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Nahid Shirpisheh, la mère de Pouya Bakhtiari, l’un des jeunes tués lors des manifestations de novembre 2019 en Iran, a tenté de se suicider en prison et a été placée en isolement.
Sa fille, Mona Bakhtiari, a annoncé la nouvelle sur le réseau social X :
« Aujourd’hui, après trois semaines sans nouvelles de ma mère, nous avons appris qu’elle avait tenté de se suicider en prison mardi dernier et qu’elle avait été placée en cellule d’isolement. Ma mère ne supporte plus la détention et sa vie est en danger. Nous demandons sa libération immédiate. Tout ce qui lui arrivera sera la responsabilité directe de la République islamique d’Iran ! »
Depuis l’assassinat de son fils par les forces de sécurité iraniennes, Nahid Shirpisheh subit une répression implacable. Le régime des mollahs ne se contente pas de tuer les manifestants, il s’acharne également sur leurs familles. Très vite après la mort de Pouya, sa mère est devenue l’un des visages du mouvement des familles en quête de justice. Et pour cette seule raison, elle a été arrêtée à plusieurs reprises et soumise à des pressions constantes.
En juillet 2023, elle a été de nouveau arrêtée lors d’une vague d’arrestations visant les familles des victimes de la répression. Le tribunal révolutionnaire de Karaj l’a alors condamnée à cinq ans de prison. Mais le régime islamique ne s’est pas arrêté là. En novembre 2022, à l’approche du troisième anniversaire de la mort de son fils, elle a été brutalement transférée de la prison de Kachouï à Karaj vers la prison centrale de Zanjan, loin de sa famille et de son réseau de soutien. Ce type de transfert arbitraire est une méthode systématique de répression : couper le détenu de ses proches, l’isoler encore davantage, accroître la pression psychologique.
Dans les prisons de la République islamique, l’isolement carcéral n’est pas une simple mesure disciplinaire. C’est une arme. Ceux qui, comme Nahid Shirpisheh, refusent de céder à l’intimidation, sont poussés à bout. Enfermer une mère en quête de justice dans une cellule isolée après une tentative de suicide ne relève pas d’un protocole de surveillance, mais bien d’une stratégie de torture psychologique. En Iran, l’isolement ne protège pas, il détruit.
Le régime sait que ces femmes sont des menaces pour son autorité. Depuis des décennies, il tente d’éteindre la voix des familles en quête de justice. Des mères de Khavaran, qui réclamaient la vérité sur le massacre des prisonniers politiques des années 1980, aux mères des jeunes tués lors des soulèvements des années 2010 et 2020, la stratégie est toujours la même : arrestations, pressions, tortures, et dans certains cas, élimination physique.
Mais cette tentative d’effacement est vaine. À chaque vague de répression, la mémoire collective se renforce. À chaque arrestation, un nouveau symbole de résistance naît.
Aujourd’hui, Nahid Shirpisheh n’est plus seulement une mère en deuil. Elle est devenue un symbole du prix que la République islamique exige de ceux qui osent demander justice. Son geste désespéré en prison n’est pas un accident, mais la conséquence directe des pressions inhumaines qu’elle subit. Le régime cherche à briser ces mères, à les enfermer dans l’oubli de leurs cellules, à leur faire perdre tout espoir. Mais l’histoire prouve que la répression ne fait que nourrir la détermination de ceux qui refusent d’oublier.
Le sang de Pouya Bakhtiari hante ce régime. Et désormais, le cri silencieux de Nahid Shirpisheh, enfermé entre les murs de sa cellule, résonne bien au-delà des barreaux. Car une mère en quête de justice ne se tait jamais.
- Hengameh Hoveyda