En tant que femme féministe de longue date, je conteste la prise de position de nombreux militants de la cause féministe. Voilà pourquoi :
Combien d'hommes sont impunis pour des viols et des violences chroniques sur des dizaines de femmes, conservant rémunérations et "honorabilité" de façade en attendant que "ça passe"..... parce arcboutés dans leur "droit naturel" de virilité excessive, ils clament, haut et fort, envers et contre tout, leur innocence. C'est une victime forte, qui, par ce déni public, reste dans les codes de la dominance, s'appuyant sur le rapport de force : " tu vas voir comme mon culot mensonger va écraser ta vérité de faible." Conditionné.es par les codes de la dominance, nous abdiquons et aboyons en meute docile.
Ce sera, on le note au passage, le choix des hommes et femmes de droite, spécialistes de la dominance. Les hommes et femmes de gauche, encouragé.es par leur engagement dans le progrès social, vont tenter une voie nouvelle et faire face au problème, en le dévoilant.
Quand quelqu'un avoue sa faute avec courage et humilité, il bascule dans le camp de la faiblesse. Alors la foule, déchainée par cette position de soumission, se rue sur cette victime abattable et la lynche; autrefois physiquement, aujourd'hui symboliquement. Cela dessert la cause féministe par sa radicalité excessive. Nous ne pourrons pas progresser sur la cause féministe en luttant contre les hommes. Ces prises de position, paradoxalement, sont induites par la culture de la dominance. En effet, la cancel culture ou le lynchage sont aussi une variante de la culture de la dominance qui n'a pour seul objectif qu'éliminer des candidats, pour dégager la route au seul leader, qui arrivera à slalomer sur la piste ravageuse qui en découle. C'est une autre forme de prédation et de compétition.
Agir instinctivement ainsi, montre notre fort conditionnement à toujours privilégier les codes de la dominance, qui protège et sélectionne les dominants, quoiqu'il en coute et humilie les dominés de mille façon, et ce, dès la moindre faille. Cela montre que la déconstruction concerne hommes ET femmes pour élaborer et intégrer une vraie humanité réparatrice dans chacun de nos actes, jugements et évolutions.
C'est le cas dans l'éducation : un enfant qui avoue sa faute est puni, celui qui se maintient dans le déni, ne peut pas être puni puisque la faute n'est pas actée par les deux parties. Nous avons toujours essayé dans l'éducation de nos enfants, de ne pas punir; mais de trouver ensemble, comment réparer la faute commise. Chemin plus vertueux pour les deux parties.
Donc, féministes, réfléchissons mieux sur nos "réflexes" toxiques, acceptons la "confession" de Quatennens avec humilité ET exigence; Il ne s'agit pas là de passer l'éponge mais d'exiger réparation pour lui-même et pour faire avancer la cause des femmes et des hommes. Qu'a t-il fait pour analyser son geste, son dérapage? Comment sera-t-il sûr de ne pas récidiver demain? Comment va-t-il s'engager sur ce sujet pour que cette malheureuse expérience serve la société toute entière, aidant à ce qu'homme et femme arrivent enfin à vivre ensemble dans le respect de l'intégrité de chacun, les aspirations de tous trouvant une issue pacifique aux inévitables frustrations d'un collectif, qui commence dès deux altérités?
Nous ne devons, donc, pas rejeter Quatennens en temps qu'individu, mais rejeter, juste, son comportement ponctuel inacceptable. Il faut éviter que cet acte ne se banalise, tombant dans l'oubli, par l'éviction de son auteur, justement; et surtout ne pas passer l'éponge façon "c'est pas si grave, quand même, c'est juste une gifle"!
En quoi, écarter Quatennens, façon cancel culture, réglera le problème de la violence dans nos sociétés?
Face à tous les "pas vu, pas pris", dont Metoo révèle, pas à pas, l'ampleur abyssale, ne peut-il pas bien mieux représenter les hommes et leurs failles ainsi mises à jour?
La médiatisation d'un vrai parcours de résilience personnelle et collective, serait à mon avis bien plus profitable à tous.
Les hommes sont aussi victimes de ces comportements, car cela pourrit nos vies intimes à tous, père-mère et enfants, filles et garçons. N'oublions pas que la plus part des hommes ne font que reproduire une déviance acquise culturellement, ayant été eux-même victime de cet abus de pouvoir d'un dominant.
A nous, féministes d'avancer sur les violences conjugales en intégrant les hommes et non en les rejetant. Il doit s'agir d'une lutte intégrative avec résilience et non d'une lutte contre les hommes fait de rejet.
PS : Je remercie mon frère qui par sa vigilance sur l'équilibre des genres, m'a fait basculer de la lutte contre le patriarcat, vers la lutte contre la dominance, dont le patriarcat n'est qu'une des variantes. Car les femmes qui arrivent à ces positions de leader, activent le plus souvent, les mêmes codes "tueurs", dominants, froids et implacables, mais aussi malins et manipulateurs, exigés par la meute des dominants mais aussi des dominés... voir comment le peuple choisit ses leaders sur des caricatures de "force" :(