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Billet de blog 14 septembre 2024

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METOO : Hommes - femmes : deux mondes parallèles à réunir

Ce que l'affaire Pélicot met à jour.... la réalité de la condition féminine, comment le patriarcat déploie son emprise sur la vie des femmes dans mille et un détails en toute impunité.. parce que nous vivons dans deux mondes parallèles bien étanches bien cadenassés par les tabous. Il faut aussi lever le tabou du côté des hommes!

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Oui, nous vivons dans deux mondes parallèles, nous dans celui des femmes dont le back office est sordide, vous dans celui des hommes, si propre par devant, parfois bien glauque par derrière, bien protégé par le tabou, par les tabous.

Certes, tous les hommes ne sont pas violents, tous les hommes ne sont pas violeurs, par contre ceux qui dérapent sont en général multi récidivistes : 250 agressions pour PPDA, une belle liste pour Depardieu, là Pelicot, ben on ne sait pas en fait, ce n'est que le début...

Certes beaucoup d'hommes essayent de respecter leurs femmes, mais nous sommes tous et toutes imprégné.es de ce patriarcat qui pourrit nos vies. Un tout petit exemple pour montrer l'ampleur du chantier : on a tous appris, hommes comme femmes, à rire des blagues sexistes, ben oui, la meute virile a dit que c'était drôle, donc si tu ne ris pas, c'est que : t'es frigide, coincée, virago de féministe... homme pas viril, tapette, pédale quoi, petit garçon à sa maman ou intello..... Par exemple : "Quel est le premier animal domestique de l'homme? C'est la femme! ahahah... "  "Bats ta femme, si tu ne sais pas pourquoi, elle le sait ! ahahah...", ben c'était pas un viol, vu que moi, j'étais d'accord!" ahahah.... homme comme femme nous incarnons le patriarcat au quotidien dans mille et un détails et il est très difficile de s'en défaire tant on l'a dans la peau. Les deux sexes doivent donc se déconstruire.

L'attendu social du comportement des femmes, c'est la soumission; l'effacement et être au service de s hommes : infirmière, secrétaire, assistante, femme de ménage, prostituée... C'est pourquoi on ne tolère pas que les femmes se mettent en colère, haussent le ton, résistent : on les matent et surtout qu'elles nous fassent pas "chier". "Sois belle et tais-toi !", "Une femme intelligente est une femme qui sait se taire", "une femme a toujours tort, même quand elle a raison", être des "Marie, couche-toi là!" : Voilà, l'attendu.

Au travail, j'ai eu un supérieur hiérarchique avec qui cela ne passait vraiment pas. Je demande conseil à un collègue masculin : il me répond, "ben, non je ne vois pas comment t'aider, mâle alpha contre femelle rebelle, non je ne vois pas!" Je sors dépitée du rdv et cela me donne une idée. Je vais le tester à la prochaine réunion, je mets au niveau de mon comportement mon tchador vert : tchador = femme soumise, vert = je n'ai aucun problème, bref je fais pas "chier". Le gars exultait, il se pissait littéralement dessus de contentement : j'étais matée, j'avais le comportement attendu. Moi : ben, ça va pas être possible : je ne suis pas ta secrétaire, je ne peux pas faire de la langue de bois avec tes conneries, auprès d'une équipe avec qui je bosse depuis 8 ans! J'ai résisté, j'ai fait un burn-out, ma psy a détecté un comportement pervers narcissique, manipulant le chaud et le froid. Cas d'harcèlement moral sexiste. Un autre supérieur m'a qualifié de façon récurrente de "dure à traire" à chaque fois que je défendais une option! Difficile d'être femme cadre, apte à la prise de décision. Docile à la traite, voilà l'attendu.

Je pense que toutes les femmes ont subi des agressions sexuelles, je doute du misérable 14,5% des statistiques officielles. Moi, suite à Metoo quand je questionne autour de moi, famille, connaissances et amies, c'est du 100% : main au cul, sur les seins, pelotage dans le métro ou dans des soirées bien arrosées, placage contre le mur, baisers volés, certes on est pas toutes "violées" cad "pénétrées"... de façon violente, mais les proportions que Metoo met à jour sont quand même terrifiantes... Perso, j'ai toujours réussi à repousser les assauts en gueulant, en houspillant les intrus, donc je n'ai jamais été violée. Mais j'ai encore été embrassé de force à 48 ans, que j'ai repoussé en hurlant, "mais putain, ça va s'arrêter quand!"... maintenant on sait qu'il y a encore des viols dans les epads, on a dit sordide! donc jusqu'au bout, nous resterons des proies... ou juste des trous bien chauds et souples, si tentants ou des poupées gonflables vivantes!

L'expérience la plus désolante de ma vie, voir de mes yeux ma propre fille devenir une proie. Ma fille a été jusqu'à ses 12 ans, un être plein de grâce et de poésie, un vrai bonheur de la voir grandir... jusqu'à ce que je la voie se rigidifier, se raidir, se blinder et devenir agressive, défensive, lorsqu'elle a commencé à se former et sentir sur elle, le poids du regard des prédateurs et donc la menace la cerner. J'en avais mal au ventre, quelle horreur! C'était comme si on souillait ma fille, déjà!

En lisant Eva Illouz, la fin de l'amour, je bloque sur l'horrible description qui y est faite de l'homme célibataire p46 établi par Durkeim, vs l'homme marié et sa supposé jouissance sexuelle civilisatrice! Supposant que l'homme célibataire était déviant par défaut! Ben ce n'est pas l'expérience que j'ai des hommes célibataires, souvent gentils et effacés, extrèmement polis, parfois très délicats. Ce que révèle la plus part des faits divers : Outreau, Pélicot, Fourniret, PPDA, Strauss Kahn, Besson, Darmanin, Chirac... tous mariés! C'est que même marié, ben, ça ne les calme pas, ça ne leur suffit pas! Donc ce supposé sur la déviance du célibataire est aussi une interprétation patriarcale! Si un journaliste pouvait faire des stats sur les faits agression sexuelle marié vs célibataire, je pense que l'on corrigerait un autre abus social, le migrant célibataire a bon dos! Mon hypothèse est que l'homme célibataire accepte sa misère sexuelle de fait et se débrouille pour satisfaire ses besoins sexuels; quand certains hommes mariés ne l'assument pas du tout et partent dans des délires d'hypercontrôle et d'abus sur leurs conjointes et autres si affinités.

Autre dynamique toxique : la pute du régiment. Il se trouve que j'ai fait des études masculines, donc 6 filles dans une promo de 150 étudiants. Ben là, il vous faut deviner que toute la promo est tabou, hors de question de sortir avec le moindre garçon. Pourquoi? Si tu restes "vierge", tu es la mascotte, tous te protègent, même bourrés, totalement sécure. Par contre, si tu dis oui à l'un, toute la meute se déchaine et exige d'y avoir accès aussi, l'attendu, c'est la pute du régiment ! Donc un déchainement de violence, d'insulte, d'humiliation, d'introspection. Une fille de ma promo l'a subit, et moi féministe, je n'ai rien pu faire pour canaliser ce déferlement de jalousie, d'envie, de haine et de rejet : à gerber, je les détestais tous à cet instant.

Au delà, des acquis historiques du patriarcat, qui fait que certains hommes croient encore posséder leurs conjointes, je crois qu'un des problèmes de fond est la grande confusion que les codes sociaux ont mis entre la relation amoureuse et les besoins sexuels, le tout noyé dans le contrat de mariage, transformé en un vaste consentement par défaut bien enrobé dans le devoir conjugal, dont le viol est la seule limite.. depuis 2006, et la suppression de la présomption de consentement depuis 2010 : mais qui le sait? On nous a fait croire que l'un était l'autre, qu'il y avait parfaite osmose entre les deux, focalisant les femmes sur la relation et les hommes sur le besoin enrobé dans la relation, comme un alibi?

A 20 ans, j'avais lu dans un livre de féministe que le mariage était du proxénétisme privatisé, légalisé. Là, je les ai trouvé complétement givrées les féministes! Après 30 ans de mariage et de confidence d'amies sur leurs maris si "demandeurs", je comprends ce qu'elle ont voulu dire. Le tabou sur le viol conjugal est incommensurable avec la superbe excuse qu'on réglerait les autres problèmes en tension sous la couette, sincère ou chantage?... et concernant surement les deux sexes?

Au delà de la période amoureuse mutuelle, où les deux sont fusionnels... quand la routine se met en place... beaucoup d'homme font "l' amour" comme ils vont pisser en fait, ils se vident les couilles, se déchargent physiquement, psychiquement, se destressent comme ça : ils dorment mieux après. Donc on est aussi leurs somnifères, leurs anti-dépresseurs, en sus de la poubelle de table. Certaines comprennent vite que plus elles acceptent de passer à la casserole, moins elles se font "taper"! C'est pour ça, qu'ils ont "besoin de sexe", qu'ils vont appeler amour, tendresse, calins ou c'est pour te réchauffer..... Certes nombreux essayent de nous faire jouir... pour s'excuser? et puisqu'on jouit, ben, ils peuvent en abuser, en profiter tous les soirs? C'est la jouissance comme un ticket gagnant?

D'autres assument fièrement que c'est le seul sport, qu'ils pratiquent! Ben voyons, on est aussi leur dispositif de muscu et leur défouloir.

Lors d'un repas professionnel, j'ai entendu un homme marié assumer totalement et dire en fin de repas, devant tout le monde, bien repu : "bon, ben là, j'irais bien me vider les couilles!" et de se lever et partir à la chasse... Comme on prendrait l'air en fin de repas!

Donc si l'agression sexuelle et la servitude sexuelle des femmes se déroule sous le tabou, un autre tabou permet à cette incompréhension des sexes de nous pourrir la vie : c'est le fameux besoin sexuel des hommes. Sur les posts, on nous reproche souvent à nous les femmes, de mal élever nos garçons : nous serions la source pédagogique du patriarcat déviant... sauf que je n'ai eu aucun mal à transmettre à ma fille, mon expérience des règles, de la contraception et de mon vécu sexuel, par contre je ne vois pas comment j'aurais pu aider mes fils à canaliser et gérer leurs pulsions corporelles, à part la réserve de pudeur. Malgré l'intimité développée au sein du couple, je n'ai pas eu la curiosité de demander à mon mari, comment fonctionne son corps d'homme, comment il a géré son adolescence pour arriver à se contrôler une fois adulte. On ne demande pas aux pères d'expliquer les menstrues à leurs filles. C'est donc aux pères de faire l'éducation sexuelle sur le plan corporel de leurs fils : combien le font? Ont-ils ce courage, cette humilité, cette délicatesse, cette attention? Dans certaines familles, on paye une prostituée? pour cela!

Le fait que les hommes soient trop souvent taiseux, bloqués dans l'expression de leurs émotions, de leur sensibilité et d'une extrème pudeur souvent enfouie dans une vulgarité outrancière n'aide pas à partager, à transmettre ce vécu. Les femmes étant confrontées à leurs propres menstrues assez jeunes, souvent dans le tabou aussi, sont bien obligées de faire face et d'assumer la part "gore" de notre incarnation.. sexuelle.

Du coup, j'en discute avec un de mes fils assez déconstruit, qui me confirme que beaucoup de jeunes sont empêtrés dans la masturbation, à l'heure où internet croule sous le poids des contenus pornos 24h/24h des plus naïfs, vulgaires, aux plus trashs voire traumatisants: l'éducation sexuelle par le porno, autre vaste sujet qui nourrit le schisme entre les deux sexes, sachant que l'éducation sexuelle pro-féminin est proche du néant. Il est vrai que les garçons sont littéralement plugués à internet h24. Il me cite le cas d'un gars, qui aurait même choisi de se castrer pour mettre fin à cet enfer! Lui a trouvé des vidéos, où il a pu apprendre à se contrôler.

Donc la carence éducative, elle est là. Dans toutes les cultures, quelles soient catholiques, musulmanes, boudhistes ou talibanes, on a choisit de museler et de soumettre les femmes, tout en les maintenant dans une ignorance "docile", plutôt que d'avoir le courage d'apprendre aux hommes à canaliser leurs pulsions corporelles et à respecter leurs conjointes. Et ce tabou sur l'éducation sexuelle bienfaisante, il est aussi puissant que celui du viol, c'est comme les deux faces d'une même pièce.

Donc, Metoo doit se poursuivre pour ouvrir les sujets de l'amour et du sexe de A à Z, afin de vraiment déconstruire et reciviliser homme et femme, pour aboutir à des relations ouvertes, claires, sereines et épanouissantes pour tous.

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