En ce début d'été 2024, un péril larvé nous guette et nous le sous-estimons : les tiques étendent leur présence sur nos territoires. Ces parasites mordent leur hôte. Une fois accrochées, elles restent arrimées et il est très difficile de s'en débarrasser. Elles transpercent doucement l'épiderme de leur victime pour se nourrir et leur sang, et sont vecteurs de maladies graves comme la maladie de Lyme.
En ce début d'été 2024, un autre péril larvé nous guette et nous le sous-estimons : les forces d'extrême droite étendent leur présence sur nos territoires. Ces parasites mordent leur hôte. Une fois accrochées, elles restent arrimées et il est très difficile de s'en débarrasser. Elles transpercent doucement les fondements des institutions démocratiques et insufflent un poison qui peut s'avérer funeste...
Certains critiquent le flou du programme du Rassemblent National, il est à mon sens pourtant extrêmement clair et méthodique : leur première priorité est de prendre le pouvoir, la seconde sera de le conserver. Oh, certains diront que c'est là le propre de tous les hommes et femmes politiques, qu'ils ne pensent tous qu'à leur réélection et se fourvoient en basses manœuvres. La politique excite les egos, c'est certain, mais il y a une différence fondamentale avec l'extrême droite : ces personnes sont prêtes à tout, à transgresser n'importe quelle règle, à utiliser n'importe quel moyen pourvu qu'il leur permette de parvenir à leurs fins.
L'expérience de ces mouvements nationalistes à l'étranger le montre, sans même avoir besoin de remonter aux années 1930.
Donald Trump aux Etats-Unis a tenté de manipuler les résultats de l'élection présidentielle de 2020 dans l'état de Géorgie, il n'a toujours pas reconnu sa défaite à cette élection et a exhorté ses partisans à attaquer le capitole le 6 janvier 2021.
Au Brésil, l'ancien président Jair Bolsonaro a multiplié les critiques contre le système électoral et quarante-huit heures après l'annonce des résultats défavorables à la présidentielle ses soutiens bloquaient différents axes routiers à travers le pays, prenant exemple sur son alter-ego américain.
Nareda Modi, premier ministre de l'Inde depuis 2014, a affaibli le pouvoir judiciaire; les menaces, le harcèlement et les arrestation sont devenus le quotidien des journalistes d'opposition et les lois sur la sécurité nationale servent à réprimer la dissidence.
Vladimir Poutine, probablement le plus doué d'entre eux, tient la Russe d'une main de fer de puis plus de vingt ans et n'hésite pas à liquider toute voix contestataire, qu'il s'agisse d'opposants, de journalistes ou même d'anciens alliés.
Le modèle le plus inspirant pour le RN sera certainement Viktor Orban premier ministre d'un pays membre de l'UE depuis 2021 : la Hongrie. Il a fait main basse sur les lignes éditoriales du pays via le rachat des médias indépendants par son entourage, il a nommé des juges proches de son parti aux postes clés et il a réformé la constitution pour affaiblir les contre-pouvoirs.
Certes il existe des exemples où l'extrême droite à goûté au pouvoir avant de refluer, Jörg Haider en Autriche ou Matteo Salvini en Italie, mais il s'agissait de coalisations gouvernementales au sein de démocraties parlementaires, ce qui restreint leur champ d'action. En France avec une cinquième république qui centralise déjà les pouvoirs, la situation serait bien différente.
Je ne prétends pas ici faire de morale - chaque citoyen reste libre de son vote - mais souhaite simplement attirer l'attention sur ce péril que beaucoup minimisent. Pendant ces deux semaines de campagne express, où les invectives des candidats ciblent tour à tour tous leurs opposants, il sera primordial pour chacun de hiérarchiser ses préoccupations, notamment lors qu'un second tour deux alternatives détestées se présenteront. J'invite les désabusés, qui n'ont jamais reçu de morsure de tique ou qui se disent qu'on n'a pas encore essayé le Rassemblement National, à prendre le temps de la réflexion et à ne pas décider sur le coup de l'émotion. Il n'y a aucune raison pour que ce parti se comporte au pouvoir différemment des mouvements d'extrême droite apparentés. Le porter au gouvernement pourrait être un aller sans retour aux conséquences très lourdes.
Pour moi une seule raison suffit à voter contre le Rassemblement National, si nous leur confions le pouvoir, ils ne le rendront pas. Personne ne doit pouvoir dire "je ne savais pas"...