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Billet de blog 11 mai 2025

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L'abîme de l'inceste : un gouffre sociétal

Suite au témoignage du drame d'Emma, des adolescences livrés à la prostitution précoce avec une clientèle addict, nous, adultes devons faire face à nos dénis et nos dérives sociétales. Nos politiques doivent travailler sur ce sujet de façon prioritaire.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le drame d'Emma nous interpelle. On rage d'impuissance face à nos institutions, la toxicité du digital nous révulse, le déni collectif comme personnel, la boule au ventre de ce puit d'horreur que les faits dévoilent.

Je confirme la grande lâcheté qui délite notre société : combien d'infirmière ont des témoignages d'ado, dans mon cas, pulsions suicidaires à 13 ans, et ne jugent pas utile d'informer les parents, de sécuriser l'enfant : démunie, impuissante? Combien de proche, de psy ont des témoignages d'enfant sur les violences sexuelles et ne jugent pas utile d'y faire face, préférant l'omerta. Nos policiers, notre système judiciaire a encore de grand progrès à faire, pour faire face à cette déferlante.

Que de déni : Il va falloir qu'on fasse face un jour. Pourquoi la Chine arrive à censurer efficacement les RS pour des raisons politiques, mais pour l'occident, dieu hightech, créer un internet des mineurs ultrasécurisé n'est pas possible, fliquer toutes ces déviances toxiques n'est pas possible? On utilise l'IA pour harceler les chômeurs, mais pour les violeurs, les pédophiles, circulez RAS! Les femmes et les enfants d'abord, c'est ça la logique de la surexploitation de la chair humaine au sein du capitalisme destructeur, le quoiqu'il en coute de la croissance, du progrès technologique sans aucune entrave?

Donc on préfère jeter tout cru nos mômes dans toute la merde humaine, digitale mais aussi réelle, à portée de clic, sans aucun moyen de filtrage pour les parents. Nos enfants sont en danger et nos politiques préfèrent taper sur les noirs et les arabes plutôt que de regarder de face cette déviance sociétale assumée. La liberté d'expression a bon dos, la libération des mœurs se déployant sur cette dérive nous précipite en abîme. Car oui, il s'agit bien d'une déviance sociétale. Née dans les années 60, à cette époque, les personnes qui se plongeaient dans les revues pornos étaient vues comme dépravées, déviantes. Certes, le puritanisme n'était pas loin, lui aussi toxique, mais il était aussi question de respect de soi, quand les valeurs morales avaient du sens. Aujourd'hui, si tu n'as pas vu de film porno, que tu n'aimes pas cela, que tu n'en fais pas une consommation régulière, que tu n'utilises pas un sextoy,  t'es un gros nase qui a raté sa vie sexuelle. Le BDSM est devenu la Mecque de l'épanouissement sexuel, vraiment? L'amour dans tout ça, circulez, un truc de mauviette à l'eau de rose. Combien ne revendique que du sexe pur! Comme si cela existait? Cette revendication arelationnelle est une forme d'individualisme forcené, une négation de notre nature humaine si belle quand elle est saine et duale. On a rendu normal le fait de se vautrer dans l'exploitation sexuelle des femmes, une femme libérée est une femme qui aime être exploitée sexuellement, voir mieux qui soit pro-active dans ce jeu de rôle toxique pour elle-même... et c'est pas mieux pour les hommes, esclaves eux-aussi de leur corps pavlovien déviant. Devenir des zombies dépendants de nos pulsions non canalisées est notre destinée?

Perso, je n'ai jamais pu en regarder plus de 2mn, frissons de froid dans le dos, tellement je me sentais humiliée en temps que femme. Maintenant que je sais que ce sont des viols qui sont filmés pour la plus part, je comprends mieux mes frissons glaciaux, écho de ces pulsions de mort. Et me réconforte dans ma saine normalité.

A ceux qui hurlent : "mais que font les parents!" Mais on fait tous confiance à autrui, l'enfance est censée être sacrée pour tous, une société ne tient que par la confiance. On a tous confié nos enfants à des adultes censés être normaux. Tout le monde veut le meilleur pour ses enfants. Si on ne peut plus avoir cette confiance, alors l'issue, c'est comme les talibans : on enferme femme et filles dès leurs puberté pour les protéger de la prédation, que l'on refuse de canaliser. Et encore cela ne protège pas, puisque certains violent même enfant et bébé. Et cela ne protège en rien le genre, puisque certains "chefs de famille" ayant droit de vie et de mort sur leurs proches, violent abondamment et en toute impunité leurs "troupeaux personnels."

Ça, c'est pour la norme sociale où on a l'impression d'avoir le choix entre deux déviances, l'une avec des tchadors visibles, les talibans; l'autre, avec des tchadors invisibles et tabous, l'occident. Le problème vient des dénis abyssaux auxquels nous faisons face, personnel comme collectif.

Humaniste, optimiste, j'ai toujours eu l'intuition qu'il y avait un autre espace et je l'ai trouvé, l'amour sublimant la sexualité dans le respect mutuel, ça existe et c'est sublime, mais il faut drôlement le chercher et furieusement déconstruire ces codes sociétaux, un travail de titan impactant tous nos codes relationnels.

Revenons sur le sujet de l'inceste, principal inducteur de la suite des déviances.

Je dissocierais l'inceste enfant-adulte. Oui, déjà si les adultes ne déconnaient pas et respectaient les codes que tous connaissent, sans tolérance, ni dénis pour les déviances, on ferait du progrès. Si la société n'était pas sordide sur le plan des inégalités et des droits, les femmes ne seraient pas piégées par ce système sordide. Seules, les intéressées par le sujet seraient dans la partie et en position de contrôle de soi. Si on apprenait aux hommes à gérer leurs pulsions corporelles au lieu de les subir, on se porterait tous mieux.

Je séparerais le cas de l'inceste entre enfants. Car les coupables ne sont pas les enfants, pas au collège. Au lycée surement, ils sont censés avoir compris les codes sociétaux. Les coupables, ce sont les adultes, c'est à dire nous et les dénis que nous fuyons. Ce sont ces dénis qui font les tchadors invisibles de l'occident et font le lit des incestes.

Comment apprend-t-on l'inceste à un enfant sans le perturber psychiquement, alors qu'on incite sans arrêt les enfants à être gentil entre eux, à se faire des bisous, à dormir ensemble "innocemment".... On peut leur apprendre le respect, la politesse, que la famille, la fratrie est sacrée, que son corps est sacré, mais cela suffit-il ? Apparemment non. Que les ados s'intéressent au sujet à l'orée de l'adolescence est normal : pulsion de vie bien saine. Vu que le sujet du sexe est tabou, qui éduque ses enfants sur le sujet sexuel suffisamment tôt? Ben, pas grand monde, en fait, le tabou de l'inceste, verrouillé par le tabou du tabou, commence par l'utopie de l'amour "inné" ET le tabou du sexe doublé du postulat des pulsions "irrépressibles". Déjà, on fait comme si l'amour était un message divin subliminal qui nous tombe dessus sans crier gare : grave erreur, l'amour est une construction de confiance, de connaissance de soi, de relation et de soutien au long court, dont les fondations sont une complicité, une attirance; construction qui peut être consolidée ou détruite par la pratique sexuelle. Et je ne parle de l'utopie de croire que si le sexe va, tout va!

Lisant toute l'actualité Metoo qui m'interpelle profondément en tant qu'humaniste, j'ai fait une enquête dans ma propre famille maintenant que la parole se libère : sur 3 générations, sur 9 femmes, 8 ont subis des agressions sexuelles avant leur 18 ans, sur 5 hommes, 3 cas. Aucun viol, mais des tenteurs qui tentent leur chance, les tenteurs étant tous des hommes. Comment le viol a été évité? Par la rébellion de la personne, qui refoule avec force coup de gueule ou geste, le tenteur, ou les comportements évitants vis à vis de la personne toxique : l'arrêt de certaines activités, ne plus rester seul.e dans certaines circonstances...

Dans mon enquête, une enfant l'a dit à sa mère qui ne l'a pas entendue, alors qu'elle est elle même féministe et concernée dans son adolescence. Comment est-ce possible de ne pas entendre son enfant? Quand on y réfléchit : une enfant confrontée à quelque chose qu'elle ne comprend pas, comment peut-elle avoir les mots pour le dire? Quand on voit la vie d'un enfant, c'est une succession de mini trauma : mon doudou est perdu, j'ai cassé ma poupée, Pierre m'a pris mon stylo jaune, Julie m'a tapé... le plus souvent, on console, on relativise, on fait un câlin et on détourne l'attention de l'enfant : "tiens tu veux un petit gâteau" ou "oh, regarde l'oiseau sur le fenêtre?" Vite consolé, la vie continue. Comment comprendre alors que "Nathan est méchant, il m'a fait mal" ou "Jules n'arrête pas de m'embèter" peut couvrir bien autre chose?

Personnellement, j'étais naïve sur ce sujet. Étant l'ainée, ma sœur la cadette, dans la cousinade, nous faisions partie des ainées, idem dans le village. Sans le savoir, nous protégions les enfants de ce dérapage. Mais quand les ainés sont des garçons, le risque de dérapage est plus grand, voir le témoignage d'Anouk Grinberg. C'est à chaque fois, le cas dans les viols entre enfant.

En analysant les cas de figure au sein de ma famille, je constate que dès qu'une enfant de moins de 10 ans est en présence de garçons de plus de 10 ans, frères, cousins, voisins, frère de la meilleure amie, associations, colonies... elle est en danger. Pourquoi? Comment les ados peuvent-ils satisfaire leur curiosité sur le sujet sainement, vu le giga tabou sociétal sur le sujet, qui ne s'exprime que par un humour grivois récurant quasi quotidien dans certaines familles, des publicités tapageuses sur tous les supports, de la pornographie qui pleut abondamment sur le web et les portables, une filmographie qui fleurte avec les déviances en permanence, carré blanc ou pas? Ils sont matraqués de messages paradoxaux, difficile de trouver son équilibre dans cette cacophonie dissonante. Et surtout face à des parents esquivant largement le sujet, foi qu'ils ont dans l'innocence de leurs propres enfants, élevés dans leurs valeurs. Enfants livrés à eux-même, donc, quand ils ne se font pas refouler dès la première question "déplacée". Donc les enfants explorent le sujet, sous influence toxique, avec ce qu'ils ont sous la main, des petites filles innocentes, qui ne comprennent pas bien ce qui leur arrive, si elles n'ont pas été briefé par des parents alertes. Les enfants sont actuellement confrontés à leur premier visionnage pornographique vers l'âge de 8 ans! Youtube, youporn, même facilité! Dans de nombreuses cultures "primitives", on écarte les jeunes garçons de la troupe enfantine pour en faire des hommes, cela interroge quand on voit l'envers de notre décor? En occident, on laisse une cohabitation de tous les dangers... en posant un cierge marqué "innocence" d'un coté, "liberté" de l'autre, tout en livrant nos enfants aux démons du web? Il n'a jamais été écrit "entrée libre aux mineurs" sur les lupanars! La dérive est telle, que les ados qualifient de nase la vie bidochon de leurs parents "hasbeen" et courent après le fantasme d'une vie facile où tu te fais de l'argent facile grâce à la magie du digital dont l'accès est si facile : il suffit d'avoir peur de rien et de suivre la voie des putaclics dont ils sont abreuvés. Parent, on peine à les convaincre de la face noire, tant le pornochic, l'influence-mania a la cote, tant est grand l'abîme entre des jobs de merde au smic misérable et la belle vie des palaces si beaux par devant, si noirs par derrière. A quel saint se vouer?

Féministe, on m'a souvent retoqué que ce sont les femmes qui éduquent les enfants, donc nous formerions nos violeurs. Déjà, dans une société patriarcale sur tous les plans, où les mâles font la loi au sens propre comme figuré, qui induit les codes sociaux ? Certes, une partie des femmes glorifient leur petit mâle et rabaissent leurs futures homologues. Mais en dehors de ce cas de figure, comment les femmes peuvent-elles éduquer un garçon à maitriser ses pulsions corporelles, d'un corps dont elles n'ont ni les clés, ni le ressenti? Nous, on s'occupe des menstrues, de la contraception et de l'accouchement. C'est aux hommes de faire cette transmission de maitrise de soi. Combien le font ? Ne retrouve-t-on pas là, la grande lâcheté des hommes ou leur grande maladresse relationnelle, qu'ils cachent justement dans cet humour grivois, ces comportements outranciers mais pétris de fierté. Qu'est-ce que nous portons actuellement comme modèle masculin : un homme bien respectueux ou un homme fonceur, malin, culotté qui passe outre les obstacles? Qu'est-ce que cela sous-tend, quand on ne supporte pas qu'une femme hausse la voix, se mette en colère, négocie intelligemment, qu'une fille se batte? Quand on lit l'histoire des sorcières, on voit quel profil de femme a été amplement sacrifié! Donc nous avons bien un problème de biais sociétaux dans les modèles que nous portons, que nous glorifions. Et c'est pas prêt de s'arrêter, car on voit que la vague Metoo à peine émergée, par son féminisme réformateur engendre déjà le contre-poison : le retour du fascisme, du masculinisme, du virilisme salvateur pour des hommes qui refusent de se remettre en question. La place est trop confortable, trop facile?

A quand une éducation qui protègent les enfants de tout abus? Étant pré-metoo, je n'ai pas connu le consentement, à part les "tu veux bien sortir avec moi" et le jour du mariage :), mais des jeux de cache-cache subliminaux pour l'un comme pour l'autre quand le respect prime, parfois des demandes timides, trop souvent des demandes crues, "violentes", des gestes déplacés des tenteurs obsessionnels.

Le fait que dès la naissance, on manipule les enfants sans veiller à leur "consentement" n'est-il pas déjà un biais. Si à chaque fois que l'on change un enfant, qu'on lui donne le biberon, qu'on lui fait un câlin, on lui formulait une demande au préalable, qui soit satisfaite en cas de refus. Les enfants n'auraient-ils pas une compréhension intuitive que leur corps est sacré donc inviolable? Quand on oblige un enfant à faire la bise à la voisine ou à tonton Gérard, est-ce qu'on induit pas un comportement propre à la soumission, voir à la sidération?

Pourquoi la sexualité saine n'est-elle pas promue, pourquoi doit-on chercher pendant des années pour trouver les clés du corps, de la relation et désamorcer les comportements patriarcaux des hommes, comme des femmes? Pourquoi nos codes sexuels sont-ils honteux, grivois, tabous? Pourquoi a-t-on fait croire aux hommes que leurs pulsions sexuelles sont impératives, irrépressibles? Pourquoi réguler leurs pulsions n'est-il pas un puissant levier sociétal ou lieu d'y trouver des voies libératrices toxiques : masturbation, pornographie, prostitution, abus en tout genre.

Pourquoi n'y-a-il pas de film qu'un enfant de 10 ans puisse regarder sans être choqué, qui lui apprenne le respect d'autrui dans la sexualité, sublimé par l'amour? 

Ce que Metoo révèle puissamment, c'est que la vraie révolution sexuelle reste à faire. La première, couplé à la contraception n'a fait qu'ouvrir un boulevard à la surexploitation du corps des femmes, où les menstrues sont la seule pause autorisée et encore! Quand on éduque les femmes à ce sujet, c'est toujours pour mieux satisfaire le mâle, seules les décriées lesbiennes ont creusé une voie d'autonomie pour une attention féminine. Bien sûr, de nombreux couples ont trouvé leur voie par l'écoute et le respect, mais quand on voit le nombre de divorce... à la demande des femmes, cela questionne. Certaines thérapies de couple explorent avec courage, tous les biais qui se cachent dans nos relations des plus banales (qui sort la poubelle, récure les WC) au plus intimes (comment réguler et satisfaire nos besoins sans se frustrer, sans s'auto-détruire).

Oui, l'inceste des enfants révèle au combien la puissance de nos tabous sexuels, cachés par le tabou des tabous bien plus forts, les faits le montrent. Il montre à quel point cette confusion entre sexe et amour est toxique, l'amour comme chantage au sexe, mettant en échec combien de couple.

L'inceste des enfants montre à quel point, il est urgent de combler la carence éducative des garçons, des hommes et des filles et des femmes. Il est urgent de revoir le système de dominance qui structure toutes nos relations humaines, des plus publiques (politique, travail, syndicale, religieuse) au plus privées (enfant, couple, fratrie, famille au sens large). Il est dramatique que nos politiques soient si muets face à ces enjeux cruciaux pour que chacun ait accès à une parcelle de bonheur et surtout sauvé le vivre ensemble qui permet de faire société. Mais le capitalisme a-t-il pour objectif de rendre les gens heureux ou d'augmenter les ventes de sextoys, de putaclic sur les réseaux sociaux? On peut en douter, donc le capitalisme n'est pas un projet de société, il est urgent de remettre du contenu dans nos programme politiques qui permettent de revenir à un vrai progrès social à des visées humanistes et non matérialistes.

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