste pour compter les incisives qui manquent. Et je regardais Barré : pas une once de regret, pas un muscle qui tremble, juste ce sourire de sale gosse qui sait exactement où planter son doigt pour faire couiner les puissants. Et le pire, c’est qu’il avait raison. Putain, qu’il avait raison.
Parce que dans ce pays, tu peux tout dire : que les riches sont des porcs, que les députés dorment, que Dieu est une arnaque, que les profs bandent mou, que les infirmières sont des saintes, ça passe. Mais dès que tu mets « police » et « violence » dans la même phrase, tu as immédiatement trois ministres, deux syndicats et une armada de chroniqueurs qui se roulent par terre en criant au blasphème. Ils te refont le Vatican version CRS : « Attention, touche pas à la sainte matraque ! » D’ailleurs, on devrait canoniser l’uniforme, ça réglerait l’affaire.
Le vrai sacré, pourtant, c’est peut-être les mômes qui rentrent pas du commissariat, les femmes violées en sortie de cellule, les types qui finissent étouffés dans un fourgon, les cent soixante-dix morts en quinze ans lors de contrôles « qui dégénèrent », joli mot pour dire qu’on a tiré trop vite. Record européen, ça se fête, non ? Champagne et flashball confettis.


Je ne défends pas Daesh, faut pas me prendre pour un légume pourri, mais je défends Barré. Parce que lui, il dit la vérité comme un poète ivre mort : il en fout partout, c’est moche, ça colle aux bottes, mais ça pue tellement vrai que ça dérange. Et ça, les types comme Nuñez l’encaissent aussi bien qu’un suppositoire glacé. Alors oui, Barré aurait pu comparer la police à Tsahal, mais l’ombre d’un prépuce plane sur ce genre de vanne depuis une paire d’années...
Nuñez, évidemment, s’est rebiffé : « La police sauve des vies. » Oui, parfois. Comme au Bataclan. Et parfois, elle en ruine. C’est tout le problème. Le réel n’est pas une brochure ministérielle, c’est un foutoir où ceux qui protègent peuvent aussi cogner trop fort, trop tôt, trop souvent. Ça n’annule rien, mais ça oblige à écouter ceux qui en parlent. Même quand ils le font en se torchant allègrement les pieds sur l’institution.
Et Barré, avec son humour dégueulasse, ses images qui te mettent des échardes dans le cerveau, c’est ça qu’il attaque : pas la police, mais la honte que certains ont à la regarder en face. Le pouvoir n’a peur que d’une chose : qu’on rigole de ce qui lui sert d’auréole. Alors ça rugit, ça aboie, ça menace, ça pleurniche à « l’outrage ». Comme si un sketch pouvait casser une côte. Eux savent très bien le faire, pourtant.


Moi, j’étais là, à moitié vautré sur ma mauvaise conscience, et je me disais : putain, quel pays fragile. On préfère condamner un humoriste que se demander pourquoi ce qu’il raconte ressemble à un reportage.
Alors oui, je défends Barré. Parce que dans un pays où l’uniforme passe avant les morts, où un ministre confond respect et soumission, où chaque critique déclenche une messe nationale, il reste l’un des rares à dire : « Hé, les gars, ça pue. Et pas qu’un peu. »
Et j’ai juré voir Barré lever un sourcil, ce geste de mec qui, au comptoir, te sert un dernier verre en murmurant : « T’inquiète. Le jour où l’humour fera plus chier personne, c’est qu’on vivra dans un pays tellement flippant que même Daesh demanderait l’asile ailleurs. »

https://youtu.be/3KmL65uC34Q

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