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Billet de blog 7 juin 2008

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Cahier d’un Retour à la Capitale.

T’ai-je déjà aimé, mon pays !Et pourtant, je te tutoie.

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T’ai-je déjà aimé, mon pays !

Et pourtant, je te tutoie.

De tous temps et en tous lieux,

Les hommes ont produit

Des citadelles imprenables.

De ces lieux sacrés

Que seuls les initiés

Pouvaient violer.

Le Temple de Salomon, le Machu Pichu, le Mont Saint-Michel…

Le pavé parisien est de ces monuments

Que l’Histoire a sculptés.

Tant de pieds illustres t’ont foulé,

Ô, Toi pavé !

Que tu en deviendrais nonchalant.

Paris par ci, Panam par là,

Tu joues de tes frasques latines.

Combien de mots d’oiseaux

S’y sont déjà,

Les ailes cramé.

De ceux qui piaffent, d’autres qui brêlent,

Sans parler des qui gainsbarrent.

Je suis ce que tu as voulu. Coloniser.

De tes principes.

République en avant,

Du haut de tes Lumières

Dont j'ne voyais que les phares,

Au loin, perdus dans la brume,

De l’océan Armorique.

Et tu t’es même revêtue

Des habits d’Astérix,

Pour t’enorgueillir de ta francisque

Et m’accorder le regard

Magnanime de l’amant

A qui

L’on échappe ces doux mots ;

Ephémères au matin :

« Merci pour la nuit, Chéri ! »

J’étais déjà toute ouïe,

Emmitouflé d’une Bretagne

Que je croyais trop mienne.

« Liberté-Egalité-Fraternité » sous tous les toits,

Je t’obéis à la lettre.

Jusqu’aux os j’ai crié

Ces mots comme on dit un blasphème,

Dans les églises qui m’ont vu chanter,

Face aux bonnes sœurs qu’on avait déguisées

En instits… Même en ma mère,

Dieu a voulu s’incarner.

Mais je n’eus de cesse de te disperser,

République impérieuse,

Une et indivisible.

Infidèle je suis né, infidèle je serai;

Pour n’être que plus dépendant.

J’ai fui, je l’avoue,

Comme tes pires amours.

Hugo, Rimbaud, Césaire.

A tes genoux je ne me sentais

Que larve et de mon audace

Tu ne voyais que les chevilles.

Vers le lointain, vers ces mondes

Que tu n’aurais jamais voulu foulés;

Depuis l’Amérique latine dont tu as,

Ironie ! Enfanté. Le nom.

Depuis Barcelone, de ses dames

Que jalouse tant Marseille,

J’ai appris toutes les langues

De tes sœurs jumelles,

Compris que tu avais commis

L’adultère à ta fille : Afrique.

Joué les « sainte nitouche »

Avec cette fuyante Asie.

Tu as cru englober

Le Monde,

Je t’ai suivie à la trace,

Imaginée là où tu n’étais pas,

Colporteur discipliné que je fus.

Aux quatre océans,

Je parlais en ton nom.

Comme Lafayette en Amérique

Ou Tocqueville voulant t’y retrouver.

Alcides D’Orbigny en Amazonie.

Tu étais tellement partout

Et Nulle Part Ailleurs, pourtant !

France en Indochine,

Embourbée dans une vallée

Comme nos poilus dans la Marne

Ou telle tes pauvres grognards

Chantant encore la Marseillaise

Aux confins de l’Europe :

Tu n’as pas vu Waterloo

Du haut de ton chapeau

De prétentieux

Sans-culotte.

« Douce France, le Pays de mon enfance »

Chantée en 43 !

Tu t’es toujours menti, Mère-Patrie !

Et tes enfants jouent toujours

A la Guerre des boutons

D’aucuns au Larzac

Te tournent en dérision

Et te prennent au mot

Quand tu voudrais y voir

Une infâme Vendée.

D’autres retournent leur veste,

Ou plutôt les armes,

En Algérie, au Sénégal

Ou les Malgaches.

« N’appartiens à personne »

Crie l’exilé Lavilliers,

La gueule de corsaire

Malouin pour étendard,

Perdu entre deux agrumes

Brésiliens : mi-figue, mi-raisin.

Certains te voudraient incarnée

Aux U.S.A. ; pays auto-proclamé

Des libertés. Et tu entendras Omaha,

Plage de Normandie,

Quand se réincarne Martin

Luther King, produit des protestants

Que tu as toi-même mis aux vents.

Devenu noir

Par les ruses de l’Histoire.

Alors je me suis fait

Arlequin,

L’homme aux mille couleurs,

Pour devenir hussard.

Le sang Bleu-Blanc

Rouge mêlé.

Libéré dans mes racines déchaînées,

Je féconderai le Diable

De tes entrailles brouillées.

Et quoi ? Tu m’y invites ? M’y invites-tu ?

« Je m’en allais, Muse. Et j’étais ton féal ».

Premier de ceux-là, ton poète prodige,

T’as quittée. Et en est mort. D'écrire.

Enfant prodigue bien-aimé.

Qui es-tu, Mère catin,

France laïque,

Pour m’accueillir en ton sein?

Et retenant ta pique

Te confier à çui-là,

Qui en « Pétain »

Plus haut que son cul…

A moi Paris, criai-je,

Un Gavroche à la tête !

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