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Billet de blog 31 janvier 2015

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AIR ASIA : Magic Bonin ou l'effet " compétence max "

Air France 447 ou l'effet compétence Max. Cette compétence ! Elle était au max ! disait Éric Schramm s'exprimant au sujet de l'AF 447, et il fallait ça pour arriver à être les meilleurs, à être surtout les premiers, les premiers au monde à faire tomber un Airbus A330 alors qu'il est établi en croisière, les premiers au monde à crasher un Airbus A340.

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Air France 447 ou l'effet compétence Max

Cette compétence ! Elle était au max !

Illustration 1

disait Éric Schramm s'exprimant au sujet de l'AF 447, et il fallait ça pour arriver à être les meilleurs, à être surtout les premiers, les premiers au monde à faire tomber un Airbus A330 alors qu'il est établi en croisière, les premiers au monde à crasher un Airbus A340. Les plus inquiets des observateurs se demandaient au vu des nombreux rapports du BEA qui suivirent la catastrophe du vol Rio-Paris, tous accablants et alarmants sur le niveau réel des pilotes, si il y aurait le premier A320 qui .... voire le premier A380 .... 

C'est finalement arrivé, mais à la Cie low cost Air Asia Indonesia, le 28 Décembre dernier il y a donc tout juste un mois.

Et quasiment depuis ce tragique accident qui ne peut-être classé que dans la catégorie " LOC " ( loss of control ), on n'évoque qu'un seul scénario, celui du vol Air France 447. Jusque dans les moindres détails !

  • Il y avait donc eu la photo fuitée de Gerry Soejatman qui suggérait une montée brutale
  • Puis la fuite sur les communications radio, qui indiquaient que le co-pilote était aux commandes ( PF) et le captain Indonésien de fait en fonction PM ( pilot monitoring )
  • Puis le fait que ce co-pilote était Français, et que, quelle aubaine, il était très peu expérimenté d'une part, et que d'autre part il avait quarante cinq ans et une formation minimaliste

On inventait donc la fable très prisée par une presse stupide, de l'escalade d'un cunimb dans le but de l'éviter par le haut. Escalade vouée à l'échec ( sont-ils bêtes ces pilotes ) et donc un A320 pris dans l'étau de forces gigantesques, l'aspirant à 6000 '/mn, d'où le décrochage fatal...
Seulement c'était bien beau, mais ça n'expliquait pas le décrochage ? Heureusement un vieil homme sage, doué, qui détenait les deux seuls titres qui comptent aujourd'hui dans l'aviation ( la patrouille de France et la présidence du syndicat des machinistes tricolores avertit les enquêteurs indonésiens de ses réflexions expertes.

Illustration 2

 Je vous le dis, cet Airbus A320 sur lequel je n'ai d'ailleurs jamais eu la moindre expérience, ne peut pas décrocher, si au delà des délires sur la MTO, il n'est pas aussi victime d'une panne...

En d'autres termes, si on ne trouve pas une petite Alternate Law à se mettre sous la dent on va encore reparler de terrorisme ou de bombe...
Ouf ! Une nouvelle fuite indique aux intoxiqués de l'info continue, que des soucis avaient été reportés qui concernaient le gouvernail de direction . 

Il s'agissait même du calculateur qui a pour rôle de limiter le débattement de la gouverne de direction à grande vitesse et haute altitude, le RUD TRV LIM SYS, selon la terminologie .

Certes il s'agissait du RUD TRV LIM (2), or il y a bien sûr deux calculateurs l'un prenant le rôle de l'autre en cas de défaillance du premier.

Du coup tout le monde l'aura compris, le RUD TRV LIM (2) qui donnait déjà des signes de faiblesse est tombé en panne et que c'est quand même pas de chance le (1) lui aussi a tiré sa révérence, du coup c'est tout le système qui a été perdu. Imaginez ma bonne dame, un avion dans un monstrueux nuage dangereux, qui ne dispose plus de RUD TRV LIM ( tiens c'est curieux Air France 447 aussi l'avait perdu... )

Pas de bol la panne d'un calculateur RUD TRV LIM n'entraîne aucune conséquence et est simplement signalée à l'équipage ( crew awareness ), quant à la panne du système elle n'a aucune conséquences sur le vol, excepté à l'atterrissage. Pas de passage en alternate Law, pas de déconnexion du pilote automatique

Donc fuite inopérante, qui pour les professionnels ne permet toujours pas d'expliquer une déconexion du pilote automatique ( volontaire ou non ), et encore moins l'activation d'une alternate law sans protection, mais qui permet d'évoquer les FAC ( Flight Augmentation Computers )

Évoquer les FAC, ne serait-ce que par leur reset ( OFF THEN ON ) fera inéluctablement germer dans les esprits la question suivante : qu'est-ce qu'il se passe si le reset est inopérant ? Airbus répond RIEN et le vol doit se poursuivre dans les conditions définies par la check list .

Alors  alors ? Que faire ? Eh bien allons y, lançons la petite musique ( mais qui la sussure là-bas ? Le BEA ? ), celle qui insinue que le captain ( en charge à priori du traitement d'une éventuelle panne ) ne se satisfairait pas d'un reset inopérant, au moyen des seuls Push Button switches, du overhead pannel. (Pb-sw)

Alors que l'état de la machine après une éventuelle panne du RUD TRV LIM SYS, et d'un reset des FAC par les Pb-sw inopérant, lui permettait de se poser à Singapour en atterrissage automatique ? 

Au diable les scrupules, et sautons le pas et affirmons toujours par fuites organisées que les FAC ont été coupés par les breakers ( les fusibles quoi ). Ben voyons ! Cette fois-ci on la tient l'alternate law.

Et du même coup on comprend que pour ce faire le captain a dû quitter sa place. Bingo ! 
Il n'y a plus qu'à gloser sur sa fatigue, la nuit qu'il a passée et peut-être aussi qu'il avait sa copine à bord .

Embrouillamini en Indonésie ? 

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